Chapitre 7 : ruptures

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Harry ne savait pas s'il était soulagé ou pas de l'absence de George lorsqu'il rentra. La seule chose qu'il savait était qu'il devait mettre fin à ce qu'il se passait entre eux, il ne pouvait pas continuer alors qu'il savait qu'il ne pourrait jamais offrir à l'inventeur ce qu'il voulait. En attendant son retour, Harry empaqueta ses quelques affaires et prit une douche. Ses sacs étaient sur le lit et lui était en serviette lorsque George arriva.

"Tu pars."

La voix de son ami était résignée, son visage défait, ses bras croisés sur sa poitrine.

"Je pense que c'est mieux ainsi. J'ai réalisé ce que tu me disais à mi-mots hier et je ne ressens pas... ça pour toi.

- Je sais."

Harry se sentait moins que rien, il avait l'impression de frapper un homme déjà à terre.

"Je vais demander à Lee de venir m'aider à la boutique en attendant que je retrouve quelqu'un. Merci d'avoir libéré le studio.

- On se verra bientôt au Terrier.

- Sûrement."

L'absence de blague ou de tentative pour dissimuler la peine de l'inventeur termina d'anéantir le moral de Harry qui s'habilla avec les premières frusques qu'il trouva et transplana chez Ron et Hermione. Ils ne semblèrent pas surpris de sa présence et lui offrirent un verre sans poser de questions. Les deux jeunes hommes burent jusqu'à une heure avancée de la nuit, jusqu'à s'endormir ivres sur le canapé, Hermione les avait abandonnés bien plus tôt et souffla en les trouvant ainsi le lendemain matin. Elle les secoua sans scrupules et leur tendit une fiole de potion anti-gueule de bois chacun en leur rappelant qu'ils avaient trente minutes pour être prêts.

Harry avala la potion en grimaçant et se leva en titubant jusqu'à la table pour s'avachir sur une chaise et avaler le café offert par son amie. Il fallut bien dix minutes à la potion pour faire effet et à son mal de tête pour disparaître.

"Tu as dit à George que c'était fini ? demanda Hermione alors que Ron était sous la douche.

- Oui, enfin il a compris tout seul.

- Comment tu te sens ?

- Comme une merde, j'aurais dû t'écouter.

- Ce qui est fait est fait. Débrouille-toi d'être en paix avec tes émotions avant d'aller chercher Jasper."

Harry soupira, pourquoi fallait-il que le vampire soit un empathe ? A défaut de pouvoir trouver une réponse à cette question, il plongea dans sa tasse de café et se remémora de bons souvenirs pour apaiser ses émotions. Lorsque Ron sortit de la douche, il était l'heure de partir, le rouquin prit trois brioches à manger pendant qu'il attendrait le retour du groupe qui allait chercher Jasper et ils entrèrent dans la cheminée les uns après les autres.

Quand Harry sortit de la cheminée dans le salon du square, il constata qu'ils étaient les derniers à arriver, mais n'en avait pas grand chose à faire. Il posa son sac de voyage dans un coin de la pièce et alla se servir un second café pendant que Kingsley rappelait l'organisation de l'opération.

Enfin ils furent prêts à partir. Shacklebolt tendit un parchemin à ceux qui devaient venir avec lui et si Hermione, Percy, Arthur, Flitwick et Harry le prirent sans hésiter, ce ne fut pas le cas de Carlisle et Edward qui ne comprenaient pas le lien entre le bout de papier et leur départ. Ils le prirent après quelques encouragements et ne purent retenir un hoquet de surprise quand le ministre prononça le mot de passe pour activer le portoloin et qu'ils ressentirent la sensation d'être crochetés par le nombril.

Ils arrivèrent directement dans le couloir des portes, et se préparèrent à ouvrir la cellule de Jasper. Ils étaient venus plus nombreux que la veille au cas où le vampire ne se soit pas encore calmé et se montre agressif envers eux. Harry grimaça en les voyant tous se costumer en mangemorts et refoula les souvenirs de la guerre qui se chamboulaient dans sa tête. Il inspira un grand coup et signifia à Kingsley qu'il était prêt. Son cœur se serra lorsqu'il repéra la silhouette de Jasper recroquevillée dans le même coin que la veille. Son poing se serra sur la grosse clé rouillée que Kingsley lui avait donnée. Il sentit que les autres entraient après lui, mais il ne pouvait détourner son regard des deux onyx qui le fixaient. Il avança avec prudence, comme il l'aurait fait avec un animal blessé, ce que le vampire était à sa façon. Il savait qu'il pouvait l'attaquer à tout moment, Flitwick avait ensorcelé ses vêtements pour le protéger des crocs acérés, mais il n'avait pas peur. Au fond de lui, il savait que Jasper ne tenterait pas de le tuer. Ce dernier se releva quand Harry ne fut plus qu'à un pas de lui et adopta une posture défensive. Le Survivant se figea, personne ne bougeait derrière lui, c'était comme s'ils essayaient de respirer le moins possible.

Harry monta sa main à la hauteur des yeux du prisonnier et ouvrit trois doigts pour qu'il puisse voir la clé. Il put voir le mouvement des deux billes noires aller de son visage, à la clé et revenir sur lui, mais rien d'autre ne bougea. C'était comme s'il faisait face à la statue d'un homme à l'agonie enveloppé dans une sorte de dignité animale.

Avec le plus de lenteur possible, le sorcier approcha sa main du poignet enchaîné le plus proche de lui, mais quand il la posa sur le bracelet, le vampire se saisit de son bras et serra. Harry crut qu'il allait lui casser le bras, mais même là, il fit signe aux autres de ne pas intervenir.

"Je ne te veux pas de mal." murmura-t-il en regardant cet homme, ombre de lui-même qui malgré son état de santé inquiétant gardait une force et une rapidité extraordinaires.

Les secondes furent longues jusqu'à ce que la poigne sur sa peau le relâche, mais le vampire garda ses doigts sur sa peau comme un avertissement de ce qu'il allait faire si jamais Harry faisait le moindre geste de travers. Le jeune homme fit en sorte que ses mains soient toujours visibles et ouvrit le premier bracelet, la peau en-dessous était à vif et il comprit qu'il avait fait mal à Jasper lorsqu'il avait tourné l'anneau plus tôt.

Avec douceur, il défit chacune des autres entraves sans incident.

"Ne bouge pas." murmura Harry quand il l'eût délivré de la dernière.

Il put voir la peau de l'empathe être parcourue d'un frisson alors qu'il était enfin libre de ses chaînes. Harry se redressa et réalisa qu'une sorte d'aura dangereuse sortait de l'homme face à lui. Il déglutit avec difficulté, cette face là du vampire lui faisait peur, mais il tenta de le cacher. Le rictus qui étira les lèvres de son vis-à-vis lui prouva qu'il échouait, mais il ne se laissa pas déstabiliser et se raccrocha à son courage de Gryffondor.

"Je veux t'aider."

L'aura cessa de grandir.

"Laisse-moi t'emmener ailleurs." chuchota-t-il en tendant sa main.

Le bruit du transplanage fit tourner la tête au vampire vers les spectateurs de la scène.

"C'est comme ça qu'on va partir, ajouta Harry, toujours à voix basse. La sensation est étrange, mais ça ne te fera pas de mal."

Une autre personne quitta la salle en transplanant et Jasper prit finalement la main tendue.

Le vampire paniqua pendant le trajet, mais Harry tint bon. L'atterrissage fut douloureux par contre, il s'était tant concentré sur le vampire pour s'assurer qu'il ne se blesserait pas à gesticuler de la sorte, mais ce fut le sorcier qui se trouva avec le coude désartibulé.

Le vampire sauta sur lui dès que la blessure s'ouvrit, mais Edward s'interposa juste à temps. Harry se sentit tiré en arrière par un sortilège et se laissa tomber sur le dos dès qu'il eût passé la porte, le souffle court, le bras douloureux, mais le regard rivé sur le combat entre Jasper et Edward et Carlisle.

Ces deux vampires combattaient de concert pour immobiliser le troisième sans le blesser plus qu'il ne l'était déjà, mais ce dernier était un combattant hors-pair. Il tint de longues minutes avant que sa condition ne donne l'avantage aux hommes en pleine forme qui l'immobilisèrent de leurs corps.

Flitwick fit léviter une poche de sang jusqu'à Carlisle qui s'en saisit, mit un coup de dents dedans et glissa l'ouverture dans la bouche de Jasper qui le but à grandes gorgées. Ils eurent besoin de quatre poches de plus avant que le corps blessé ne se détende et qu'Edward et Carlisle ne le libèrent.

Voyant que Jasper était calmé par le sang qu'il avait bu, ils quittèrent la chambre. Molly terminait de soigner Harry qui ne pouvait quitter des yeux le corps squelettique qui longea les murs et poussa un cri de désespoir lorsqu'il comprit qu'il n'était pas libre. Le vampire se recroquevilla dans le coin le plus sombre de la pièce, mais accrocha son regard aux yeux verts qui ne pouvaient se détacher de lui.


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