A cet instant, la Doyenne prit la parole avec ferveur. Elkan écouta, sans toutefois accorder autant de valeur que les fois précédentes aux dires de l'ancienne. Il voulut traduire, mais Keira n'en avait pas besoin et sembla comprendre intégralement le contenu de ces paroles. Elle répondit directement, avec de la force dans la voix.
– Il n'est pas question que nous restions sous votre protection, Doyenne, refusa-t-elle. Nous vous sommes infiniment reconnaissants pour ce que vous avez fait, mais votre peuple a déjà subi bien trop de maux, je ne laisserai pas d'autres Güunars souffrir par ma faute.
– Ce n'est pas votre faute, se permit d'insister Elkan, mais je partage néanmoins votre point de vue. Même si les Güunars sont prêts à donner leur vie, jusqu'à la dernière, nous n'avons ni le droit de leur demander cela, ni même intérêt à rester.
– Alors on va vraiment partir ? s'inquiéta Tristan, qui n'était plus aussi - et de loin - enthousiaste que la veille, lorsqu'il était porté par l'énergie de son sabre.
– Le fait est qu'ici, vous n'êtes plus en sécurité, déclara Elkan. Les troupes qui ont fui dans la montagne vont rassembler leurs forces et revenir. Potentiellement, d'autres pourraient revenir avec elles. On pourrait imaginer qu'il n'y en a plus d'autres, et qu'elles n'ont plus suffisamment de ressources pour attaquer, mais je ne prendrai pas ce pari. Le Dôme n'est plus en état de les repousser et comme Keira l'a fait remarquer, notre présence met les Güunars en danger.
– Que se passera-t-il si nous partons et que nous nous faisons attaquer ? dit Noa. Nous serons sans défense au milieu d'un environnement déjà hostile.
– Nous ne sommes pas tout à fait sans défense, d'après ce que j'ai pu constater... mais surtout je compte sur notre mobilité, et notre avance. Les Asharis ont subi un revers ce soir ; et auparavant, ils avaient mis plusieurs jours avant de nous retrouver. Si nous partons demain, à l'aube, ce que je propose, il leur faudra d'abord retrouver notre trace, puis nous rattraper ; et nous avons vu que la rapidité ne semble pas leur fort, au contraire de leur force de frappe. Sans compter...
Les autres l'interrogèrent du regard pour l'inciter à poursuivre.
– Si nous partons, les armées des Asharis finiront par s'en rendre compte, et nous rechercherons, nous, en laissant les Güunars vivre en paix. Ce genre de créatures ne connait ni la cruauté ni la vengeance. Seul leur objectif principal compte.
Ces dernières paroles suffirent à mettre tous les autres d'accord. Si leur départ, en plus d'assurer leur survie, garantissait la sécurité des Güunars, il n'y avait plus à hésiter.
Du moins, en théorie, car en pratique, c'était une autre aventure, bien plus périlleuse et complexe que sur le papier, ce que Tristan fit remarquer à sa manière :
– Survivrons-nous seulement dans ce désert glacial ?
– Je vous en fais la promesse. Je connais bien ces territoires. Ils ne manquent pas de danger, mais je vous protégerai et vous mènerai à bon port.
– A Mumbach, donc, dit Karim.
– C'est exact.
Un moment de flottement traversa le petit comité.
– Évidemment, toi, tu es content, dit Noa à Karim.
Le garçon secoua la tête.
– Si je ne considère pas seulement mon inquiétude, dit Karim, oui, je le reconnais, j'ai soif de découverte, et le froid me semble gérable, après la première expérience que nous en avons eu. Davantage en tout cas que la perspective d'affronter ces golems... Mais même si les arguments d'Elkan paraissent incontournables, je veux bien que nous en discutions. Quelles autres opportunités avons-nous ?
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L'Avènement de l'Astre Noir - Les Flammes Eternelles
FantasyDepuis six millénaires, le monde de Kymberlin connaît une ère de paix et de prospérité que l'on croyait pouvoir durer à tout jamais. Mais lorsque l'Astre Noir vient recouvrir Shaggan, en faisant trembler les fondations même de l'Équilibre, les rumeu...
