Chapitre 51

254 14 3
                                    

Thomas Anderson

     Ça fait une semaine que je n'ai aucune nouvelle d'Amalie. Elle ne m'a pas rappelé. Je ne sais même pas si elle a écouté mon message. Ce qui me terrifie plus que le fait qu'elle ne l'ait pas écouté, c'est qu'elle l'ait écouté mais n'ait pas envie de me rappeler.

     Peut-être qu'elle ne m'aime pas autant que je l'aime. Peut-être qu'elle est trop blessée pour réussir à nous donner une chance. Je n'ai pas eu la force d'insister et de la rappeler. Mon meilleur ami est passé me voir tous les jours en sortant du travail pour s'assurer que j'étais toujours en vie, et Aaron et Jordan m'appellent de temps en temps pour savoir si j'ai envie de sortir ou besoin de parler. Je les remercie d'être aussi présents, mais pour l'instant tout ce dont j'ai besoin, c'est de mon canapé et de Titanic. Je suis ridicule, je sais. D'autant plus que le film est moins intéressant sans les commentaires d'Amalie.

     Je n'arrive pas à me la sortir de la tête et je risque de devenir fou. Tout me fait penser à elle. C'est donc ça le fameux chagrin d'amour ? Quelle horreur ! Je préférerais qu'on m'arrache tout de suite le cœur, qu'on en finisse. Ma sœur a bien essayé de me remonter le moral, mais elle a vite perdu espoir en voyant dans quel état j'étais. Je n'ai pas trouvé l'énergie de retourner travailler, et Eliott gère comme un chef à ma place. Il est bien plus impliqué dans l'entreprise que moi. Je me demande encore pourquoi mon père insiste autant pour que je dirige Pacific Wine Co alors que mon meilleur pote le mérite bien plus que moi, d'autant plus que je n'ai pas envie de diriger cette entreprise. Amalie saurait sûrement quoi dire pour m'aider à y voir plus clair, mais il semblerait que je doive réussir à me débrouiller sans elle.

     On sonne à ma porte alors que je n'ai pas l'énergie de me lever pour aller ouvrir.

     - Eliott casse toi, j'ai pas envie de te voir, je lance alors que mes paroles résonnent dans mon appartement.

     La sonnerie insiste. Je me lève, non sans râler, et traîne des pieds jusqu'à la porte. Eliott je jure que je vais...

     Je m'arrête net après avoir ouvert la porte. Je cligne plusieurs fois des yeux pour être sûr que ce n'est pas le fruit de mon imagination. Elle est là. C'est elle. La petite tête brune qui me rend dingue depuis des mois.

     - Salut, elle me lance.

     La confiance qui se lisait sur son visage au moment où j'ai ouvert s'est un peu estompée. Je suis encore décontenancé de la voir ici. Je l'invite à entrer d'un geste de la main. Je suis bien trop sous le choc pour réussir à sortir un mot.

     - Tu regardais Titanic ?, elle dit en entrant dans le salon.

     Face à mon silence, elle se tourne vers moi et m'observe un instant. Elle prend une grande inspiration.

     - Je ne t'ai pas répondu.

     Mes sourcils se froncent alors qu'elle poursuit.

     - Tout était réel. Je n'ai jamais fait semblant Thomas. Et j'étais pétrifiée à l'idée de l'admettre. Mais je ne peux plus le nier maintenant. Je ne veux plus que ce soit "pour de faux". Je ne veux plus jouer un rôle. Je ne veux plus prétendre. Je veux que ce soit vraiment réel cette fois.

     Une larme dévale sa joue.

     - Je t'aime Thomas. Je t'aime bien plus que je ne le voudrais. Je t'aime depuis le lycée. Ça ne m'a jamais quitté. C'était toujours là. Ça a toujours été là. Et quand je t'ai recroisé au centre commercial, j'ai cru que mon cœur allait sortir de ma poitrine. Et ça me terrorise. Parce que ça veut dire te laisser la possibilité de me briser le cœur. Mais je suis prête à prendre ce risque. J'irai jusqu'au bout du monde avec toi. J'ai trouvé mon chez moi. Je me sens chez moi quand je suis avec toi. Et je ne veux plus jamais être loin de toi.

     Ma vue se trouble alors que je chasse mes larmes en fermant les yeux. Mon rythme cardiaque a triplé en l'espace de quelques secondes. Amalie fait un pas vers moi avant d'ajouter.

     - Tu sautes, je saute. Pas vrai ?

     Je ne perds pas un instant et réduis l'espace qui nous sépare. Je suis tellement près d'elle que j'entendrais presque les battements de son cœur. Elle semble chercher une réponse dans mes yeux alors que je fais glisser mes doigts sur ses joues pour essuyer ses larmes.

     - Promets moi de ne jamais abandonner, de ne plus jamais douter de nous, je lui souffle.

     - Je te le promets.

     Je lui souris. J'ai enfin trouvé la paix. Je n'ai jamais ressenti ça avant. Tout ce que je ressens pour elle, c'est tellement fort. Je me demande comment mon cœur n'éclate pas.

     - Je t'aime, Amalie LeBlanc, je murmure contre ses lèvres.

     - Je t'aime aussi, Thomas Anderson.

     Je dépose mes lèvres sur les siennes. J'en rêve depuis tellement longtemps que ça me parait irréel. Mais tout est réel cette fois. Plus aucune retenue. Personne ne fait semblant. C'est juste elle et moi.

     Notre premier baiser est salé par nos larmes, mais il est doux et passionné. J'ai attendu tellement de temps que je ne veux plus perdre une seconde. Maintenant, c'est elle et moi, jusqu'au bout du monde.

Tu sautes, je sauteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant