27 | Mauvaises nuits

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Milann

Suzana Stottan. La nouvelle carte abattue dans mon combat pour redorer l'image de Vain Spezeli.

Après sa conférence, surveiller la moindre information qui peut le nuire dans la presse pour la neutraliser a été ma préoccupation pendant les semaines qui se sont écoulées. Ses apparitions publiques ont été limitées depuis, voire quasiment inexistantes, pour son bien. Il a eu l'interdiction de parler de l'affaire avec toutes personnes qui le contactent et encore moins de lire ce qu'on disait de lui.

Après une semaine à préparer Suzana, elle a livré une interview exemplaire en faveur de son fidèle ami. J'ai assisté à l'émission depuis les coulisses du plateau de la grande chaine d'informations, prête à intervenir en cas de problème.

La femme d'une quarantaine d'années a suivi mes conseils à la lettre et sans maladresse : des réponses simples, ne pas baisser les yeux lorsqu'elle parle et inspirer la bienveillance. Au moindre doute, elle n'avait qu'à lancer la phrase signal « Vous savez... » et répéter ce que je lui aurais soufflé dans l'oreillette. Elle s'en est tellement bien sortie, que j'aurais pu la laisser sans surveillance.

Jax m'a téléphoné avant l'émission pour me détendre un peu. Je me suis marrée. Comme si j'avais besoin de ses encouragements, je n'étais même pas stressée. Il a fait ça pour nourrir mes doutes, j'en suis sûre. Avant de planifier cette interview, il m'ignorait ou m'envoyait trois messages dans la journée quand il était de bonne humeur.

Dès qu'il l'a appris pour l'interview, j'ai reçu une rafale d'appels et messages. Il avait peur que je ne réussisse pas à préparer Suzana, peur qu'elle se fasse avaler par la journaliste en plein direct, peur que ça ne profite pas à Spezeli. J'ai perdu un temps fou à lui expliquer qu'il devait me faire confiance. Encore. Je ne me mêlais pas de sa stratégie comme il me l'avait demandé, donc il n'avait pas à le faire avec moi.

En plus, j'avais l'impression qu'il se prenait pour mon boss. Son comportement m'a fait souffler plus d'une fois, mais j'ai mis ça sur le dos du travail étant donné qu'il se concentre durement sur la préparation de sa défense.

Nous avons enchainé seulement les appels téléphoniques, emails et visioconférences. Pas de rendez-vous physique. C'est d'ailleurs toujours moi qui revenais pour avoir des nouvelles et ses réponses froides m'ont fait comprendre qu'il n'avait pas le temps de répondre à toutes questions, comme il me l'a dit, « non essentiel à notre affaire ».

« Occupé. » a été sa réponse favorite. « Je regarde plus tard » a été la deuxième. Le reste du temps, il a communiqué avec « des pouces » et je déteste vraiment quand il fait ça. Même dans le message où je lui ai demandé d'arrêter de le faire, il l'a notifié avec un putain de pouce juste pour m'énerver.

À la fin de l'interview, Suzana et moi avons rejoint Spezeli, qui est resté à Washington depuis sa conférence, pour un petit débrief. Je lui ai déconseillé de suivre l'émission. Il devait profiter des moments de calme et me laisser faire mon travail. Mais bien sûr, il ne l'a pas fait et quand nous sommes arrivées chez lui, il a bondi sur son amie pour la féliciter.

J'ai trouvé ça étrange qu'il le fasse. Féliciter son amie pour avoir dit combien il était l'homme le plus respectueux, drôle, aimant et humain que le monde n'est jamais connu.

Ce matin, j'ai trainé longuement au lit pour m'assurer de ne pas avoir une migraine dès le réveil. Personne ne m'en voudra d'avoir repris des forces après ces derniers jours intensifs. J'avais besoin de me reposer un peu.

Dès mon retour au bureau, Jeston m'accueille en me tendant un gobelet dès qu'il me voit.

— Merci, tu es le meilleur.

Regain PrestigeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant