𝐘𝐨𝐮 𝐛𝐫𝐨𝐮𝐠𝐡𝐭 𝐨𝐮𝐭 𝐭𝐡𝐞 𝐛𝐞𝐬𝐭 𝐨𝐟 𝐦𝐞

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TW : mention de TCA.

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Assise en tailleur au-dessus de la cuvette de ses toilettes, Chloé avait passé l'intégralité de la soirée à rejeter les restes de son repas frugal, ses larmes dévalant ses joues à la vitesse d'une voiture de sport engagée sur l'autoroute.

Un échec cuisant. Encore un.

Sa tentative de s'alimenter ne s'était pas déroulée comme elle l'avait prévu et elle était actuellement en train d'en payer les pots cassés. Elle aurait dû se méfier de l'odeur qui lui avait déjà donné une profonde nausée. Elle avait voulu se surpasser et surtout vaincre ses peurs, mais elles, en avaient visiblement décidé autrement.

Son front dégoulinant de sueur se déposa contre la surface glaciale de sa cuvette, scellant ses paupières, tentant de se concentrer sur le rythme de sa respiration dispersée. Il était hors de question qu'elle se déverse une nouvelle fois dans les toilettes. Sa poitrine la faisait souffrir, mais la douleur irradiant sa tête était bien pire. Une véritable centrifugeuse était à l'œuvre, remuant ses pensées les plus claires, inondant son esprit d'une affliction physique qu'elle n'avait encore jamais connue.

Elle était terriblement déçue d'elle, se trouvait même pitoyable. Elle était-là, assise en plein milieu de sa salle de bain, entendant les voix de quelques étudiants enivrés déambulant sous ses fenêtres alors qu'elle, avait refusé de digérer son repas par stupide peur de grossir. Ce manège durait déjà depuis quelques semaines, et un véritable rituel morbide s'était installé à chaque heure de repas.

Chloé cuisinait, avalait quelques bouchées avant de se ruer dans ses sanitaires et de se débarrasser de ces parasites alimentaires qui lui gâchaient la vie. Puis, lorsqu'elle reprenait ses esprits, elle partait se scruter dans le miroir de sa chambre, observant le léger bourrelet situé au bas de son ventre, se rassurant en constatant qu'il n'avait pas pris en taille.

Elle n'expliquait pas l'arrivée de ces troubles. En réalité, ils avaient toujours été présents. La boulimie l'avait impacté durant son adolescence, et le paroxysme entre ces deux opposés la faisant abruptement grincer des dents. La rousse, qui avait eu tant besoin de la nourriture pour se sentir bien, en refusait à présent chaque dose de réconfort. Elle qui avait tant aimé manger, haïssait maintenant l'impact de ce verbe maudit sur son physique et son mental.

Mais ce soir, c'était différent. Elle n'arrivait pas à bouger d'un seul iota. Elle était immobile, immobilisée, les fesses contre le sol, son âme meurtrie flottant dans l'atmosphère de sa salle d'eau. Sa crise d'angoisse était fulgurante et elle n'avait aucune idée de comment y mettre un terme. Son anxiété était devenue maîtresse de son organisme, première décisionnaire de tous ses mouvements et de toute ses pensées, lui empêchant d'émettre un plan pour s'en débarrasser.

Du haut de sa tour d'effroi et d'acide, la rousse voyait son corps recroquevillé, la pitié profonde qui en émanait. Ses muscles étaient tendus, ses doigts, cramponnés ardemment à la cuvette, implorant, n'importe quel dieu qui puisse exister, que son mal connaisse la fin de son règne atroce et implacable. Elle avait besoin d'aide. Seulement, elle ne savait pas qui appeler.

Hailey et James feraient tout pour l'envoyer à l'hôpital pour la soigner, Robin et Steve formuleraient également cette idée. Il n'y avait qu'elle, qu'elle et la personne qui devait probablement souffrir de l'exact même manière.

La jeune femme se releva avec difficulté, les mains tremblantes, les jambes chancelantes. Elle avança jusqu'au salon, se maudissant pour avoir choisi un appartement aussi grand. Chloé déverrouilla rapidement son cellulaire, s'empressant d'écrire un message à Eddie. Ce dernier contenait simplement son adresse. Rien d'autre.

𝐋𝐞 𝐝𝐞𝐫𝐧𝐢𝐞𝐫 𝐚𝐜𝐜𝐨𝐫𝐝 | Eddie Munson x OcOù les histoires vivent. Découvrez maintenant