42 - Never Let You Down

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[Song reference: Never Let You Down by Woodkid, Lykke Li
pour le début du chapitre, néanmoins, je vous suggère :
Dynasties & Dystopia (from the series Arcane League of Legends)]


« JE T'EN SUPPLIE MAX, COURS ! »

L'envie de vivre la percuta de plein fouet. Comme portée par les mots de son demi-frère, par sa voix étranglée qui trahissait en cet instant toute son inquiétude, tout son égard pour elle finalement, Maxine se releva d'un mouvement rapide et s'engagea dans ce qui lui sembla la course la plus rapide et la plus lente de son existence. La plus rapide parce que jamais, dieu jamais, elle n'avait couru aussi vite, ne sentant même plus la douleur, pas même celle qui brûlait sa jambe blessée, l'adrénaline ayant entièrement pris le contrôle de son corps. La plus lente, aussi, car elle crut ne jamais y arriver, ne faire que du sur-place, tant les couloirs se ressemblaient, semblaient ne jamais se terminer, tant la créature était proche d'elle, son souffle chaud et humide sur son dos, sur le point de la (r)attraper à chaque nouveau pas qu'elle faisait.

Éventuellement, l'adrénaline arriva au bout de ses limites et elle sentit ses jambes devenir de plus en plus lourdes, tandis qu'un point se forma dans sa poitrine, écrasant ses poumons, l'empêchant de reprendre correctement son souffle. Elle n'avait qu'une envie : s'arrêter. Elle tourna la tête, regretta immédiatement son geste en voyant cette gueule grande ouverte, dégoulinante de bave, à quelques cinquante centimètres d'elle ; alors elle tenta le tout pour le tout, accéléra une dernière fois le rythme, puisant dans ses dernières ressources, celles qu'elle ne savait même pas qu'elle possédait et se rua dans la première pièce qui avait la porte déjà ouverte et s'y enferma avec une rapidité qui dépassait l'entendement – encore une fois ; putain, c'était décidément sans fin, cette merde allait-elle s'arrêter ? Elle ferma donc la porte derrière elle, la bête se jetant déjà sur le bois, l'empêchant de fermer le verrou, secouant son petit corps appuyé sur ce bois qui menaçait de lui exploser à la gueule à tout moment, les doigts tellement faibles, tellement tremblants, essayant désespérément de faire tourner cette putain de clef à la con, y arrivant presque, la porte vacillant une nouvelle fois, la clef avec, mais y parvenant tout de même, les doigts crispés, comme paralysés, comme remplis d'électricité.

Chancelante, Maxine recula de quelques pas, ne lâchant pas d'une seconde la porte de ses yeux – cet unique rempart, cette unique protection qui retardait de quelques minutes, non, secondes, sa mort. Elle recula, donc, espérant de tout son cœur, priant de toute son âme, implorant toutes les forces et les énergies qui traversaient l'univers pour que sa meilleure amie l'entende, pour qu'elle arrive, et qu'elle la sorte de là. Subitement, le vacarme contre la porte s'arrêta et elle crut un instant que le monstre avait trouvé une nouvelle proie – puisse-t-elle ne pas être Billy ou qui que ce soit d'autre d'ailleurs ; puisse-t-elle être un renard hurlant (de ce cri qui ressemble à une femme se faisant poignarder) non loin de là, non, pas même un renard, rien, juste rien, juste la vie qui fait bien les choses, qui appelle ce monstre ailleurs pour aucune foutue raison, oh, elle ne voulait pas la mort, ne voulait plus la mort, elle en avait assez, de tout ce sang, de tous ces cadavres. Mais bien vite, un bruit visqueux (presque comme un écoulement d'eau épaisse si seulement cela existait, un écoulement de boue peut-être) parvint à ses oreilles et la rouquine fut secouée par l'horreur lorsqu'elle baissa les yeux : sous la porte, le monstre était en train de se glisser sous la porte, ayant encore une fois transformé son corps en cette masse poisseuse et modulable à souhait.

- Putain de merde, s'étrangla-t-elle.

Elle recula encore de quelques pas, complètement tétanisée ; la bête allait bientôt être dans la pièce.

- Billy, hoqueta-t-elle, au bord du désespoir.

Seule Eleven pouvait la sauver ; mais ce fut quand même le nom de son demi-frère qui s'échappa de ses lèvres. Au moment où elle pensait, véritablement, mourir pour de bon. Billy ou celui avec lequel elle aurait aimé être, si elle avait eu le droit à une dernière heure avant de partir dans l'au-delà. Ce n'était pas qu'elle préférait sa présence à celle de ses meilleurs amis – non, ce n'était d'ailleurs tout sauf comparable –, mais plutôt qu'eux, contrairement à lui, savaient déjà tout. Ils savaient déjà son amour pour eux, sa reconnaissance envers eux, sa joie quant au fait d'être avec eux, sa tristesse lorsque ce n'était pas le cas, son envie de passer le restant de sa vie avec eux, à jouer aux arcades, à aller au cinéma, à emmerder Steve, à se déguiser lorsque personne d'autre ne le faisait, à rire encore et encore, à grandir ensemble, à s'aimer avec toute la sincérité du monde. Ils savaient tout, donc, lorsque Billy ne savait rien, commençait tout juste à le deviner ; à deviner à quel point elle tenait à lui, à quel point elle le portait de son estime (réellement), à quel point elle rêvait de lui, le jour, la nuit, constamment, à chaque instant, à quel point elle aurait aimé le rencontrer dans d'autres circonstances, à quel point elle aurait aimé que rien ne se déroule différemment car pour rien au monde elle n'aurait voulu prendre le risque d'atterrir dans un monde sans lui, à quel point elle donnerait tout pour lui, à quel point elle voulait le rendre heureux, l'aimer comme il le méritait.

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