Amnesia

Chapitre 3

KNOX

— J'ai bien cru qu'elle allait te transformer en gruyère, mon pote ! Se moque Maël en regardant le match de football.

Ça fait un moment que mes deux collègues n'arrêtent pas de me charrier. 

Bien évidemment, ils n'ont raté aucune miette de l'entrée d'Ivy dans le bureau de notre patron et je fulmine intérieurement en écoutant leurs remarques à la con.

— Démêlez vos embrouilles et rendez-vous service à tous les deux. Baisez un coup ! Reprends Léo.

Si seulement c'était si simple...

— OH OUI ! TOUCHDOWN ! S'exclament-ils en cœur en levant les bras.

Alors qu'ils savourent les six points marqués par l'équipe des Rams, je peine à rester concentré sur l'écran plat. Nous suivons la NFL* comme de fervents supporters mais ce soir, mon enthousiasme s'est envolé.

En effet, une petite blonde hargneuse monopolise mes pensées.

Je me doutais qu'elle serait furieuse contre moi, mais je n'imaginais pas à ce point-là. Au bout du compte, j'ai tout gâché et il est fort possible que je ne puisse jamais la récupérer puisqu'elle refuse de m'écouter.

Dépité, je porte à mes lèvres le goulot de ma bière et avale le contenu d'une seule traite. J'ai besoin de noyer ma peine. 

Mon regard reste perdu dans le vague jusqu'au coup de sifflet final.

Les garçons rangent et s'apprêtent à partir alors que je reste vissé dans le canapé.

— Tu restes là ? M'interroge Maël, surpris par mon manque de réaction.

— Ouais... J'ai besoin de me vider la tête. Lui avoué-je en désignant les voitures un étage plus bas.

Il opine de la tête et son frère s'accroupit pour se mettre à mon niveau.

— Laisse-la venir à toi... Me conseille Léo plus sérieusement. Mais arrête de longer les murs, il faut que tu lui dises ce que tu ressens vraiment. Ce que vous avez traversé est particulier et vous méritez tous les deux d'avancer. Que vous soyez ensemble... Ou séparés.

Je me mords l'intérieur des joues en acquiesçant. Il me tapote l'épaule en guise de soutien avant de s'éloigner avec Maël, me laissant seul dans le hangar silencieux.

Ce ne sont pas les mots que j'avais envie d'entendre pourtant ce sont ceux que j'avais besoin d'entendre. 

Et même si ça me crève de l'admettre, je dois reconnaitre qu'il a totalement raison...

*

IVY

Cela fait plus d'une heure que je déambule, redécouvrant chaque recoin de ce lieu où j'ai grandi. Tout est parfaitement semblable à l'endroit que j'ai quitté il y a cinq ans.

Il faut dire que la villa est gigantesque et, en parfait guide, Drogo m'escorte dans chacune des pièces. 

La résidence principale est destinée à notre famille, mais de nombreux logements de fonction se trouvent sur la propriété pour nos hommes.

Une fois mon petit tour terminé, je m'installe sur la terrasse pour m'en griller une. J'aurais aimé profiter de l'extérieur, mais la nuit est tombée, plongeant le jardin dans l'obscurité.

La tranquillité de l'instant me permet de contempler les étoiles. La pluie ayant cessé, le ciel sombre et dégagé révèle leur éclat scintillant.

Malgré le soulagement de connaître enfin toute la vérité, une sensation d'inconfort persiste encore.