Chapitre 8

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Amalie LeBlanc

     J'entre dans le bâtiment d'Elegance Edge Marketing de Los Angeles alors que la personne présente au guichet d'accueil me reçoit avec un grand sourire. Lewis me remet mon badge avant d'appeler Tony Clarkson, le directeur. Il me rejoint rapidement et me souhaite chaleureusement la bienvenue. Il s'empresse de me présenter les locaux ainsi que les responsables marketing avec qui je vais être amenée à collaborer.

     Il me présente mon bureau avant de me notifier à quel point il est ravi que j'ai accepté de faire le déplacement pour m'occuper de ce dossier. Il me parle de la politique d'entreprise et de ce que cela représente pour lui. Cela implique d'être à l'écoute de nos clients et de savoir les accompagner au mieux, notamment en choisissant la personne la plus à même de répondre à leurs attentes.

     Monsieur Clarkson me présente les plus gros clients de l'antenne de Los Angeles, et m'interroge sur mes précédents dossiers. Il me dit qu'il est impressionné des résultats qui ont découlé de mon travail, notamment concernant les jeunes entreprises ayant rapidement acquis des parts de marchés. Je lui fais remarquer que je suis reconnaissante de l'opportunité qu'il m'a offerte et je lui assure que je ne le décevrai pas. Il me parle ensuite de la marque française que je vais accompagner dans son implantation aux Etats-Unis, alors qu'il m'introduit auprès d'autres membres de l'agence avec qui je serais amenée à échanger durant les mois à venir.

     Puis, le directeur me laisse regagner mon bureau afin de me laisser travailler sur quelques tâches, en attendant de m'occuper de la marque française. La fondatrice n'arrive pas avant dix jours, ce qui me laisse suffisamment de temps pour préparer le dossier. Je me plonge dans mes mails, échangeant au passage avec Adam et Olivia qui me disent je leur manque déjà, un sentiment qui est réciproque.

     Travailler sans avoir Adam qui chantonne ou Olivia qui râle toutes les cinq minutes sur un client qui lui formule des demandes impossibles n'est pas habituel, et c'est étrangement dur de me concentrer. Mes collègues ont leurs imperfections, mais c'est ce qui fait que je les apprécie tant, et que j'aime autant travailler à leurs côtés. Bien que j'ai moi aussi mes défauts. Mes amis se plaignent souvent du bruit que je fais avec mon stylo quand je le cogne à répétition sur mon bureau, ou des mes "hop" ou "tac" qui s'échappent régulièrement d'entre mes lèvres. Mais ils ne peuvent pas m'en vouloir, je suis française.

     Alors que je m'apprête à aller me chercher un thé, une voix étrangement familière résonne dans mes oreilles.

     - On ne m'avait pas menti alors, c'est bien toi.

     Je sens mes épaules se crisper et mon pouls se mettre à tambouriner à travers mon corps.

     - Je ne pensais pas te voir ici Li.

     Je sers les dents, empêchant un juron de s'échapper, ou une larme. Je ne m'attendais pas non plus à le voir à vrai dire. Ça fait plus de quatre mois que je ne l'ai pas vu. Quatre longs mois où j'ai essayé par tous les moyens de le sortir de ma tête. Je tente de me ressaisir avant de me tourner pour lui faire face et mes yeux s'arrêtent sur son visage. Il est exactement le même, excepté pour la barbe de trois jours qui orne sa mâchoire. Ses yeux sont toujours aussi bleu que l'océan, et sa peau a pris les couleurs de la Californie du Sud. Ce même regard dans lequel je pouvais me noyer durant des heures auparavant. Ces mêmes cheveux dans lesquels mes doigts avaient tant l'habitude de se promener.

     - Tu comptes rester à m'observer sans rien dire ?

     Je le jauge encore un instant avant de parvenir à rassembler des idées assez claires pour formuler une phrase.

     - Je ne m'attendais pas à te voir non plus, Joshua.

     J'appuie sur son prénom, pour lui montrer que le temps des surnoms est loin derrière nous. Il hausse un sourcil alors qu'il esquisse un sourire ; sourire que j'aurai bien arraché de son visage si j'avais pu.

     Il avait été ma dernière expérience. La personne à qui j'avais ouvert mon cœur. Et il l'a brisé.

     Je m'en suis remise. Ou du moins, je suis passée à autre chose. Mais ma poitrine s'est serrée en l'apercevant. Il a l'air de se sentir si bien, de s'en sortir si bien. Alors que moi je rame encore pour me défaire de la part qu'il a détruit en moi. Je n'avais pas voulu le laisser briser cette partie de moi, celle qui croyait désespérément en l'amour.

     Mais comment agir face à la personne avec qui je me suis fiancée il y a à peine dix mois et qui a disparu de ma vie aussi vite qu'elle est entrée ?

     Je me reprends en sachant que je suis bien plus forte que ça. Je ne vais certainement pas le laisser entrevoir ce qu'il m'a fait traverser ces derniers mois.

     - Tu peux venir avec quelqu'un. À moins que tu sois seule ?

     - Quoi ? Non !

     Je réponds automatiquement alors que je n'ai pas prêté attention à ses paroles.

     - Oh, je ne pensais pas que tu avais quelqu'un. Je te note sur la liste avec un plus un alors. Je t'envoie par mail les informations, ça sera l'occasion de rattraper le temps passé depuis mon départ de New York.

     Je n'ai aucune idée de ce que je viens d'accepter, et encore moins pourquoi je lui ai dit que je n'étais pas seule. Une part de vérité émane de ma réponse, je suis bien entourée par mes amis, et par mes parents malgré la distance. Mais je n'ai pas eu de rendez-vous depuis notre séparation. Je n'en avais même pas eu l'envie. Je pense au moment où Olivia et Adam apprendront que je me retrouve à travailler avec Josh. Ils n'en reviendront pas.

     Ce dernier a tourné les talons et a regagné son bureau depuis plusieurs minutes. Le mail qu'il vient de m'envoyer retient mon attention. Une soirée de lancement pour une des marques représentées par Elegance Edge demain soir. C'est ce que j'ai accepté, et accompagnée qui plus est. Ça me laisse peu de temps pour trouver quelqu'un. Je m'enfonce dans ma chaise à la recherche d'une solution. Il est hors de question que j'avoue à Josh que je suis seule alors que je lui ai laissé entendre que ce n'est pas le cas. Après quelques minutes de réflexion, une idée me traverse l'esprit. Une idée qui pourrait marcher. Je m'empresse d'attraper mon téléphone et de parcourir mes contacts à la recherche de ma solution.

Tu sautes, je sauteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant