Montaine - 21

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Enfin sous la douche, l'eau chaude ruisselant sur ma peau nu, je me remémore les paroles de Zack.

Sa vie a été semée d'embûches, je peux comprendre que cela n'a pas été facile pour lui, mais je le trouve un peu trop insouciant, ou bien, il veut jouer au rebelle que rien ne peut atteindre. C'est tout ce que je déteste chez un homme.

Je suppose que Zack sera déjà dans la chambre, alors j'ai préparé le nécessaire. Je ferme le robinet et après m'être essuyée, j'enfile mon pyjama polaire. Ce n'est pas très sexy, mais je ne cherche pas à l'être, je pense en premier lieu à mon confort personnel.

Lorsque je sors de la salle d'eau, je ne suis pas étonnée de le voir assis sur le lit à fouiller dans sa valise. D'abord muet, il me jette quelques œillades avant de relancer la discussion.

– Je ne voulais pas être désagréable avec toi, tout à l'heure.

Je hausse les épaules, peu regardante quant aux paroles qu'il a tenu. Cela m'a blessé, certes, mais je ne suis pas rancunière et cela ne me touche pas tant que ça, puisque je considère plus Zack comme un inconnu que comme un ami.

– Tu ne m'en veux pas ?

– Rien ne me touche quand ça vient de quelqu'un que je ne connais pas.

Je l'ai dit, je ne suis pas rancunière, mais quitte à rentrer dans son jeu, amusons-nous ensemble.

Ce dernier ne répond pas tout de suite, peut-être déstabilisé par mon répondant, toutefois, il se reprend assez vite et ajoute :

– Tu as raison. Être faible devant des inconnus, c'est leur donner la capacité de vous abattre encore plus.

Quelle phrase ! Il a réfléchi longtemps avant de la sortir celle-ci ? Je vois où il compte m'emmener, mais il faut que je reste prudente, car j'ai tendance à me laisser embarquer un peu trop vite parfois.

– Ça te dirait de finir notre discussion ?

– Pour quoi faire ?

– Cela me semble logique, non ? Pour te connaître, bien sûr !

Bon, je dis bien ça, il s'est épanché sur sa vie avec sa tante, alors pourquoi ne pas lui donner ce qu'il veut et après, je serais tranquille.

– Si ça te tient à cœur, dis-je, lui soutirant un sourire ravi.

Ça me fera sans doute du bien de parler de ce qui me pèse sur le cœur.

– D'accord. Dans ce cas, tu tenais à comprendre ce qui me terrifie dans le fait d'entamer une relation. Alors je vais te le dire.

J'hésite, mais il faut que je me lance. Peut-être qu'après ça, il remettra son jeu de séducteur en question.

– J'ai longtemps été amoureuse d'un garçon. Je pense que j'aurai tout donné pour lui. Je n'étais pas folle de lui, mais il y avait quelque chose de fort, de quasi-évident, comme s'il était ma moitié, celui qui devait être à mes côtés pour le restant de mes jours. Il m'a fait comprendre malgré lui, ce qu'était la différence entre l'attachement et l'amour. J'ai pleuré pour lui. Plus que je n'aurais dû et pourtant aujourd'hui encore, je n'arrive pas à le détester. Je pense encore à lui chaque fois que j'entrevois quelque chose avec un homme. Je me répète que c'est du passé, qu'il a joué avec mes sentiments, qu'il ne vaut pas la peine que je pense encore à lui aujourd'hui, mais rien n'y fait. Ça fonctionne sur le moment, sauf que je replonge peu de temps après. Rien qu'une mélodie, une impression de déjà vue, une photo, je retombe dans mes travers. Je me déteste pour ça, car j'ai l'impression d'être faible et de tout gâcher pour lui.          

Je fais une pause, plongée dans mes souvenirs, les bons comme les mauvais. Quant à Zack, il reste silencieux, ne laissant rien transparaître sur son visage.

– J'aimerais tellement l'oublier, mais j'ai la sensation que c'est impossible et ça me terrifie, parce que quand j'y repense, je ne retiens que les meilleurs moments passés avec lui. Je me voile sans doute la face en faisant ça et c'est ce qui m'empêche d'avancer. C'est comme si je restais enchaînée à un souvenir, à une personne qui, à mon sens, ne m'a jamais rendu l'attention que je lui donnais.

C'est tellement difficile de raconter cette histoire à quelqu'un, encore plus à un garçon...

– Lorsque j'ai appris qu'il m'avait trompé, cette période de ma vie m'a beaucoup fait de mal, aussi bien sentimentalement que moralement. Je me suis accrochée à une personne qui était néfaste pour moi, mais je l'aimais. Quoiqu'il en soit, il y a quelque chose en moi qui me ramène sans cesse à lui dans les moments où je m'y attends le moins.

Son silence me convient, j'ai peur d'entendre les mêmes paroles que Clarisse me balance en pleine figure depuis toutes ces années.

– Je souhaiterais tellement que ça s'arrête, parce que ce n'est plus possible de souffrir pour une personne qui suit le cours de sa vie, alors que moi, je reste bloquée sur elle. Tu vas me prendre pour une illuminée, mais à chaque fois que je pense passer à autre chose, je me rends compte que ce n'est pas le cas.

Lui qui pensait plomber l'ambiance, je pense que je l'ai devancé haut la main.

Suite à mon explication, Zack et moi restons silencieux jusqu'à ce que nous décidions d'aller nous coucher, lui sur la banquette prêt de la fenêtre, et moi dans le lit bien trop grand pour une fille célibataire.

You give Love a bad nameOù les histoires vivent. Découvrez maintenant