25. Le coup de grâce

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Les monstres, ils existent.
Je n’ai pas encore de preuve, mais je vais finir par vous démontrer par a+b que le diable est réel.
L’enfer aussi. Et par malheur, ça commence ici sur terre.
Vivez bien. Ne regrettez rien.

Votre déesse de l’illusion


Le monde s’écroule autour de moi. Le sol se dérobe à mes pieds.

Dès que j’ouvre la porte, je me rue vers ma chambre. Le visage mouillé, le corps engourdi et les mains tremblantes, je pousse de toutes mes forces le faux miroir placardé contre le mur. La pièce sombre m’accueille d’une chaleur écrasante.

Hoquets, bouleversement. Mon cœur gonfle et dégonfle à la chamade, comme s’il allait rompre. Il se bouscule comme pour faire s’écrouler les barrières que j’y avais construite.
Alors que je m’incruste dans ma pièce remplie de tous ces instruments de déguisement, mon être entier brûle d’un terrible sentiment.

Le spleen.
C’est le pire effet que peut subir un être humain, la tristesse. Elle vous déchire et vous arrache à votre force brute. Le chagrin est ce ressenti qui vous laisse tout seul dans votre tête, livré à vos démons intérieurs, vos remords, vos faiblesses… et moi… je ne peux que me laisser engloutir peu à peu.

Je me précipite, crépitante, sur la vitrine à perruque. Je l’ouvre et pose ma main sur le capteur placé sur le mur après avoir déplacé la chevelure pink.
Le coffre mural s’ouvre et je retire le carton à l’intérieur.

Je ne peux retenir mes sanglots en fixant la boite dans ma main brulante de frisson. Je m’affale sur le sol et exhume toutes les larmes de mon corps. Ouvrant le carton, j’accepte de plein fouet toutes mes douleurs.

Un morceau de tissu sale et imbibé de sang.
Notre sang. Le mien et le sien.
Comme je peux encore entendre ses vagissements de nouveau-né.
Ses cris de détresse me parviennent comme de la trompette sonnée près de mes tempes.
Je me serre la poitrine ou du moins, le tissu qui le recouvre.

Et ce petit coquillage.
Tout ce qui me reste d’elle. Ses derniers plus beaux mots. ‘’Tu sais que je t’aime, je ne te quitterai jamais’’. Juste avant qu’elle ne puisse plus jamais en dire d’autres.

La chainette en argent.
Elle était à mon tout petit poignet. Très longue, mais enroulée trois fois pour qu’elle tienne. Un passé si lointain que j’en ai oublié le bonheur.

J’ai tout perdu… comme si je n’avais jamais rien eu.
Je gémis en m’écroulant sur le sol comme si une douleur vive me transperçait l’âme.

Quel est le but de mon existence ?

Quel est la finalité de toute cette lutte si à la fin, je ne peux pas être heureuse ?

Quel est l’objectif de mes sacrifices s’ils ne me rapporte que de la peine à chaque fois que je repense au passé ?

Je veux m’en aller. Loin de tout. Arrêter de me battre et de vouloir me venger. Je veux tout arrêter.

Je veux mourir.

— Putain, Abby !

Le murmure me glace le sang et je me relève en tempête.

— Bordel de merde ! Qui t’a permis de rentrer !

José debout sur le pas de la chambre secrète me fixe, comme une statue. Je ne peux pas voir son visage mais le simple fait des circonstances me donne envie de me jeter à son coup pour l’étriper.

— Abigail.
— Je veux que tu sortes ! je hurle. Déguerpis je te dis !!

Il ne bouge toujours pas et la quantité de rage dans mes veines augmente.

— DEHORS !

J’y mets toute ma force. Toute mon énergie vitale.
Sans mot dire, il se retourne doucement et j’ai l’impression d’arrêter de respirer quand il s’éloigne lentement.
Je ne me contrôle plus.

— Non, je rétorque en le poursuivant alors qu’il n’est que presque à la porte de ma chambre. Je t’en prie, reste… avec moi.

Ça sort tout seul.
Lorsqu’il fait volte-face, je ne peux me retenir. J’explose en sanglots et je ne sais quand il se retrouve contre moi. Il m’embrasse et me serre si fort contre lui. Il tient ma tête contre son torse et mon dos contre sa paume.

Mon univers s’embrase et mes flammes s’adoucissent.
Est-ce là tout ce dont j’avais besoin ?
Une étreinte ? Un enlacement.
Je peux sentir toute sa chaleur, son corps répond présent contre moi. Son corps me dit ‘’je suis là pour toi’’.

Et ça me fait tellement de bien que je n’aurai jamais imaginé. Mon corps entier s’apaise. Il ne parle pas. Son acte le fait pour lui.

C’est la première fois que quelqu’un me tient ainsi. Même si c’était arrivé, José sait qui je suis. Il me connait et le peu qu’il saches de moi ne le fait pas fuir.
Mon esprit se calme et me plonge dans un profond mutisme.

Je suis foutue.

#2.THRUTHOù les histoires vivent. Découvrez maintenant