𝐘𝐨𝐮𝐫 𝐭𝐨𝐮𝐜𝐡 𝐠𝐨𝐭 𝐦𝐞 𝐥𝐨𝐨𝐤𝐢𝐧𝐠 𝐬𝐨 𝐜𝐫𝐚𝐳𝐲

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Depuis plusieurs minutes, déjà, Eddie tambourinait à sa porte. Chloé avait déjà fait le tour de son appartement une dizaine de fois, tentant de se concentrer sur sa respiration pour se calmer. Mais à cause de l'écho des coups de poings du noiraud contre la porte d'entrée, il lui était impossible de frôler cet état de zénitude qu'elle rêvait de retrouver.

Elle ne voulait pas lui ouvrir. Elle ne voulait pas lui parler et risquer de lancer une énième dispute qui ne mènerait sans doute à rien. Le jeune homme ne semblait pas vouloir assimiler les reproches qu'elle lui faisait. Il ne comprenait pas qu'en formant un groupe, sans même penser à revenir dans sa vie pour le partager avec elle, l'avait blessé et déçue en tout point. La rousse savait qu'en lui montrant ce studio et qu'en lui proposant de lâcher ses musiciens pour prendre un nouveau départ avec elle, partait d'une bonne intention, mais c'était justement ce qu'elle lui reprochait.

Les gens n'étaient pas des poupées de chiffon qu'il pouvait manier à sa guise, user, puis s'en débarrasser une fois qu'il n'avait plus besoin d'eux. Les autres n'étaient pas à son service. Il n'avait pas le droit de lui demander de monter un groupe avec elle, alors même qu'il était toujours incapable de mettre de mots sur son départ. Il ne pouvait être prêt à repartir de zéro alors qu'il refusait de se confier à elle.

Chloé savait que ces soucis s'appliquaient aussi à elle. Son bagage émotionnel était immense et tant qu'elle n'accepterait pas de s'en délivrer, elle serait tout bonnement incapable de réellement lui pardonner.

— Chloé, mais bordel ! Ouvre cette porte ! hurla-t-il une nouvelle fois.

— Non ! Dégage ! Je ne veux pas te voir !

— Tu sais bien que je vais rester là jusqu'à ce que tu ouvres alors arrête de me faire poireauter dans le couloir, je vais finir par me faire arrêter par les flics !

D'un pas lourd, la jeune femme s'approcha de la porte, la déverrouillant. Le noiraud était sur le point de toquer une nouvelle fois, se ravisant en voyant qu'il avait enfin une vue sur l'appartement. Le visage rouge carmin de la rousse lui sauta aux yeux, et il orienta son regard vers le salon avant de le concentrer sur elle.

— Laisse-moi te parler, juste cinq minutes, dit Eddie.

— Va te faire foutre Munson !

Il recula son visage, son faciès reflétant sa surprise à l'entente de cette phrase odieuse et agressive. Il fronça des sourcils.

— C'est déjà la deuxième fois que tu dis ça. Change de disque !

La musicienne se résigna, rebroussant chemin vers le canapé, s'asseyant en tailleur dessus. Le guitariste s'empressa pour entrer, fermant la porte derrière lui en ôtant sa veste avant de la laisser sur la table de la salle à manger. Il retroussa ses manches jusqu'à ses coudes, restant à bonne distance de Chloé.

Il la toisait du regard, ne sachant pas par où commencer. Un milliard de pensées tournait dans sa tête au même moment. Tout était au bord de ses lèvres. Les excuses qu'il lui devait depuis si longtemps étaient sur sa langue, lui faisant goûter cette profonde amertume. Seulement, il était tout simplement incapable de les articuler.

Eddie voulait lui dire trop de choses, lui parler pendant des heures et en même temps simplement l'observer, regarder sa colère se dissiper pour que sa bonne humeur coutumière fasse enfin son grand retour. L'appartement n'était plus qu'un vaste champ de bataille, Munson étant le seul capable de décider si ses prochaines paroles seraient un nouvel obus lancé à l'ennemi, ou, au contraire, un traité de paix qui mettrait fin aux combats.

Il était ce soldat perdu en plein no mans land, ce guerrier accourant vers l'autre côté de la lande pour espérer y trouver l'espoir et surtout la rédemption. Le noiraud était toujours vivant et pourtant, il percevait cette lumière au fin fond du tunnel. Ce piège vif et étincelant, ne sachant pas s'il le guiderait à la liberté ou au trépas. Ce soir, il pourrait tout perdre. Sa relation avec Chloé ne tenait plus qu'à un fil.

𝐋𝐞 𝐝𝐞𝐫𝐧𝐢𝐞𝐫 𝐚𝐜𝐜𝐨𝐫𝐝 | Eddie Munson x OcOù les histoires vivent. Découvrez maintenant