XVII

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J-14

Denise avait refusé net. Elle avait avoué que la logique n'avait rien à voir avec ses actions, alors que je lui avais présenté une alternative possible.

Que pouvais-je faire face à une telle personne ? Il n'y avait plus rien à faire. Je n'avais qu'à abandonner de marchander avec elle. Tout ce que je disais lui rentrait par une oreille, puis en sortait d'une autre. C'était comme si je parlais à une personne depuis une bulle de verre et qu'elle ne m'entendait pas. Pire, qu'elle ne me voyait pas.

Qu'allait-elle faire de moi, maintenant que j'avais échoué ?

Mes membres se mirent à trembler de peur.

Je ne veux pas mourir maintenant. J'ai peur !

Toute l'humanité que j'avais prêtée à Denise s'était envolée. À cause de ses sourires, de ses talents, et de la gentillesse qu'elle m'avait accordée, je pensais qu'elle n'était pas si mauvaise que ça. Mais quand quelqu'un avouait devant soi qu'elle ne faisait pas le mal simplement parce qu'elle était obligée, mais parce qu'elle en avait envie, que pouvait-on faire ?

Denise s'agenouilla, le visage près du mien. J'avais toujours les yeux collés sur le sol, effrayée, non, terrorisée par l'erreur que j'avais commise. Qu'allais-je faire ? Qu'allais-je faire ?

— Regarde-moi, me dit-elle.

Je ne le fis pas. Je gardais mes yeux sur la moquette bordeaux et sur ses talons de cuir qui luisaient sous l'éclairage.

— Regarde-moi, m'ordonna-t-elle.

Elle m'agrippa les cheveux, et les baissa pour me faire lever la tête.

Je glapis de douleur.

— Bien. Tu peux être obéissante, quand tu veux.

Ses bras me tenaient avec une force que j'avais insoupçonnée. Ses yeux étaient injectés de sang. Je l'avais rendue furieuse.

— Maintenant, mets-toi bien cette idée dans la tête. On ne se joue pas de moi.

Elle avait détaché chaque syllabe de sa phrase. Puis elle rejeta mes cheveux en arrière et lâcha ma tête. Je tombais à la renverse.

— C'est compris ?

J'étais au sol, et j'avais la peur de ma vie. Elle pouvait tout me faire, ici. J'étais seule. Je me mis à sangloter.

— Si tu recommences, tu auras besoin de bien plus que des points de suture, alors ne t'amuse pas à m'énerver comme tu la fais aujourd'hui. Je suis déçue de toi, Pauline.

Elle ouvrit la porte en grand et s'en alla.

— Ramasse tes affaires et va-t'en, avant que je change d'avis, dit-elle avant de disparaître plus loin dans les arrière-boutiques du bar.

J'étais laissée seule, vivante, mais tremblotante. Ignorant la douleur lancinante sur mon crâne, je ramassais les billets éparpillés dans la loge et les enfonçai sans ordre dans le grand sac. Je balançais la mallette à l'intérieur, la fermai, puis partis en courant de Licornes & Strass.

Je m'enfonçai jusque dans un parc pas loin, et me posai sur un banc, avant de m'y effondrer et de pleurer.

Mon plan avait lamentablement échoué. Et en plus, j'avais complètement mal compris Denise. Elle n'était pas la fille joviale qu'elle m'avait montrée.

J'étais bel et bien entrée dans la gueule du loup, et je n'avais aucune idée de comment me sortir de cette situation infernale.

Je me laissais aller à mon chagrin, et je me mis à pleurer aussi longtemps que je pouvais. Je devais laisser les larmes sécher, sinon je ne pourrais pas rentrer à la maison sans me faire harceler de questions de la part de ma mère. Afin de ne pas éveiller de soupçons, je devais donc rester dans un coin du kiosque, à espérer que les signes de ma peur et de ma tristesse disparaissent.

Rendez-vous avec le malOù les histoires vivent. Découvrez maintenant