XXVIII

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J-7

Je poussais la porte de la première pièce qui se trouvait devant moi.

Des filaments de lumière s'en échappaient, signe que quelqu'un se trouvait à l'intérieur.

Je ne me souvenais pas précisément de l'agencement du premier étage des Giroux, alors j'avançais à l'aveuglette. Qu'importe si je tombais sur la chambre des parents, dans la salle de bain, ou dans des toilettes occupées. Tout ce qui m'importait, c'était que je retrouve les jumeaux, quelque part, en sécurité.

Je me pris à prier Dieu sincèrement, pour une fois. Ce n'était plus un mensonge, une fausse prière que je tentais de forcer. Non. Celle-là découlait d'une réelle peur de perdre mes proches.

Je ne leur montrai pas tant que ça mon affection, que ce soit par des mots ou par de la tendresse, mais je les aimais.

Dieu, s'il te plaît, fais que... !

Alors que je poussais la porte sans faire attention à ma force, elle s'éclata contre le mur, et ce fut assez pour faire sursauter Tristan, dans son lit, un casque sur les oreilles.

Il va bien ? Il va bien? me demandai-je alors que je scannais les parties de son corps en dehors de la couverture avec laquelle il s'était emmitouflé.

Il retira son casque, et me jeta un air agacé :

— T'étais pas obligé de le faire aussi fort ! Je serais descendu un moment où à un autre. J'avais juste pas envie de me taper les discussions sur la Commission européenne et autres taux d'intérêt du livret A !

Il était toujours aussi bruyant. Ouf. Il va bien.

Mon cœur s'affola moins.

Sa mère, derrière moi, s'affola plus, par contre. Elle entra dans la chambre et tira les oreilles de son jeune homme, le visage ridé par la colère.

— Toi ! Ne t'ai-je pas appris à utiliser qu'un seul écouteur quand tu es dans l'enceinte de la maison ? Comment tu veux que je sache que t'étais dans ta bulle ? Je m'inquiète vite, tu sais ? Et puis c'est comme ça que vous donnez l'accueil à nos invités ? Je ne vous ai pas élevé comme ça !

Tristan gémissait de douleur, alors que sa mère lui donnait la correction qu'il méritait. Moi aussi, il m'avait fait peur, cet idiot !

Quand sa mère lui lâcha les oreilles, il retrouva d'un coup toute son amabilité. Il s'était redressé et s'était incliné plusieurs fois devant moi, à la façon des Japonais.

— Oh, bonjour, Pauline. Quelle surprise. Je suis ravi de te voir. Cette robe te va à ravir, d'ailleurs.

Tristan allait parfaitement bien. Tant mieux. Mais ce n'était pas lui, le plus à risque. Il y avait encore une personne à aller vérifier. Dans le meilleur des cas, il se ferait tirer les oreilles et j'aurais droit au même spectacle qu'avec le caïd amateur.

Mon cœur recommença à battre à tout rompre. Je devais retrouver Victor. Où es-tu ?

J'ignorais son commentaire et courus vers la chambre de Victor. Je m'excuserais plus tard. Tant que je n'avais pas vu les deux jumeaux en bonne santé, je ne pouvais pas me reposer.

Je trouvais l'autre chambre baignée de lumière, et l'ouvris sans attendre.

Je me l'imaginais dans son lit, lui aussi la tête dans son casque, à se laisser porter par ses enquêtes et True crime qu'il affectionnait tant pour s'endormir. J'imaginais l'entendre ronfler dans une pièce qu'il aurait oublié d'éteindre, alors qu'il tombait peu à peu dans les bras de Morphée.

Rendez-vous avec le malOù les histoires vivent. Découvrez maintenant