CHAPITRE 8

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Nous avons dégusté notre repas devant un épisode de Friends, comme hier soir. Sauf que cette fois, Gabriel était présent.

Le fait qu'il est menti pour protéger mon secret ne m'a pas assez conforté dans l'idée de l'apprécier un peu plus, même si je dois avouer que de sentir sa présence dans cette appartement suffit à me faire du bien. Je ressens pour lui le contraire de ce que je prétend. Est-ce étonnant pour quelqu'un qui ne connaît pas le véritable amour ? Ou du moins, qui ne le connais plus ?

J'ai passé ma nuit à ruminer, me demander si je ne devrais pas tout assumer devant Adam. Mais le risque est trop important. Mon cousin ferai tout ce que je ne veux pas.

Ma mère, je la déteste. Du plus profond de mon être. Je ne me rappelle plus de ce que c'est d'aimer énormément, mais je sais ce que c'est de détester quelqu'un si fort au point d'en vouloir à la Terre entière d'avoir pu mettre cette personne au monde. Mais malgré tout, ma mère, c'est tout ce qu'il me reste. Au fond, j'ai l'espoir qu'un jour elle change. Qu'elle se rende compte des atrocités que j'ai vécu par sa faute, des nuits blanches que j'ai passées à pleurer, des années de solitude que j'ai gardé, des choses dont je me suis privé pour elle. Alors, depuis que mon père est parti rejoindre les étoiles, je me suis juré que je ne dirais jamais rien sur ma mère, à qui que ce soit. Je n'arrive pas à me détacher d'elle. Même si c'est la seule façon de me sentir mieux.

Je suis trop contradictoire, encore une fois.

J'ai tout de même réussi à m'endormir, puis j'ai été réveillée par Adam qui m'a gentiment laissé me reposer jusqu'à midi. Il m'a caressé les cheveux, déposé un verre de jus d'orange sur la table basse et m'a montré ses DVD de la saga de notre enfance : Harry Potter.

Je me suis alors redressée afin de boire mon verre, puis il a lancé le premier film.

Pendant les publicités, je l'ai vu courir jusqu'au placard magique : le placard à cochonneries.

S'en ai suivi un Adam, rempli de sachets en tout genre jusqu'au cou, déposant tout ça sur le canapé, me laissant les dispatchés. Il a ensuite pris des bouteilles de Soda dans le frigo, et s'est enfin posé.

Nous en sommes actuellement au tome 4 : Harry Potter et la coupe de feu.

Les volets sont tous fermés, les lumières sont toutes éteintes, et nous, on est couchés sur le côté, à fond dans l'histoire. Ça faisait longtemps que je n'avais pas regarder un film, et là je m'en tape plusieurs d'affilés. J'avais oublié cette sensation. D'être prise dans une histoire qui n'est pas la nôtre, tout en s'imaginant ce que l'on ferai à la place des personnages.

Il nous reste environ trente minutes de film, quand la porte d'entrée s'ouvre silencieusement. L'ombre de la casquette sur la tête de l'individu qui vient de rentrer ne nous laisse aucun doute sur son identité. Il paraît calme, pour une fois. Je fais mine de ne pas l'avoir trop remarqué, mais continue de le regarder du coin de l'œil. Il s'essuie le front avant d'enlever ses baskets et de s'avancer vers nous. Directement, je détourne mes yeux pour scruter l'écran. Il s'installe à côté de moi, étant la seule place de libre dans notre sofa. Il choppe une bouteille d'eau devant lui et la boit discrètement. Qu'est-il arrivé au Gabriel bruyant et énervant ?

Pendant les dernières minutes du film, pas un mot ne sort de nos bouches. Mais c'est quand il se termine, qu'un bruit nous invite à quitter des yeux la télévision.

Gabriel sort de sa poche son paquet de cigarette, puis en brandit une en l'air. Je tourne la tête en direction d'Adam, à la recherche d'une explication, quand tout à coup, Gabriel s'élève :

- Lumos !

Et soudain, la lumière de la salle à manger s'allume. Je manque un petit rire, en remarquant son doigt s'éloigner de l'interrupteur à côté du canapé. Adam rigole à pleine bouche, lui disant qu'il lui a fait peur. Et c'est vrai qu'il nous a fait sursauter.

À la nuit tombée Où les histoires vivent. Découvrez maintenant