Chapitre 36

2.8K 308 23
                                    

Nous nous approchions de la falaise, ébahis. C'était incroyable...

Je jetai un coup d'œil à Egio, ça avait toujours été un rêve pour lui, voir la mer. Il m'en parlait tout le temps petit et j'avais souhaité si ardemment de pouvoir l'y emmener. J'étais bouleversé d'émotion.

Egio s'approchai du précipice et regardait devant lui les bras ballants, surement aussi ému que moi. Ses prunelles étincelaient.

Je me tournai vers maitre et sans demander mon reste, lui sautai au cou les larmes aux yeux. Avant de partir d'ici mon frère avait réalisé le seul souhait qu'il n'ait jamais eu et c'était grâce à lui.

La reconnaissance m'étouffait le cœur et j'étreignis le démon plus fort encore, essayant de lui faire ressentir un dixième de ce sentiment qui m'enserrait la poitrine. J'étais heureux.

L'étendue bleue s'allongeait à perte de vue devant nous, les vagues se fracassaient sur les roches sous nos pieds alors que nous étions assis au bord du vide, sécurisés par la main protectrice du démon à la peau sombre sur nos hanches. Heureusement qu'il était là parce que le brun était émerveillé et se penchait dangereusement en avant.

-Fais attention mon doux, intervint le démon en le ramenant contre lui. Une chute de si haut ne peut qu'être mortel.

-Je fais attention, geignit-il en s'agitant.

Nous rîmes.

-Tu te penches trop, écoute ton maitre.

Il lui embrassa la tempe ce qui calma légèrement le petit effronté.

-Ne suis-je pas celui qui prendra toujours soin de toi ?

Sa voix de velours le fit définitivement plier et il se laissa aller. Têtu comme il était, il tendit quand même le cou à son maximum pour en voir le plus possible.

Je lui jetai une œillade amusée et ne lui prêtai plus attention, préférant me concentrer sur l'étendue d'eau qui s'agitait à perte de vue.

En contrebas de petites algues persistaient sur les rochers, brillaient au soleil. Leur couleur ivoire contrastant avec l'allure sombre du sol.

Sur notre droite, un sable noir faisait le lien entre la forêt et la mer agitée.

-On peut aller voir ça de plus près, demandai-je en levant les yeux vers notre maitre.

Il sourit.

-Bien sûr, c'est prévu, nous dormons au bord de l'eau ce soir.

Sa déclaration nous fit sauter de joie et il eut bien du mal à calmer nos piaillements excités.

-Où se trouve le chemin pour descendre en bas maitre ?

Léandre détacha la bride d'ocre et la laissa vaquer à ses occupations, brouter ça et là, certain que jamais elle ne nous ferait faux bond. C'était une jument extrêmement loyale, je me demandai depuis combien de temps elle appartenait à notre démon et comment il allait se sentir à l'idée de la laisser derrière nous, sur Terre.

Nous nous dirigeâmes vers le chemin escarpé et je repoussai ces interrogations à plus tard, nous aurons tout le temps d'aborder le sujet.

Il s'engagea sur le sentier et nous fit descendre à sa suite.

-Soyez prudent, le sol peut s'avérer glissant à certain endroit et les petits cailloux sont souvent traitres.

Je fixai les yeux sur mes pieds, concentré sur chacun de mes pas.

Un grognement attira mon attention et je levai les yeux vers la courbe de ses épaules crispées. Était-il fâché ? Il n'y avait pourtant rien autour de nous qui puissent expliquer cette soudaine tension.

Saikens Où les histoires vivent. Découvrez maintenant