CHAPITRE 37

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Gabriel

Me retrouver ici me donne un choc à la poitrine.

J'ai voulu suivre Seona car il m'est impossible de la laisser toute seule. Si jamais elle en serait venu à pleurer, je voulais être là. Mais comme un énorme con, c'est moi qui chiale.

Les larmes sont montées toutes seules.

Le pire, c'est qu'elle ne pleure même pas. Peut-être parce qu'elle sait que son père n'est pas là dedans, et que ses cendres sont partis à la casse avec sa voiture. En tout cas, elle est forte. Je l'admire pour ça.

J'essuie mes larmes d'un revers de poignet, et du coin de l'œil je l'aperçois fixer quelque chose.

Elle le prend dans ses mains, et ce qu'elle tient ressemble à un bracelet en argent.

Une gourmette, plutôt.

Son visage reste fermé, je ne peux pas déceler ce à quoi elle pense, mais elle le contemple vivement, me donnant l'impression que cette gourmette semble l'intriguer. Pourquoi ?

Son corps se redresse doucement, puis avec sa petite main, elle tapote légèrement la pierre tombale.

Elle passe devant moi, son bras bras frôlant le mien, sans même qu'elle me regarde. Elle s'amuse à ne pas me calculer, on dirait. Elle me faisait pareil dans la voiture : dès que je l'observait, elle tournait la tête vers la vitre, se concentrant sur ses pensées. Mais là, l'atmosphère n'était pas la même : c'est elle qui a décidé de ne pas me voir.

Je la suis gentiment, apercevant que la gourmette est toujours dans sa paume.

On déambule les allées jusqu'au portail, et arrivée à ma voiture, elle se stoppe : elle est fermée à clé.

Elle m'attend, ce qui la force à enfin poser ses yeux sur moi. Je défie les siens aussi, et m'arrête à mon tour devant la portière côté conducteur.

- Ouvre, m'ordonne t-elle.

J'appuie sur ma clé pour ouvrir, et au « clic », elle rentre.

Si elle croit que je vais la laisser me faire la gueule, elle se fout le doigt dans l'œil.

- C'est quoi ? Lui demandé-je en m'asseyant à mon tour.

- Rien, répond t-elle à la seconde.

- La gourmette, la pointé-je du doigt. C'est quoi ?

- Je n'ai rien à te dire.

- Arrête Seo..

- Ah non, pardon. Je ne peux rien te dire, rectifie t-elle.

Elle répète exactement ce que j'ai dis tout à l'heure concernant le message avec sa mère.

Je soupire.

- D'accord. Je nous ramène chez nous.

Elle ne répond pas, et moi sa présence me fait mal. Je n'aurai jamais cru dire ça un jour, mais le fait qu'elle soit là me dérange. Pour la première fois, elle m'énerve.

Je comprends bien qu'elle doit être en train de se poser un milliards de questions, mais je sais profondément qu'elle ne pourra jamais deviner la raison pour laquelle je m'en prend à sa mère.

Et il ne vaux mieux pas qu'elle découvre qu'elle était ma première cible.

- Ce n'était qu'un message, craché-je.

Pas de réponse.

- Je veux juste t'aider, dis-je pour me trouver une excuse.

- M'aider ?

Je ne réponds pas.

- Tu veux m'aider ? S'approche t-elle de moi. Je n'ai pas besoin de ton aide !

Elle marque une courte pause afin de remettre sa mèche de cheveux derrière son oreille.

- 22 années que je me démerdes toute seule Gabriel. 22 années que je survis. Et quand je vie enfin, tu me fais ça ? On se connais depuis quoi, deux semaines ? Et tu veux me sauver ?

Encore une fois, aucun son ne sort de ma bouche. Car elle n'a pas tout à fait tort. Mais pas non plus tout à fait raison.

Elle constate à mes yeux que je ne dirais rien, alors elle se ravise :

- Rentrons.

Ses bras se croisent et je ne perds pas une minute pour démarrer ma voiture.

Elle a raison. Je veux être le sauveur d'une victime d'un meurtrier.

*****

Sur le parking de la résidence, elle n'a même pas attendu que la voiture s'arrête pour descendre. Elle a foncée vers l'entrée, et moi j'ai pris mon temps ; je suis presque sûr qu'elle va m'attendre devant l'ascenseur.

Je marche alors tranquillement, surtout que conduire autant de temps m'a un peu fait mal à la jambe et qu'il ne faut pas oublier que j'avais réservé à la base un vol en montgolfière qu'elle a annulé. Alors oui, je vais prendre mon temps.

Le ciel est presque gris en cette fin d'après-midi, et mes pas se font lourds.

Mon jogging me donne chaud.

En pénétrant dans la résidence, Seona m'attends devant l'ascenseur.

Qu'est ce que j'avais dis..

Nous entrons en même temps et elle appuie sur le bouton pour monter. On est face à face, chacun contre le mur, et quand je la contemple dans le miroir, je la trouve magnifique. Je suis contradictoire putain. Elle m'énerve, me fout les nerfs, me dérange, mais elle m'intrigue, me cherche, m'intéresse. Elle n'est pas juste une beauté, elle est captivante.

Ses cheveux lisses tombent sur sa poitrine, laissant mes yeux l'admirer un peu. Je n'arrive pas à croire que j'ai léché cette peau. Il faut que j'arrête de me rappeler tout ça. Elle m'en veux, bordel.

Une fois en haut, elle sort encore la première, me passe devant et rentre en trombe dans l'appartement. Je remarque qu'elle a mis le bracelet à son poignet quand elle pose sa main sur la poignée de la porte. Elle la laisse ouverte pour moi, et je m'insère à mon tour.

Adam nous attend sur le canapé, le regard furieux.

Seona se fige aussi, et là, je crois avoir compris.

- Tu va tout m'expliquer, prononce Adam, les pupilles rivés sur sa cousine. La vérité.

À la nuit tombée Où les histoires vivent. Découvrez maintenant