23. Deux verts vrais

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Allo, Allo les gens.
Quelqu'un était au courant que la terre n'était pas vraiment ronde ? Il faut vraiment que ces foutus scientifiques s'entendent sur quelque chose. Je suis entrain de penser que toute ma vie était un gros mensonge !
Fuck. Et dans quelques années on va nous annoncer que nous sommes des porcs épics... Ok là... j'ai soudainement envie de me lancer dans la science aussi pour qu'on soit fixés pour de bon.
Rendez-vous bientôt pour l'annonce de mes découvertes. Restez sur la ligne !
Lol !

Votre déesse de l'illusion.



— Euh... je ne pensais pas que quand tu disais que tu voulais manger mexicain, tu parlais de ça !
— Bah quoi ? bredouille-t-il la bouche pleine. Tu es sensée aimer.
— Je viens du Mexique, mais je ne suis pas d'origine mexicaine !
— Je ne vois pas la différence. Hmm ! Grande cielo, c'est vraiment piquant.

Je ris doucement et le fixe broyer son burrito avant de faire pareil, remarquant les regards sur nous.

— Tu penses que les hommes de ton père empêcheront les gens de publier qu'on t'a vu accompagné ?
— Il serait près même à dépiécer une montagne pour que ça ne fuite pas. Je me demande s'il n'y a pas autre chose qui le fait flipper.
— C'est dingue l'énergie qu'il peut mettre à vouloir te protéger. Il a l'air de t'adorer.
— Peut-être.
— Hmm... Je présume qu'en te déballant toutes ces choses sur moi tu as dû lui rire au nez, vu tout ce que tu sais.
— Non, j'ai été surpris.
— Pourquoi ? je me fige alors que nous sommes dans les ascenseurs.
— Gang de motards, délits mineurs, vol à l'étalage... je pensais qu'Abby n'était qu'une personnalité. Pas une vraie personne.
— C'est mon vrai nom. J'ai juste embelli la situation.

Il me regarde un sourcil levé en enfonçant les restes dans sa gueule. J'ouvre grand les yeux, sortant la clé quand nous sommes devant mon appartement.
Déjà plus d'une semaine, et il ne m'a toujours pas touché. Je commence à le croire quand il me dit qu'il aime ma compagnie. Mais moi...

Je ne peux pas continuer à le regarder faire... bien sûr, je n'espère pas un orgasme, mais tout de même ! J'ai le droit de profiter de lui avant que ces deux mois ne passent. Et en y pensant.

— Tiens.

Surprise, je saisis la bière entre ses doigts et me dirige vers les canapés avant de m'asseoir sur le bras.

— Quelque chose te tracasse ?
— Tu penses que ton père est capable de faire du mal à mon amie ?
— Luciano l'en empêchera.
— Ce n'est pas que j'en doute, mais... Hier, elle avait besoin de prendre d'air et est allée au Beethoven avec Pam. Ce matin, ses parents ont appelé parce qu'elle n'a pas dormi chez elle.
— Ce n'est pas une gamine.
— Elle n'a pas dormi chez Pamela non plus. C'est Pam qui me l'a dit. Et elle ne répond pas au téléphone.
— S'il y a un problème, mes frères sont des hommes de confiance ! assure-t-il en tombant dans son siège préféré.
— Hey ! je me relève en sursaut. Il me semble que c'est demain ton anniversaire.

Il soupire agacé et tire la capuche sur sa tête alors que gloussant, j'engloutis ma bière.

— Tu croyais vraiment que j'allais passer à côté. Ça jazze sur les réseaux.
— Sans doute, marmonne-t-il alors que je découvre son visage d'un coup fade.
— Et je présume que comme chaque année, ils t'organiseront une fête surprise qui n'est plus vraiment surprise. Ta sœur est rentrée il y a quelques jours, alors la famille au complet autour de toi, avec tes parents adorables et tes frères préf... José ?

Je me fige quand je remarque ses mains tremblantes tenant fermement les bras du siège, sa mâchoire serrée et son regard émietté.
Merde.
Il nous fait quoi là ?

— José ? Ça va ?

Je me penche en avant pour le toucher mais il rejette ma main avec violence en se levant, faisant au passage tomber sa bière sur le guéridon dont l'atterrissage se retrouve être amorti par la moquette.

Virevoltante, je me lève et me garde de me précipiter vers lui qui frémit de tout son être en rageant, s'embrouillant la crinière en mille pas dans ma chambre. Il finit par frapper contre le mur et y reste alors que sa respiration se montre de plus en plus instable.

— José, je murmure sans savoir quoi faire.

Il se contente de se débarrasser le plus vite possible de son sweat qu'il laisse tomber sur le sol. Je me rapproche de lui et me glisse face au mur, lui tenant fermement le visage.

— José... José, du calme. Calme-toi ! je susurre.

Les yeux figés dans les miens, ses paumes enflammant le mur, il déglutit lourdement pendant que du regard, je l'encourage à reprendre son calme.
Peu à peu.
Il s'apaise.
Il ferme les yeux.
Quelque chose me serre le cœur alors que je lui tiens ainsi la tête. Il finit par laisser son front descendre sur le mien.

Je soupire et ferme les yeux, comme s'il me communiquait cette sensation exquise que je ne comprends pas. J'ai l'impression de sentir une intensité apaisante et plaisante.

C'est trop agréable pour être bon pour moi.
Beaucoup trop, Abigail.
Je voudrais m'éloigner, quoique, tout ce que j'arrive à faire, c'est délaisser son visage. Mes doigts glissent sur son débardeur blanc, la chaleur de son corps commence déjà à m'envahir.

Une sensation lointaine m'épie comme le lion guette l'antilope. Mon cœur tambourine de plus en plus fort. Je peux ressentir, cet étrange émoi, exactement comme cette fois-là. Comme si j'avais eu le droit de le tenir dans mes bras, le bébé qui m'a fait souffrir, le résultat et la preuve palpable de mon malheur, l'enfant dont je n'ai pas pu voir le visage, ça repasse en boucle.
Encore et encore...

— Merci.

La voix de José me ramène à moi. J'ouvre les yeux alors qu'il décolle doucement nos têtes. Je me maudis pour m'être laissé emporter.
Je me maudis pour ce que je viens de ressentir, cette douleur que j'ai enterrée et qui, déterrée, va me faire voir de toutes les couleurs avant de retourner aux enfers.

La tension semble très tendue pour moi. Toutefois, pour José, elle doit déjà être détendue. Il se décale sur le côté et saisit son sweat, puis s'installe par terre et renverse sa tête contre le mur, paupière closes.

Je l'observe.

Il doit se détester d'avoir laissé cette faiblesse faire surface. Mais il n'a pas l'air. Il semble... libéré.

C'est un visage d'ange, oui. Un très bel homme tant à l'intérieur qu'à l'extérieur. J'avais peut-être eu tort de l'avoir jugé sans même le connaitre. Il n'a pourtant rien d'orgueilleux et d'arrogant comme le verrait qui n'en n'est pas proche.

Je glisse sur le béton et tourne la tête vers lui, un peu compatissante. C'est du Abby tout craché.

— Je ne savais pas que tu avais des crises de paniques.

Il rit et je lève le sourcil. Découvrant ses yeux il les repose sur moi qui me sens tout d'un coup mise à nu.

— Tu dois trouver ça jouissif.
— Malheureusement, non. Juste... surprenant.

Il ne dit rien et hausse l'épaule.

— Tu aurais pu me dire que ta famille est un sujet sensible.
— Elle ne l'avait jamais été.

Nous nous regardons et il sourit d'une ironie frappante et fixant le vide, les bras reposant sur ses longues jambes repliées.

— En fin de compte, c'est toi qui avait raison.

Sa déclaration me frappe de plein fouet et j'attends impatiemment les détails.

— Je suis trop naïf, trop idiot et facile à manipuler. Je suis juste le gentil qui n'a aucun respect pour lui-même, et qui à la longue, ne vaut rien au fond.
— C'est débile ce que tu racontes.
— Tu vois ? s'esclaffe-t-il c'est ce que je disais.
— José, c'est ce que tu es... parce que tu as décidé de l'être. Tu ne peux pas être comme tout le monde, tu sais. Je ne sais pour quelle raison, tu as pris cette décision, mais tu t'en sors très bien.
— Je ne pense pas.
— Moi si. Je le pense au point de t'envier, ta joie de vivre, ton honnêteté. Tu es en paix avec toi-même et avec les autres. Tu veux faire les choses comme il faut et tu m'as toi-même dit que ce n'est pas de la faiblesse. C'est ta plus grande force ! je murmure perdant le fil de ma voix.

Je sens son regard sur moi et me racle la gorge, chassant ce qui essaie de prendre le dessus. Je relève la tête et d'un sourire croise ses verts.

— Tu as une force surhumaine à dompter ton côté obscur, moi je n'y suis jamais arrivé. Dans toutes mes vies, il y a toujours cette partie noire qui fait l'équilibre. Abigail a beau être mon meilleur camouflage, avec tout ce qu'elle représente, ça ne change rien au fait que c'est aussi une salope. Mais toi... tu ne joues même pas et dans cette vie-là, tu...
— Tu te trompes Abby, murmure-t-il la tête renversée et les yeux au plafond.
— Non.
— Crois-moi. Tu te trompes. Et j'ai peur... de ce que je pourrais faire.

Il marque une pause. Je ne l'ai jamais vu dans cet état. Je doute avoir une seule fois pensé qu'il pouvait se sentir ainsi, lui aussi... un état que je hais du plus profond de moi. Un état que seule Cookie pouvait gérer, c'était la raison même de son existence.

— Rien que d'y penser, je suis envahi par toutes ces énergies négatives que je n'arrive plus à repousser. Depuis ce que Peepa m'a fait. Tout a changé. J'ai l'impression d'être de plus en plus parano. Comme si depuis le tout début, je suis au milieu de cette famille comme un clown que personne ne prendra jamais au sérieux, que tout le monde se permet de piétiner... parce que je ne me suis pas endurci.

Je décolle les lèvres alors qu'il me scrute. Mais rien n'en sort. Je ne sais pas quoi lui dire. Ça n'a plus l'air d'un rôle. C'est réel... il se laisse ressentir toute ces choses, il ne les fuit pas...

— Rien que d'en parler, j'en frémis.

Ses yeux sont embués mais il sourit sans verser une larme.

— C'est étonnant. Je n'ai jamais rien trouvé à redire à ma vie de rêve et du jour au lendemain, tout s'écroule et c'est comme si le voile était enfin tombé.

Cette phrase me rappelle durement quelque chose. Comment un seul événement peut changer le cours d'une existence ? Comment une seule pièce transforme l'aspect de la machine ? C'est flippant.

— Rien n'est jamais toujours si rose.
— Et si noir, n'est-ce pas ?
— Sans doute.
— Mais je ne pourrais pas survivre si réellement je dois me retrouver avec tout le monde. Et je ne peux pas m'en aller, parce qu'ils font tout ça pour moi. Je n'ai jamais douté d'eux, mais ça me ronge que je ne suis plus que ça. Le garçon parfait de la famille.
— Pourtant, tu sais... personne n'es parfait.
— Je me sentais parfait, en tout cas ! il rit.

Je plisse des lèvres, surprise par ses sentiments qui forcent la porte et giclent. Nous faisons silence. Un très lourd silence. Je déglutis en pensant à ce que je vais dire, me convainquant vainement que je n'ai rien à y gagner...

— Si tu veux... je pourrais te tenir compagnie, je murmure alors qu'il se tourne peu brusquement. Pour que tu ne sentes pas la pression. Je pourrais faire en sorte de détourner l'attention sur moi. Tu pourrais voir ça comme un cadeau d'anniversaire.
— Tu le ferais ?
— Je pourrais au moins essayer.
— Pourquoi tu ferais une telle chose pour moi ?
— Bah...

Oui pourquoi Abby ?

— Vois ça comme un cadeau... Et on ne se verra plus après que moins de deux mois se sera écoulé.
— Je vais te manquer ? demande-t-il d'un sourire en retournant au plafond.
— Bien sûr que non, tu te fais des films.
— Menteuse ! murmure-t-il.
— Je m'en bats les ovaires que tu ne me crois pas, mais je te le dis, tu ne vas pas du tout me manquer.
— Si tu le dis. Mais... toi, tu vas beaucoup me manquer ! admet-il en baissant ses grands verts éteints sur mon visage.

Une explosion marque ma poitrine, c'est une chaleur qui monte dans ma gorge. Un goût de mutisme paralysant. Ses yeux me frigorifient... je redoute ça... je hais ça...
Mais j'aime ça.

Cette solitude sans nom m'a rejoint jusque dans mon sommeil. J'étais pourtant persuadée de m'en être débarrassé pour de bon avant de m'en dormir. Mais je peux la sentir qui m'étrangle.

J'ouvre les yeux sans difficulté.

Ma vision limpide me fait voir José encore devant la façade rideau, en boxer, dévisageant Los Angeles.
Je me lève, le pas léger.
Je m'approche lentement, jusqu'à être si près de lui levant la main dans sa chevelure pour l'effrayer.
Fiou.
Placardé à la façade, morte d'effarement et les poignets pris au piège dans les mains de José qui sourit soudain les yeux brillants. Mon cœur qui bat si fort s'apaise et je soupire en roulant des iris, médusée et dégoutée que ça me retombe dessus. Je ramène ma jambe allongée qu'il avait réussi à accrocher pour me prendre par surprise.

— Allez ! Fais au moins semblant être terrifiée ! grogne-t-il séducteur.
— Comment t'as fait ? je questionne vague et désabusée.
— J'ai le flair. C'est ma chambre, je sais quand la tension change.
— Super ! Je sens qu'on n'en a pas fini avec les nouveautés.
— Tu penses ?

Il me regarde et de plus en plus, son sourire disparait pour laisser place à cette chose qui nous consume tous les deux, cette chose qui a gagné en puissance. Il se penche sur moi. Je déglutis, attirée à lui comme un aimant, malgré mes mains emprisonnées par les siennes.
Ma poitrine va et vient, je le veux.

Il est de plus en plus près, je sens toute la chaleur que laisse passer ses narines, le désir intense qui quitte la fente de sa bouche entrouverte pour moi.
Il vient... plus près... à moi...

Une musique sordide nous tire de l'extase et José se retourne subitement tandis que je râle.

— Excuse-moi, je dois voir qui m'appelle à une heure pareille.

Il se précipite vers la table de nuit et soupire fortement comme s'il allait tout détruire.

— Il y a un problème ?
— Les jumeaux... il est déjà 00h... tu vois un peu de quoi je parle.
— Oh... je murmure.

Ils ont bien choisi leur moment ces idiots.
Je le contemple qui positionne l'appareil en face de son visage et prend tout d'un coup cet air radieux.

— Quelqu'un s'est rappelé de moi ?!

Les voix forte et engouées hurlent de toute force et font sourire José. Cette fois-ci c'est de bon cœur.

— Bordel Jo !! Que fais-tu dans le noir ?

Il fait une grimace dans ma direction et alors que je comprends, je me dépêche de toucher l'interrupteur. Il se dirige vers le mur et moi, vers le lit. Il a l'air subitement si heureux que j'en serais presque jalouse.

— Ça fait quoi de vieillir, petit !
— Il doit avoir déjà un poil blanc qui traine quelque part au niveau de son anus.
— Vous savez quoi ? réplique-t-il dégouté alors que j'en ris, muette. Allez-vous faire foutre !
— Dans le cul de ta mère oui !
— Pas ma mère, les gars.
— J'opterai bien pour la nôtre ! Pas vrai frérot ? marmonne-t-il.
— Je ne suis pas fan de calvitie moi ! grogne l'autre.
— Vous n'êtes que de sales cons ! ricane José au bord des larmes.
— Bon sang, j'espère que tu vas t'amuser, mec ! Avant la quarantaine, putain !
— Avant de finir tout ramolli et fou comme Ro' ! Si tu veux mon avis, maintenant que tu n'es plus en chaines, RIP relation de merde, tu devrais t'y mettre à fond.
— Ah oui ? grogne José.
— Je veux dire, pas de limite. Une soumise, une conquise, une serpillère, une pute, une prostituée... la totale quoi ? Tu devrais assouvir tous tes fantasmes avant la fin de ses 24 heures.
— Tu as vu la tête de cet imbécile. S'il commençait seulement à citer ses fantasmes, on y passerait la semaine.
— Vous prenez déjà des années à réaliser les vôtres. Mon cas n'est pas assez pitoyable.
— Touché !
— Franchement ne me dis pas déjà que tu es seul dans le lit !!

Le silence de José me surprend et j'hésite à me retourner sur la couche. Personnellement, je ne fais pas exprès de suivre sa conversation, mais elle est assez haute. Du coup...

— José ! Ici la terre. Si tu es seul frérot, tu déshonores ta famille.
— Oh ! Tu le connais, même si ce n'est que trois gamines, elles doivent être morte d'orgasme dans ton lit. N'est-ce pas José ?
— Euh... Pas vraiment.
— Pourquoi est-ce que tu te tiens au niveau du rideau ?
— Hey ! Tournes-toi qu'on admire toute la puissance de ta virilité.

Je me retourne avec rapidité dans le lit et écarquille les yeux en voyant le sourire mesquin que me lance José. Je secoue la tête que je sens grossir presque comme le globe terrestre.

— Elle ne veut pas que je la montre.
— E.L.L.E... sans S ? Une seule !?
— Hey dis, grogne le second d'une voix très basse qui n'est pas si basse finalement. J'espère que ce n'est pas la gonzesse de la party family.
— De qui est-ce que tu parles ? demande José étonné alors que lui et moi échangeons un regard.
— Je suis tombé par hasard sur le compte de la nouvelle conquête de Vivio.
— Après avoir tapé un hashtag party familly, hastag Delvaro.
— Non mais quel connard ! De toute façon... il faudrait vraiment que tu zappe cette meuf... putain ça a l'air aussi dangereux qu'un dinosaure géant.
— Le dinosaure a des oreilles tranchantes et c'est un carnivore !! je marmonne à voix haute tandis que José s'étouffe de rire et vient glisser dans le lit.
— Oups !
— Hey, dino chérie, tu brilles comme la lune dans le noir !

Je lève la partie gauche de ma lèvre supérieure alors que José a réussi à s'infiltrer sous mon menton dans les draps.

— C'est la flatterie la plus conne que j'aie jamais entendu... le pire c'est que je suis noire.
— Oh ! marmonne l'une des gouttes désabusées. C'est cliché, mademoiselle. Vous utilisez thou art, nous utilisons neega. C'est juste du troc.
— Ce n'est pas du tout équilibré quand on part du principe que l'un sort totalement du contexte, je grogne remarquant qu'ils marchent en plein hiver dans une rue déserte.
— C'est une question d'emprunt. Pourquoi n'avons-nous pas le droit d'utiliser votre style de langage alors que vous empruntez le nôtre ? Pourquoi un blanc qui appelle un noir, nez-gros... devrait être vu comme un raciste alors qu'entre eux les frères black le font.
— Parce que ce sont des frères, mec ! Et aussi parce que les blancs ne sont rien d'autres que des trou duc' qui se cachent derrière la ruse pour affirmer à quel point ils ont horreur de la peau noire.
— C'est...

Le hurlement de José et de l'autre frère muet depuis tout à l'heure nous enfonce dans un rire sans frontière. Je me tords en renversant la tête et José grognonne énergétiquement.

— Vous n'allez quand même pas transformer mes souhaits de nouvel an en débat interracial !
— Ce n'est pas de ma faute si ta girl est tombée sous mon charme.
— Cela m'étonnerait. A l'instant, elle se retient juste de t'étriper même à travers le téléphone.

Les jumeaux explosent de rire, moqueurs et je me relève, d'un regard sérieux.

— Vous doutez ? je murmure avec l'air d'une prédatrice.
— Ce n'est pas raciste de faire passer les blacks pour des sorciers ?
— Qui t'as dit que je n'étais que Black ? Je viens d'une région africaine qu'il il ne faut pas vraiment sous-estimer.
— Ah oui ! Laquelle.
— Bénin.
— Je ne connais pas.
— Je cherche ! grogne le second.

José tourne la tête mais je garde au plus profond de moi cette envie de partir en hilarité. Peu à peu le regard de celui qui faisait la recherche change et il tire sur le vêtement de l'autre. Ils se tournent ensuite vers moi et j'évite de sourire.

— Vraiment ? demande la grande gueule qui tient la caméra.
— Une preuve ?
— On va s'en passer ! réagit vivement l'autre. Bon euh... Jo ! On a été très ravis de te revoir ! A toute ! Salut dino ! Enfin... toi quoi !

L'appel se coupe et j'implose alors que José me dévisage.

— Qu'est-ce que tu leur a dit ?
— Rien. Juste que je viens du pays le plus tranchant en sorcellerie du monde... Enfin, d'après Google.

Je me retourne, gloussant secrètement à cause de sa pâleur soudaine.

— Et, ce n'est pas vrai... n'est-ce pas ?
— Quoi tu n'as pas lu mon dossier ? C'est possible !
— Han ! fait-il en riant comme un vrai peureux.

Je me retiens aux larmes sous les draps, impossible à calmer. Putain, ce qu'ils sont tous cons !

#2.THRUTHOù les histoires vivent. Découvrez maintenant