Chapitre 39

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Les pieds de Drago heurtèrent à nouveau le sol terreux à un demi-kilomètre de la forteresse dans laquelle son maitre se terrait. L'épée, dissimulée dans son manteau lui rappelait sa présence, son pommeau appuyant douloureusement sur ses côtes.

- Putain de Gryffondor, murmura-t-il entre ses dents.

Il n'y avait qu'elle pour le persuader de se promener avec une épée vieille de plusieurs siècles comme si c'était l'instrument de son salut. Il allait devoir faire appel à toute sa volonté pour dégainer son épée plutôt que sa baguette pour s'occuper du serpent.

Il déverrouilla ses genoux et marcha.

Le monde paraissait si silencieux nulle part ailleurs. Il n'y avait pas le moindre piaillement d'oiseau et même le vent qui agitait ses cheveux ne produisait pas le moindre son. Lorsqu'il fut presque aux portes de la forteresse, il n'entendit pas non plus les vagues s'écraser au bas de la falaise.

C'était l'effet que faisait le mage noir, il aspirait tout, toute la vie qui se trouvait à des kilomètres à la ronde. Il aspirait même le bruit et la lumière, ne laissant que cette lueur grise et terne qui vous donnait toujours l'impression de devoir allumer la lumière, même en plein jour.

D'un geste raide, il salua du menton les gardes au portail. Ils n'étaient pas des mangemorts, bien trop au bas de l'échelle pour obtenir la marque de la part du maitre. Aucun des trois gardes ne pipa mot à son passage mais Drago n'avait pas besoin de se retourner pour savoir qu'ils devaient déjà faire des messes basses à son sujet.

Les immenses portes qui menaient à la forteresse se rapprochaient de plus en plus, pas après pas et Drago était surpris de ne pas être tétanisé de peur à l'idée d'affronter le Lord pour la première fois de sa courte vie.

Plusieurs années auparavant, il avait été entrainé dans le cercle infernal des mangemorts par peur de mourir en refusant, par peur de provoquer la mort de ses propres parents s'il n'était pas à la hauteur. Puis, par peur de mourir, il avait commis les pires horreurs, les unes après les autres. Il avait participé à la mort de Dumbledore, et ça n'avait été que le premier d'une longue liste, si bien que Drago avait oublié la peur. Il avait fini par dormir sur ses deux oreilles en paix malgré les morts.

Il avait fini par exceller dans son domaine.

Il avait fini par plaire à ce maitre qui ne ressentait plus que dégout envers son père.

Il avait fini à la tête de la pire prison pour sangs de bourbe du pays avant même de s'en rendre compte, le coeur froid, détaché de toutes les horreurs qu'il pouvait bien commettre.

La peur avait disparu en même temps que son coeur.

Maintenant son coeur était de retour, mais pas la peur.

Il n'y avait que ce vide paisible, celui qui vous emplit quand vous savez que vous agissez comme il le faut même lorsque cela vous portera préjudice.

Les portes s'ouvrirent devant lui et Drago continua son chemin dans les longs couloirs déserts. Derrière les portes qui ponctuaient les murs, il entendait parfois des hurlements de douleur, d'autres fois des rires, et parfois rien du tout.

Ses pas le menèrent mécaniquement à la salle du trône.

Est-ce qu'un jour le Lord voudrait se faire appeler « votre majesté » ? Peut-être ...

Sans doute pas si le plan de Drago réussissait.

Il s'arrêta un moment, enfonçant les mains dans les poches de son manteau. Il sentait l'épée contre sa poche gauche à l'intérieur de son manteau. Dans sa poche droite, la baguette qui n'était pas la sienne.

Coeur de fer, coeur de pierre, coeur briséOù les histoires vivent. Découvrez maintenant