J-20
Parce que j'étais impolie et que j'avais laissé parler mon cœur plus que ma raison, j'avais osé défier mon père pour la première fois.
Enfin, pour la première fois ne serait pas exact. Je le défiai souvent. À chaque fois que je swipais le profil d'une jolie fille vers la droite au lieu de désinstaller l'appli, à chaque fois que je leur cachais une partie des informations concernant ma vie privée et les interactions que j'avais avec Victor et Tristan, je le défiai. Le mensonge par omission était du véritable mensonge, aussi.
Mais c'était différent, aujourd'hui. C'était pas pareil. J'étais en face de lui, ce qui signifie qu'il pouvait voir à quel point j'étais devenu quelqu'un d'insolent à ses yeux. Je savais que je le décevais, mais là, je devais avoir atteint le summum de la déception.
Il me regarda, toujours d'un air effaré, puis décida de lever la main vers moi, à la place.
On devait être marrant à observer, avec le père venant de rentrer du travail, et les enfants qui se préparent à recevoir des coups.
Quel beau tableau de famille.
— Ne fais pas de mal à Armand, Papa. C'est de ma faute, tout est de ma faute. Je joue souvent tard avec Armand, et il n'a pas le temps de bien réviser ses leçons après. Je suis désolée pour tous les problèmes que j'ai causés.
Il arrêta de lever la main. J'avais évité le désastre.
— C'est de ta faute, en effet. Armand est promis à un brillant avenir. Pourquoi tu sabotes son travail ? Lui au moins, sait ce qu'il fera de sa vie.
Sympa, de remuer le couteau dans la plaie. Oui, j'étais perdue. Oui, je faisais des études pour en faire. Mais ça ne signifiait pas que je faisais une croix sur brillant avenir ou quoi que ce soit. Pas mal d'autres élèves étaient dans le même cas que moi. C'était aussi le cas de personnes se trouvant dans des classes supérieures.
— Mais bon, que veux-tu, il faut bien agir avec les enfants que Dieu nous a donnés... continua-t-il, avant de me tendre la main.
— Ton téléphone. Maintenant.
À cet instant, je me dis que j'aurais préféré mille fois me prendre une claque. Mon cellulaire était l'une de mes seules safe places, havre de paix de la maison. Je ne pouvais pas me permettre de lui fournir les munitions qui m'abattraient !
Pas comme Victor, je veux tout sauf la même peine que Victor, je vous en prie.
Il reposait dans ma poche arrière. Aucun moyen que je puisse le sortir, désinstaller l'application compromettante, puis lui redonner le sourire aux lèvres, en me disant que j'avais réussi mon coup.
Je sortis alors mon appareil doucement, tout doucement, le temps de trouver une solution.
Soudain, une idée me traversait l'esprit.
Je pouvais donner le téléphone au petit Armand derrière moi, et lui faire comprendre qu'il devait effacer HERS.
Mais comment lui communiquer l'information en toute discrétion, sachant que les yeux de son père me scrutaient ?
Je n'avais pas d'autre choix. Je devais m'en remettre à mon destin.
— Alors, ça vient ?
La main toujours scotchée à mon dos, j'éteignis mon portable, et je priai pour que ni Maman ni Papa n'ait un jour vu mon mot de passe.
Je lui donnais la machine, qu'il prit avec un petit sourire satisfait.
— Excellent. Et que ça ne se reproduise plus !
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Rendez-vous avec le mal
Mystery / Thriller⚡ Pour contrer la maitre chanteuse de ses parents politiciens, une jeune femme s'engage dans un jeu de séduction dangereux avec le corbeau ⚡ Pauline, 20 ans et fille d'un politicien homophobe, vit avec honte dans le placard et rêve de se fondre dans...