Troisième partie : Chapitre 10 → L'art d'éprouver de la félicité

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           Quinze heure moins dix. Nous sommes de retour au taudis. Le café est encore sur la table basse du salon. Il est devenu froid depuis ce matin mais il est toujours autant amer. Dégueulasse !

– Veux-tu un autre café ?

– Non merci, ça ira. J'ai envie de dormir cette nuit.

– Je comprends.

– Reprenons là où nous nous étions arrêtés. C'est-à-dire...

– ... à l'incinération de Béatrice, termine-t-il ma phrase. Je n'ai rien à ajouter si ce n'est que le père de Hyacinthe a accordé sa bénédiction pour notre second mariage. Il était très heureux que sa fille soit encore vivante et il l'a félicité d'avoir retrouvé son ancien amoureux.

– Comment ça « son ancien amoureux » ?

– Eh bien, comme je connaissais William, naturellement je connaissais également les autres membres de la fratrie. Et vue que c'était toujours moi qui allais chercher Conan et Hyacinthe lorsqu'ils étaient en danger, elle m'a vu comme une figure protectrice. Mais apparemment c'était plus que ça. J'ai rigolé quand j'ai appris qu'elle avait déjà un faible pour moi à l'âge de six ou sept ans. Par contre, ma belle femme était toute gênée de ne pas m'avoir reconnu et de ne pas avoir le lien entre cet enfant et l'adulte que j'étais. Elle est devenue rouge pivoine, ce qui me faisait rire d'autant plus.

– Et quand est-ce que s'est fait le second mariage ?

– Dans les jours qui suivirent. Elle avait pris la robe de mariée de sa mère qui était très simple mais vraiment jolie. C'est le prêtre du village qui nous a mariés.

– C'était un jour merveilleux pour vous.

– Oui, surtout pour Hyacinthe. Tout le reste de sa famille était présente. Conan y compris, même s'il tenait à rester à l'écart. Elle a pu danser avec son père et son jumeau pour la première danse – oui, c'était une dans à trois. Ensuite, toute la nuit, nous avons fait la fête. C'était fantastique ! Je crois que je n'avais jamais vécu un jour comme celui-ci. Tout le monde riait, chantait, dansait, mangeait, buvait ou dormait. Avec Hyacinthe, nous avons même eu le droit à de multiples dessins ou peintures de personnes anonymes qui disaient nous avoir trouvé « véritablement amoureux ».

– Quel beau compliment !

– Oui. C'était un magnifique compliment puisque tous les deux, nous avons pleuré en les regardant. Il y en avait un où nous dansions ; un lors de la cérémonie où nous nous sommes échangés les alliances ; un de nous en train de celer notre amour par un baiser ; un de Hyacinthe avec sa tête posé sur mon épaule lorsqu'elle était fatiguée ; un lorsque nous mangions dans la fourchette de l'autre ; et cetera. Ils sont dans ma chambre si tu veux les voir. Ils sont très jolis.

– J'irai les regardé tout à l'heure.

– D'accord. ... Nous avons dû rester quelques jours de plus parce que ma nouvelle femme voulait – même si elle ne le disait pas – profiter de sa famille encore un bon moment. Elle a beaucoup parlé avec son père et moi avec sa première moitié. Quant à sa mère, nous ne l'approchions pas ou très peu. Le père de ma femme disait qu'il ne valait mieux pas qu'elles se touchent. Pour quelles raisons, nous ne le savions pas parce qu'il refusait de nous dire quoi que se soit, prétextant que ce n'était pas si grave que ce que nous croyons. ... Deux mois après notre second mariage, Hyacinthe était enceinte.

– Vraiment ?

– Oui. Elle possédait tous les signes d'une potentielle grossesse : les nausées matinales, l'absence de ses menstruations, une fatigue continue et l'intolérance à certains aliments.

L'inconstance des SentimentsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant