Chapitre 15

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James.

Maxwell tape sur mon épaule et me fait signe de monter dans la voiturette blanche. Enfin ça ressemble plus à un petit 4x4 qu'à une voiturette traditionnelle avec ses néons bleus et violets et ses sièges en cuir blanc.

Lucy sort de la villa, lunettes de soleil sur le nez et sac en toile rempli de livres, suivi de ma fille qui saute dans mes bras. Je la soulève, m'installe dans le véhicule et prend Harper sur mes genoux. Lucy amorce un pas vers nous mais Jensen passe son bras sur son épaule.

— Je te fais monter dans mon carrosse, cendrillon ?

Elle sourit timidement, le repousse avec douceur et se tourne vers moi. J'ouvre la bouche prêt à lui ordonner de poser ses fesses à l'arrière, mais la femme de Maxwell et son fils, débarquent de nul part et s'installent dans mon dos.

— Est-ce que c'est bon pour vous monsieur Greyson ? s'enquiert-elle en jetant un œil aux passagers clandestins.

— Ai-je le choix ?

— Oui, je peux prendre Harper avec moi.

Ah non !

— Hors de question je n'ai pas confiance en la conduite de Jensen, largué-je agacé.

— Je fais toutes mes cascades gars, tu n'as aucun soucis à te faire, renchérit l'idiot de première.

Putain, je déteste ce mec.

— Ouais ben justem...

Je n'ai pas le temps de finir ma phrase que Lucy écarquille ses yeux de surprise.

— C'est vous qui faites toutes vos cascades ?

— Impressionnée ma belle ?

— C'est le cas.

Je rêve où elle le drague ?

Je fulmine parce que mademoiselle se croit en speed dating alors que, de base, elle n'est ici que pour s'occuper de ma fille. Je vais devoir rapidement lui rappeler son rôle.

Jensen fait monter la brune dans son véhicule déjà occupé par deux amis de Maxwell : Howard Pensil et Prescott Corrigan, deux importants investisseurs dans le projet dont nous allons parler demain.

Enfin arrivés sur le terrain, Lucy attrape le sac et vient à notre rencontre. Sans un regard vers moi, elle saisit la main d'Harper et l'amène un peu plus loin, sortant quelques livres que nous avons ramené.

La partie débute après un échauffement et quelques conseils prodigués par le producteur. Le maître des lieux commence et au lieu de regarder sa frappe, je scrute les filles, assisent dans l'herbe, le vent qui fait valser leurs mèches, un livre dans les mains. Lucy rit aux éclats tandis que ma petite blonde se lance dans une interprétation bancale de la vache qui ... vomi. Enfin, ça ressemble à ça de loin.

— Elle est vraiment sexy la Nanny.

Une voix grave me parvient – Jensen – et sans réfléchir je confirme d'un hochement de tête, mais me ressaisis aussitôt.

— Hein, quoi ? Tu parles de qui ?

Je tente de feindre l'ignorance, mais si je n'ai pas choisi la carrière d'acteur, c'est qu'il y a une bonne raison : mon jeu est misérable.

— La nourrice, elle est jolie, répète-t-il.

— Ah! Je ne sais pas, j'ai pas remarqué.

Ma réponse est un mensonge éhonté et l'autre mec sourit comme un con, parce qu'il semble l'avoir compris.

— Ecoute mec ... Lucy me plaît énormément, mais si c'est chasse gardée, je respecte, ajoute-t-il narquoisement.

— Non, dis-je sèchement.

Rien d'autre ne dépasse la limite de mes lèvres. Alors il tourne son visage vers la nounou et tape mon épaule.

— Donc, je peux tenter ma chance ?

Hors. De. Question.

— C'est toujours, non.

Je me retourne, prêt à rejoindre le groupe et fuir absolument cette conversation non consentie.

— J'vois bien qu'elle te plaît. C'est quoi, l'égo qui parle parce qu'elle est nounou ?

— Tu ne sais rien de moi, OK ? Alors ferme-la.

— Si, m'apprend-il d'un ton désinvolte. Tu as perdu ta femme il y a deux ans et ton père l'année dernière. Ta femme ne reviendra pas, donc il n'y a aucun mal à ...

Je lui attrape le col. Au loin, tous les regards se tournent vers nous, Lucy se lève d'un bond.

— Arrête ça. Tout . De. Suite, Jensen. On ne se connaît pas.

— J'ai saisi, pas besoin d'en venir aux mains. La nounou n'est pas à toi, mais personne n'a le droit de la toucher. J'ai capté, c'est OK.

Je le relâche, reprends convenance en tirant sur mon tee-shirt.

— C'est bon, tout va bien. Petit mal entendu déjà réglé, crie le brun en époussetant son vêtement.

Alors que tous les autres ont déjà repris le cours de la partie, j'ose lever la tête dans la direction de Lucy ; elle me fixe. Mais rapidement, elle détourne les yeux.

— James, c'est à toi.

J'aligne ma prise, vérifie la posture que l'on m'a apprise il y a quelques minutes et laisse mon regard s'ancrer sur la petite balle blanche. Les murmures de la brise, le pépiement des oiseaux, tout devient un doux murmure de fond tandis que je me prépare pour mon swing. Mes muscles se tendent quand je frappe. Mon club coupe l'air, envoyant la balle en un arc parfait, laissant un sifflement dans son sillage. Elle vole gracieusement dans le ciel azur et rebondit à l'atterrissage sur le fairway à proximité du green. Jensen se place à côté de moi, place sa main sur son front pour s'offrir un peu d'ombre et m'accorde un clin d'œil amical.

— Pas mal le tire, mon pote !

Je ne suis pas... Et puis merde.

— Tu n'avais pas le droit de te louper, elle t'a regardé avec attention.

Je détourne les yeux de l'acteur et trouve rapidement ceux de la nounou qui applaudit discrètement pour me féliciter. C'est un geste simple, mais il me touche d'une manière inattendue. Depuis longtemps – trop longtemps – , je n'avais plus ressenti une telle attention, un tel soutien. Je lui adresse un sourire de remerciement, reconnaissant pour sa gentillesse et son soutien silencieux. Lucy n'est entrée que récemment dans ma vie, mais déjà, je sens qu'elle apporte une touche différente à notre routine bien rodée. Les autres nounous, bien qu'attentionnées et hautement qualifiées, semblaient toutes manquer de cette petite étincelle, ce petit quelque chose qui me permet de voir la vie sous un jour plus positif.

Lucy possède cette capacité à rire, à sourire facilement, à partager sa bonne humeur. Elle a un tempérament de feu, une répartie vive, un côté rebelle. Elle ressemble étonnamment à Céleste, ma femme défunte. Céleste était douce, aimante, toujours prête à sacrifier son bien-être pour celui des autres, mais elle n'avait pas la langue dans sa poche. Lorsqu'elle riait, tout le village pouvait l'entendre. Je croyais que je détestais ça, mais en fait, je réalise aujourd'hui que ça me manque. Et Lucy est... Lucy, et elle fait renaître des souvenirs du passé, des instants partagés avec ma femme, les transformant en une source de réconfort plutôt qu'en une douleur lancinante.

 Lucy, et elle fait renaître des souvenirs du passé, des instants partagés avec ma femme, les transformant en une source de réconfort plutôt qu'en une douleur lancinante

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