CHAPITRE 29

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Gabriel

Mélina me fait toujours la gueule, et ça commence sérieusement à me peser.

Ce matin, je me suis levé du bon pied. Et ce n'est pas un jeu de mot concernant ma prothèse.

Je suis obligé d'avouer que c'est grâce à Seona si je suis de bonne humeur. La nuit que nous avons passé était incroyable. Je repense encore à ses gémissements et sa silhouette parfaite. Putain, et dire qu'au collège elle ne plaisait pas du tout.

Son petit mot sur la table m'a bien fais rire : parce qu'elle croit que je regrette ce qu'il s'est passé entre nous ?

Je ne me suis jamais senti aussi heureux que depuis ce moment avec elle. Même si ma sœur ne me comprendra certainement jamais, je ne pouvais plus m'interdire quoi que ce soit avec Seona. Ça fait bien trop longtemps que je n'ai pas ressenti ce genre de sentiment envers une fille. Alors OK, j'ai peut-être pas choisi la bonne à ses yeux.
Mais je n'y peut rien. Ce n'est même pas moi qui l'ai trouvé : c'est elle.

En tout cas, j'étais déterminé ce matin à régler les choses avec Mélina. Même si elle n'approuve pas, je veux modifier le plan. C'est contre sa génitrice que nous devons nous battre, et je compte bien le lui faire comprendre.

- Laisse-lui du temps.. Me dit ma mère. Tu l'a connais, elle est rancunière.

- Pas avec moi, rappelé-je.

Ma mère se gratte le visage et hausse les sourcils. A quoi bon s'entêter à me contredire quand on a un fils compliqué ?

- Tu sais la raison de notre engueulade ? Lui demandé-je.

- Non, elle n'a rien voulu me dire.

Je suis rassurée qu'elle n'est rien avoué, même si au fond de moi j'étais persuadé qu'elle ne l'aurai pas fait. Elle a trop peur de ce que pourrai penser nos parents. Et en même temps, même si le plan de base vient de moi, elle a été la première à le préparer. Elle m'avais fait promettre de ne pas leur en parler , alors pourquoi l'aurait-elle fait ?

- Très bien, réponds-je alors.

Soudain, mon téléphone vibre. Je le consulte discrètement sous la table :

Mélina - 11h23

Viens.

Je ne perds pas cette occasion d'aller discuter avec elle, donc je me lève tranquillement sans rien dire.
Je sens les yeux de ma mère me scruter, ou du moins, fixer ma prothèse, mais je fais abstraction et pénètre dans la chambre de Mélina.

Elle est exactement dans la même position que sur mon dessin : elle est de dos dans son fauteuil, observant l'extérieur à travers sa fenêtre.

Pas besoin de lui dire quoi que ce soit, elle doit se douter du sujet que j'aimerai aborder.

- Tu peux me laisser parler en premier ? Exprimé-je en la voyant se tourner pour me faire face.

Elle a les yeux revolvers, mais elle n'est pas prête à tirer sur la gâchette. Je dois en profiter.

- Déjà, je voulais m'excuser. Je sais que ce que tu vis est pas facile, et je n'aurai pas dû gueuler sur toi.

J'attends qu'elle me réponde, mais elle lâche :

- Tu m'a dis de te laisser parler, j'attends que tu finisses.

Je souffle.

- Bon. Concernant le plan. Oui, on doit le modifier.

Je vois déjà qu'elle roule ses yeux, mais reste face à moi.

- Il ne faut pas qu'on s'attaque à Seona. Elle m'a raconté ce qu'elle a vécu et, j'ai compris que ce n'est pas à elle qu'il faut s'en prendre.

Je décide de m'asseoir sur le lit, et contempler ma sœur à travers le miroir plutôt que droit dans ses yeux.

- Elle se fait battre par sa mère, depuis toujours.

Ma sœur ne bouge même pas, ça me stresse. Mais ça ne m'empêche pas de poursuivre :

- Je ne crois pas te l'avoir dit. Mais quand je l'ai trouvé, ce n'est pas de la façon dont on voulait.

- Ce n'est pas par le biais de son cousin ? Me fait-elle bondir.

Je ne m'attendais pas à entendre le son de sa voix, beaucoup plus reposé que la dernière fois.

- Si. Mais ça ne s'est pas passé comme tu l'imaginais.

Je marque une courte pause pour l'analyser, mais je n'arrive pas à la déchiffrer.

- En fait, le soir où je suis venu nous rapporter un kebab.. C'est elle qui m'a trouvé. Elle était avec des valises, et j'ai bien compris que c'était bien la Seona qu'on cherchait. Mais elle était à la rue. Elle m'a fait de la peine, même si j'avais la haine contre elle.

- Et ?

- Et j'ai été surpris de la voir dans le salon de son cousin le lendemain. Je croyais qu'elle m'avait mâché le travail, mais c'est tout le contraire..

Je songe quelques instants, me demandant si je ne ferai pas mieux de ne pas lui confier tout ce que je sais d'elle. Je sais que Seona a souffert de son passé et qu'elle en souffre encore. Mais c'est ma sœur, je peux tout lui dire.

- Un soir j'ai surpris sa mère la frapper dans les toilettes d'un bar. Tu voulais que je fasse quoi, après ça ?

Mélina semble pensive. J'arrive même à distinguer sur sa figure qu'elle éprouve elle aussi de la compassion pour cette fille.

- Elle m'a avoué que sa mère l'avait brûlé de son plein gré, et j'imagine même pas les autres horreurs qu'elle à dû recevoir.

Je me lève, dépité par cette discussion qui me fait plus mal au cœur qu'autre chose, alors je vide mon sac.

- Elle est autant blessée que nous ! Putain. Elle porte du noir tout les jours car elle n'a toujours pas fait le deuil de son père. Elle flippe que sa mère la retrouve.. Je le vois bien qu'elle panique quand elle reçoit une notification sur son portable. Elle essaye de s'en sortir autant qu'elle le peux. Elle a peur constamment.

Je soupire.

- On ne peux pas lui faire ça.

Mélina est toujours autant préoccupée par ce que je lui déballe, mais elle m'arrête :

- Tu l'aimes ?

Je vais être honnête.

- Je crois que j'ai des sentiments pour elle, oui.

Un silence se propage dans l'atmosphère et nos cœurs battent si fort que j'arrive à les entendre se coordonner.

- Alors on va changer le plan, dit-elle.

Un sourire se dessine imperceptiblement sur mes lèvres, sans que je ne parvienne à l'en empêcher.

Il est temps que l'on se batte tous contre la bonne personne.
Marie Mariolli, prépare-toi à recevoir ton karma.

À la nuit tombée Où les histoires vivent. Découvrez maintenant