ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 𝕌𝕟

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"I don't want control, I want to let go

Are you ready ? I'll be ready

Cause now it's time to let them know you are ready"

What About Us - P!nk

Lorsque le point final fut inscrit sur le papier, j'attrapai une enveloppe crème posée sur le côté de mon bureau. Doucement, je fis glisser les trois feuillets écrits à la main à l'intérieur, avant de la refermer. A l'aide d'une pastille de cire mauve, qui fondait dans une coupelle au-dessus de la flamme d'une bougie, je fis couler le liquide sur le papier, pour finalement venir poser un sceau dessus.

D'une lenteur extrême, afin de ne pas casser la cire, j'enlevai le tampon de fer après quelques secondes. Ensuite, je piochai dans le pot à crayon en face de moi un stylo à bille ainsi qu'un feutre à peinture argentée. Sur le devant de l'enveloppe, je notai uniquement ces quelques mots :

"Just Someone Writing"

Une fois cela fait, j'utilisai le marqueur pour en appliquer le liquide de couleur sur la cire. Ainsi, je fis apparaître, avec des gestes mesurés, deux initiales, qui n'étaient autre que les miennes.

Un D et un G.

Cacheter une lettre n'était pas une pratique relativement courante au vingt-et-unième siècle. Pourtant, j'adorais le faire. Je trouvais que ça rendait la chose plus authentique, que ça permettait de faire un bond en arrière, à l'époque où ça se pratiquait.

On m'en avait souvent fait la remarque. J'étais née à la mauvaise époque. Or, cela ne me dérangeait pas. Se couper du monde qui nous entourait pour se plonger dans l'ancien temps était un moyen de se ressourcer pour ma part. De me sentir mieux.

Ecouteurs aux oreilles, je me levai difficilement de mon bureau avant d'aller enfiler un long trench aux tons beiges. Je pris mon sac à main, posé à l'entrée de mon appartement sur le petit buffet en merisier, sans avoir omis d'y glisser ma missive. Un léger sifflement sortit d'entre mes lèvres et, aussitôt, une boule de poils surexcitée se précipita vers moi. L'animal, un assez vieux chien, bien que vif, aux poils feux et blanc, vint immédiatement s'asseoir à mes pieds, sachant pertinemment ce qu'il allait se passer.

― Aller mon grand. On va aller se balader un petit peu.

Délicatement, je passai un harnais autour du poitrail de mon fidèle ami et l'attachai à une grande longe. Finalement, tous deux nous sortîmes de l'appartement, empruntant l'ascenseur pour descendre les trois longs et pénibles étages qui nous séparaient du rez-de-chaussée.

La rue était bondée de monde ayant décidé de sortir, afin de profiter au maximum du grand soleil qui rayonnait, versant ses doux rayons dorés sur la peau des habitants de la ville de San Diego. Tous étaient heureux de l'agréable semaine de beau temps annoncée en ce début de mois de janvier, totalement imprévue.

Tranquillement, avec mon animal de compagnie, nous nous dirigeâmes vers le parc qui se trouvait non loin de là. Ce dernier était rempli de jeunes gens désirant se détendre. Des enfants qui jouaient entre eux au ballon, ou bien qui se couraient après. D'autres chiens jouaient avec leur maître, des couples se prélassaient sur un banc ou sur l'herbe. Des coureurs profitaient également du beau temps pour faire du sport.

Je marchais sur le chemin de petits cailloux blanchâtres, entourée par les grandes étendues d'herbe, Woody, mon chien, sur les talons. Après une quinzaine de minutes de marche, les jambes douloureuses, je m'arrêtai sur un banc, afin de souffler un petit peu. Avant de partir de chez moi, j'avais enlevé mes écouteurs, désirant bénéficier du bruit alentour pour me reconnecter au monde réel. J'entendais les enfants rire, les gens discuter, les oiseaux chanter, le vent bruisser entre les feuilles des arbres...

Entendre tous ces bruits me rappelait que j'étais toujours là. Que j'étais toujours en vie. Parfois cela me faisait du bien. D'autre fois, c'était tout le contraire. Ça m'exaspérait. La réalité qui m'entourait me rappelait que j'étais toujours de ce monde, que j'avais eu cette chance-là. Si l'on peut appeler cela comme ça.

Je pris l'enveloppe que j'avais glissée quelques instants plus tôt dans mon sac à main, réfléchissant à la décision que je devais prendre la concernant. La vie était trop courte, je ne le savais que trop bien. Je la posai sur le banc, juste à côté de moi avant de mettre un caillou dessus afin qu'elle ne s'envole pas avec un coup de vent.

Finalement, je me levai et repris la direction de mon appartement, abandonnant la lettre.

Espérant secrètement qu'une personne, bienveillante, use de sa curiosité pour la décacheter et en lire son contenu, si intime soit-il...

I♥YOU3x1000

Wild._.Writting

Compagnons D'âmes VagabondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant