Chapitre 35 Lara

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J'ai mal. Mais ça ne date pas d'hier. Je ne voulais pas que tout explose ce soir, pas avec tous les efforts qu'ils ont faits pour préparer cette fête. Qu'il a fait... Mais tous les jours depuis ce qui s'est passé, j'essaie d'oublier cet épisode avec Laetitia. Et quand Eli m'a dit qu'il voulait partir avec moi, j'ai réalisé l'ampleur de la situation. Et j'ai aussi compris que tant que je n'aurai pas de réponse, je ne pourrai pas être avec lui. J'ai toujours été seule et ce n'était pas pour rien. Quand il m'a embrassée dans la cuisine tout à l'heure, j'ai failli craquer. Parce que c'est comme ça avec lui, je n'arrive pas à garder la tête froide. J'ai dû me faire violence pour le repousser. Je place mon casque sur ma tête et fait vibrer ma bécane.

Je lui ai dit que j'avais besoin d'être seule. Son visage s'est décomposé et j'ai cru me prendre un crochet du droit. Je fonce au lac, j'ai besoin de crier, peut-être même de pleurer. Je ne sais pas. Je n'ai plus de certitude, tout est flou. J'arrive au lac et gare ma moto à côté de notre arbre. Notre arbre... Je frappe une fois dans le sac. Puis deux. Puis je frappe pendant deux minutes. Je suis à bout de souffle. Je n'arrive pas à croire ce qui m'arrive. Tout était prévu. Tout était calculé dans ma tête, j'allais aider mes parents le plus vite possible et j'allais me barrer. Eli est arrivé et a remis en question toutes mes certitudes, toute ma vie. Aujourd'hui, je suis perdue et je ne me vois plus sans lui. Je me prends la tête. Il me fait du bien, il n'y a qu'avec lui que je me sens vivante. Mais comme je l'ai toujours craint, il me ment.

- Petite pute !

Avant même d'avoir le temps de réagir, quelqu'un sorti de nulle part et me fonce brutalement dessus. La douleur m'arrache un cri et en quelques secondes qui me paraissent une éternité, je suis entraînée violemment au fond du lac. J'ai le souffle coupé net. Mon corps essaie par tous les moyens possibles de remonter à la surface pour respirer, car je manque d'air. Si je ne respire pas d'ici 30 secondes, je ne tiendrai pas. Je me démène dans tous les sens pour que ce connard qui me ceinture avec ses bras, me lâche. J'y parviens et remonte rapidement à la surface. Sous le choc mes yeux se révulsent et essaient de localiser le malade qui vient de me jeter à l'eau. Je me retourne et je n'ai pas le temps de souffler que deux grosses mains m'enfoncent la tête sous l'eau. J'essaie de lui envoyer un poing, mais la pression de l'eau transforme ma force en plume. Plus je manque d'air, plus je me débats. J'essaie de me dégager comme je peux, mais plus les secondes s'écoulent, plus je réalise avec horreur que je n'y arrive pas.

Son emprise est trop forte, et je suis trop faible. À bout de souffle, je ne bouge plus et cesse de lutter. Pendant un instant qui me semble durer une décennie, mon pire cauchemar se produit : j'abandonne le combat. Je ferme les yeux et l'idée de comment on va annoncer ma mort demain dans le journal me traverse. Puis d'un coup en une fraction de secondes, je ne vois pas ma vie défiler comme c'est censé être le cas avant de mourir. Je vois mon avenir. L'avenir que j'aurais pu avoir. Avec Eli. J'imagine tous les endroits que nous aurions pu visiter, toutes les choses qu'on aurait pu faire, tout ce qu'on aurait pu construire... Comment j'ai pu gâcher notre dernière soirée comme ça... Je serre les poings. Avec mes dernières forces et ce qui me reste d'oxygène, je me retourne d'un coup et mords mon agresseur de toutes mes forces. Il hurle et au même moment, quelqu'un plonge dans l'eau juste à côté de nous. Je me sens remonter à la surface et des bras me ramènent au rivage. Je me laisse flotter, j'ai l'impression que ma gorge est restée au fond du lac.

- Ça va aller, bouge pas.

J'entends à moitié ce qu'on me dit, mais je reconnais la voix et les bras d'Eli. Je tousse et crache de l'eau du lac comme je peux. Je reprends mon souffle douloureusement et quand j'ai retrouvé l'usage de mes sens, je vois Eli frapper mon agresseur. J'entends les os se briser littéralement. Il va le tuer. Je me lève maladroitement et tombe comme une merde.

- Eli !

Il ne m'entend pas, il est comme en transe. Je me relève difficilement et tente de l'arrêter.

- Arrête je t'en supplie, tu vas le tuer !

L'homme a le visage en sang et Eli ne lui laisse même pas l'occasion de riposter. Je hurle et commence à suffoquer...

- Stop ! Arrête. Arrête ! Tu ne dois pas me quitter...

Je tombe à genoux et imagine déjà ce qui va se passer. Je vais me retrouver seule. Ils vont me l'enlever.

Mais à ces mots, Eli cesse de tabasser le type et il se tourne vers moi. Il fixe mon agresseur puis moi, comme si en un éclair de conscience, il se rendait compte de la situation. Il se précipite vers moi et me serre contre lui. Je m'agrippe à ses épaules comme jamais je ne me suis agrippée à quelqu'un. Il tremble. Moi aussi. J'ai eu peur. J'ai bien cru que je ne le reverrais jamais. Que je n'aurais plus jamais l'occasion de lui parler, de le toucher... j'ai envie de lui dire tellement de choses, mais aucun son ne parvient à sortir de ma bouche. J'ai froid. Je suis fatiguée. J'ai peur pour la suite. L'homme qui vient d'essayer de me noyer se retourne sur le dos et le choc est tellement intense que je repousse Eli et vomis. C'est le mec qui est passé au café juste après qu'on soit rentrés du weekend à la mer. Je tente de dissimuler ma surprise et ma peur, car Eli n'a pas besoin de ça. Il se lève et se dirige vers le sac de boxe.

- Qu'est-ce que tu fais ?

- Je vais l'attacher avec la corde. On va au commissariat porter plainte pour tentative de meurtre.

BOXING HEART (En réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant