11 - Waiting Game

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[Song reference: Waiting Game by BANKS]

Le téléphone sonna. Une sonnerie grinçante et violente – comme un cri arraché de force –, se donnant un air d'annonciateur de leur mort. Dustin sembla saisir la gravité que représentait ce son pourtant si trivial, il se jeta sur le combiné et le raccrocha sur-le-champ. Le silence, leur ami le plus fidèle à ce stade, fut de retour.

Mais le téléphone retentit une nouvelle fois, insistant. Dustin était sur le point de réitérer son action, mais Nancy le devança ; elle déracina littéralement l'appareil du mur, arrachant par la même occasion les câbles, et le jeta à l'autre bout du couloir. Elle défia d'un air sévère les garçons – qui la fixaient, les yeux écarquillés – et personne n'osa ouvrir la bouche. Comme si tout le monde attendait la suite du drame.

- Vous croyez qu'il a entendu ? risqua Max.

- C'est qu'un téléphone... il pourrait être n'importe où, non ? répondit Steve, hésitant.

Un long et grave cri résonna au loin, faisant des renforts contactés par Hopper l'élément déclencheur de leur perte. Quelle ironie. Ce cri qu'elle avait déjà entendu une bonne cinquantaine de fois maintenant, mais qui continuait à lui donner le haut-le-cœur. Le petit groupe s'avança timidement vers la fenêtre, tandis que les hurlements ne faisaient que s'enchaîner et se dédoubler ; il n'était plus question de quelques démo-chiens, non, il y avait bien toute une armée.

- Là je crois que ça craint... murmura Dustin.

La porte d'entrée s'ouvrit brusquement, laissant apparaître Mike, Jonathan et Joyce – qui portait un Will inconscient dans ses bras. Hopper entra à son tour, un fusil et une mitraillette dans chacune de ses mains ; il tendit le fusil à Jonathan dont le visage se figea.

- Tu sais t'en servir ?

- Quoi ?

- Est-ce que tu sais t'en servir ? répéta Hopper, impatient.

- Moi je sais, intervint Billy.

Tous les visages se tournèrent vers le blond. Le sheriff haussa les sourcils, sembla le jauger un instant, puis se décida à lui lancer l'arme à travers la pièce. Billy la rattrapa, la chargea et le rejoignit devant la fenêtre principale de la salle de séjour. Max ne put dire s'il avait fait exprès ou non, mais Billy s'était placé entre Hopper et Steve (armé de sa précieuse batte de baseball à clous), se mettant par la même occasion juste devant elle. Elle sourit intérieurement.

Deux minutes s'écoulèrent, ou peut-être cinq déjà – elle avait perdu la mesure du temps – et les cris ne cessaient de se rapprocher très nettement de la petite maison. Max respira profondément, les ongles plantés dans les paumes de ses mains et sa vie défila sous ses yeux avec une précision déconcertante.

Elle repensa d'abord à son père ; quel dommage, de mourir sans jamais n'avoir pu le revoir, sans avoir pu lui dire à quel point elle le haïssait de l'avoir abandonnée de la sorte. Et ses yeux glissèrent instinctivement sur le dos contracté de Billy. Ce demi-frère que la vie lui avait donné et dont elle avait le sentiment qu'elle venait tout juste de commencer à connaître. Quel dommage, de mourir sans avoir goûter à ses lèvres. Sans connaître ce que devait être cette sensation. À cet instant précis de son existence, il n'y avait plus le temps pour la culpabilité.

Un bruissement dans les buissons situés juste au-dehors de la fenêtre (en fait, leurs feuilles touchaient la vitre) la tira hors de ses pensées. À en juger par le bruit de leurs pas et de leurs grognements, les démogorgons semblaient faire le tour de la propriété.

CONTAMINATEDOù les histoires vivent. Découvrez maintenant