Montaine - 15

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« Je pense que les gens veulent être rebelles dans une société très cadrée. Je suis né rebelle, enfin, ce sont mes gènes qui sont rebelles. »

Stephen Thompson

Cela fait plusieurs semaines que je suis enfermée chez moi. Non pas vingt-quatre heures sur vingt-quatre, mais la plupart de mes journées.

Au début, Clarisse a tenté de me sortir de ma grotte afin que je l'accompagne à ses soirées inopinées. Or, je sais que je vais tenir la chandelle, la sachant aux bras de David, le batteur du groupe des Cheeky Boys.

Alors j'ai tout bonnement fait l'impasse sur mon téléphone et je m'en suis pas trop mal sorti. En y jetant un œil de temps à autre, j'ai remarqué que cette dernière avait fini par laisser tomber.

Tant mieux, car j'avais réellement besoin de me retrouver seule pour souffler un peu et me sentir mieux avec moi-même. La vie qu'elle mène et qu'elle souhaite mener n'est pas ce que je veux. Pour cela, il fallait vraiment que je m'écarte de tout ce qui ne me convenait pas pour que je puisse enfin devenir sereine. Non pas que je n'aime pas ma copine, au contraire, cependant ça devenait un besoin vital.

Ce matin, je regarde mon mobile comme tous les matins de la semaine avant de le laisser de côté jusqu'au lendemain, et ceci afin de vérifier mes potentiels messages et mails. 

Le prénom de Clarisse s'affiche sur mon écran et je devine instinctivement qu'elle me propose une soirée.

« Coucou toi ! Comment vas-tu ? Avec David, on part à Paris. Il a une proposition de boulot. On a une place en plus, t'es partante ? »

Son message me semble distant et loin d'être chaleureux. Normalement, elle est pétillante, curieuse et insistante, or là, c'est un SMS toute somme plus banal. La politesse est là, mais sans fioritures comme elle en à l'habitude.

Néanmoins, ce que je lis me laisse perplexe. Une proposition sur Paris ? Pourquoi ne m'en dit-elle pas plus ? Accepter sans savoir ce que c'est, c'est étrange, non ?

Je lui demande ce qu'il en est et celle-ci me répond en quelques secondes :

« Concerts sur trois jours. Logés, nourris, blanchis. En gros. »

Encore un message bref. Décidément ! L'aurais-je vexée en la mettant de côté ces trois derniers mois ? Je ne l'ai jamais connu comme ça, alors pourquoi aujourd'hui ?

« Si tu veux, pourquoi pas. » lui envoyé-je, prenant sur moi. Peut-être que ce séjour me fera du bien après tout et me permettra de retrouver mon amie.

« Bien. Rdv lundi matin 6h30 gare Sud. Regarde tes mails. Biz »

C'est quoi ça encore ? Depuis quand est-ce qu'elle me « Biz » ?

Je décide de mettre mes questionnements aux oubliettes. Je verrais bien lundi comment ça se passera entre elle et moi, pour le moment, je me fais sûrement des idées pour rien.

Quoiqu'il en soit, si elle l'invite pour participer à un concert du trio en question, cela signifie que je vais inéluctablement revoir Zack. 

Une boule d'angoisse naît dans le creux de mon ventre. Avant d'accepter, je n'y avais pas pensé et maintenant que je m'en souviens, je regrette d'avoir acquiescé à cette proposition.

Dans un autre sens, je me demande comment il va se comporter à mon égard depuis que je l'ai maladroitement éconduit. J'espère qu'il ne m'en tiendra pas rigueur et que cela ne portera pas atteinte à l'ambiance de ce voyage. 

J'éteins mon téléphone et le range dans le tiroir de mon bureau. Je préfère ne pas m'épancher sur ces futurs jours à venir et de vivre l'instant présent, comme j'en ai de coutume depuis ces dernières semaines.

La journée passe à une vitesse affligeante et j'hésite à passer à la boutique de Chantal. Cela fait un bon moment que je n'y ai pas mis les pieds, je me demande comment elle va et s'il y a de bonnes affaires à faire. Néanmoins, le temps maussade face à cette pluie diluvienne et l'heure tardive ne me laissent pas le choix. Je resterai chez moi.

La soirée est semblable à toutes celles de ces derniers mois. Je me prépare une conserve réchauffée aux micro-ondes et me cale sur mon canapé, un plaid sur les genoux devant une série Netflix dont je ne me passe plus.

Je reste éveillée jusque très tard dans la nuit, ne voulant pas cogiter dans mon lit tout en fixant ce maudit plafond émasculé.

Finalement, ce petit séjour ne me fera peut-être pas de mal, qui sait ? Ça me changera sûrement les idées.

You give Love a bad nameOù les histoires vivent. Découvrez maintenant