Cela ne lui arrivait pas souvent mais le si peu de fois où il nous parlait, c'était pour converser au sujet de cette jeune fille, puis de cette jeune femme. Au début, cet homme nous parlait d'une jeune dame bien connue de tout le monde. De tout le pays. Et même bien au-delà de notre nation. Enfin, tout ça pour dire qu'ils ne la connaissaient seulement en apparence. Et que personne à part lui ne savait ce que cette femme avait vécu depuis sa plus tendre enfance. Il n'en discutait qu'avec elle. Avec personne d'autre. Puis, il a commencé à faire trois grandes exceptions. Seulement trois. Il s'est mis à la décrire plus personnellement. Plus intimement je devrais dire. Oui, parce qu'à ce stade, ce n'était plus une simple description. Non, en réalité, nous avons eu le droit à un portrait détaillé de cette magnifique personne. La moindre de ses courbes pouvaient avoir le droit à une ou deux métaphores lyriques tellement il vantait sa beauté. Malheureusement, je n'arriverai jamais à écrire noir sur blanc cette façon qu'il avait bien à lui de la présenter. Aucune des autres exceptions ne sont dotées de ce talent par ailleurs. Nous aurions aimé être en présence d'un écrivain de talent pour nous faire ressentir toutes ses expressions et sentiments à travers ses dires, mais cela était impossible.
Cette femme. Nous pensions la connaître par cœur. Mais nous nous trompions. Elle nous cachait des choses. De lourds secrets que seul cet homme et elle connaissaient. Elle nous cachait ses véritables objectifs et ainsi, elle parvenait à nous manipuler. Enfin ! Nous sommes capables de tout lui pardonner. Et cela parce que c'est elle. Surtout maintenant que cet homme décide de nous expliquer son histoire. Son histoire à lui, ainsi que celle de cette femme. Leur histoire a eux. Leur histoire d'amour comme leur conflit. Mais la question que nous nous sommes posés tous les trois est de savoir si nous serons aptes à lui accorder notre pardon. Si nous le souhaitons réellement.
Voici la description générale qu'il n'a jamais cessé de me faire, il y a des mois de cela, de cette femme : « Durant sa vie, elle a possédé deux prénoms. Plusieurs « parents ». Plusieurs maisons. Plusieurs vies s'y puis-je dire. ». Chaque fois qu'il me parlait d'elle, il me la décrivait comme étant son plus grand bonheur car cette « déesse » comme il l'a nommé, a été son premier et seul grand amour de sa vie. Mais également son plus grand malheur car... ce couple était connu de tous pour son seul et unique conflit amoureux. Un conflit qui les a mené à leur perte et qui les a poursuivi pendant un très long moment. À tous les deux. Sûrement à nous aussi – les exceptions – qui rêvaient connaître la vérité sur ceux que nous avons soit idolâtrés, soit exécrés. Car oui, nous n'arrivions pas tous à les apprécier. Et il y a encore peu, nous nous disputions sur de tels sujets absurdes. Ce qui revenait était : « Pourquoi l'aimes-tu ? Te rappelles-tu seulement ce qu'il a fait ? » ou « A quoi cela sert-il de lui en vouloir après tout ce temps ? N'a-t-il déjà pas eu son compte ? ». Mais les questions qui nous ont données le courage d'écouter attentivement leur histoire sont : « Les connaissons-nous ? Avons-nous seulement le droit de choisir un camp sans pour autant connaître leur vie ? ». La suite de cette discussion, ou dispute, je l'ai oublié. Je me rappelle seulement avoir accepté de prêter une oreille attentive à cet homme pendant un moment indéterminé.
La deuxième description qu'il me fit de cette jeune fille fût plus intime car elle était davantage détaillée. Les yeux bleus extrêmement clairs au point de se demander si elle n'était pas aveugle ; des cheveux noirs, longs et lisses aussi soyeux que la fourrure d'un loup fraîchement lavé ; une peau pâle ressemblant étrangement à celle d'un mort avec pour contrepoint attirant et charmeur des lèvres rosées, pleines de vie comme dans le conte de Perrault. Voilà qui était physiquement son adorée, sa passion. Malgré son physique d'enfant peu élégant – enfin, suivant vos penchants pour les filles comme-ci ou comme ça –, au fil du temps, il me la décrivait comme une jeune femme en pleine éclosion. Il insinuait également que ce n'était pas une femme qui ressemblait à celles d'aujourd'hui. Non. Elle, elle était différente. Unique en son genre, même : elle était discrète mais horriblement intelligente ; d'une beauté simple mais terriblement attirante ; d'une gentillesse infinie mais particulièrement exigeante ; malade et pourtant elle ne laissait paraître aucun signe de faiblesse. Oui, c'est comme cela qu'était cette femme : adroite, séduisante, intransigeante et malheureusement souffrante. Pour lui, c'était le genre de femme que l'on ne voyait qu'une fois dans sa « misérable » vie comme il le disait. Elles seraient, je cite : « Des diamants à l'état pur que ne trouve que très rarement. Et quand on les trouve, généralement, ils sont accaparées par des personnes cupides ... de pouvoir ou de sentiments plus passionnels. ». Je ne serais dire si c'était le cas de cet homme, mais je sais qu'il s'est approprié cette femme à cause de sentiments qu'il n'aurait pas dû éprouver pour elle. En tout cas, c'est ce qu'il raconte. Cela devait être comme une sorte d'amour interdit. Un interdit qu'il a réussi à braver jusqu'au jour fatidique.
La rumeur court que l'amour rend aveugle. Pour ce qui est de cet homme, eh bien c'est différent car il ne s'est pas rendu aveugle d'amour. Il est tombé. J'explique. Depuis qu'il a vu cette magnifique femme, cet homme « est tombé » dans tous les sens du terme. Il est tombé avec elle du haut d'une montagne quelques jours avant leur mariage. Il a fait tomber le temps qu'il pouvait passer avec elle. Il est tombé des nues lorsqu'il a croisé son regard si meurtri et en demande de secours. Il s'est laissé tomber malade d'une cruelle passion pour elle qu'il appela plus tard « amour » et qui le mena à sa perte prématurément. Voilà ce que l'amour lui a procuré. Quel triste sort lorsque l'on connaît toute l'histoire. Mes deux acolytes vous diraient la même chose malgré nos avis qui divergent. Mais jamais ils ne pourront l'inscrire dans ce livre. Jamais.
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L'inconstance des Sentiments
RomanceUn jour, après avoir passez une bonne dizaine d'années dans un rustre monastère, quelqu'un vint chercher la belle, délicate et naïve Jane. Ou plutôt Hyacinthe. Enfin bref, du jour au lendemain, le mariage frappe à sa porte ... C'est un homme de bon...