Chapitre 2

69 9 7
                                    

Ils étaient en train de se disputer. Cela faisait déjà plusieurs mois qu'ils se querellaient pour la même raison.

« John, écoute-moi. Je sais que reconnaître une telle vérité serait accepter quelque chose d'encore plus terrifiant, mais s'il te plaît, crois-moi. » La voix de la jeune femme tremblait d'émotion, ses yeux suppliants fixés sur ceux de John. C'était un John plus jeune, sans barbe, sans les cernes marquées qui ornaient désormais son visage. Il l'observait, sa femme, avec un regard rempli d'amour. Oui, il était amoureux d'elle, depuis le moment où il l'avait vue pour la première fois, jusqu'au dernier instant passé ensemble.

Étrangement, un sourire se dessina sur les lèvres de John en réponse à ses paroles. Il répondit doucement : « Je te crois maintenant, Noémie.» Ce simple aveu la déconcerta. Elle avait passé des mois à tenter de lui faire accepter cette réalité. Son visage exprima soudain un soulagement immense, presque palpable. Noémie s'approcha lentement de lui, rapprochant son visage du sien. John sourit à l'avance, s'attendant au baiser qui allait suivre. C'était un geste si familier, si réconfortant, l'expression ultime de leur amour. Cependant, au moment où leurs lèvres allaient se toucher, elle disparut en cendres.

Le monde de John s'effondra. Une douleur vive, aiguë, déchira son cœur, comme si une lame invisible venait de le transpercer. Cette fois encore, tout comme la première fois, il sentit son cœur se briser en mille morceaux, chacun d'eux perçant son âme de douleur. C'était une douleur qu'il ne croyait pas possible de ressentir encore, une agonie qu'il revivait chaque nuit. Il aurait tout donné pour un dernier instant avec elle, pour sentir une fois de plus la chaleur de ses lèvres contre les siennes. Mais il ne restait d'elle que du vide, un espace cruel et froid, rempli d'un silence assourdissant.

Alors que la panique prenait le dessus, il chercha frénétiquement autour de lui, hurlant un autre nom dans une tentative désespérée de retrouver une raison de vivre, une raison d'espérer. « Ophélie ! » hurla-t-il, avant de se mettre à courir. Mais malgré tous ses efforts, il n'avançait pas. Au loin, une silhouette se dessina, celle d'une petite fille. Elle avait quelques traits semblables à ceux de John. Il courut de toutes ses forces, tendant la main, espérant que ce simple geste changerait quelque chose. Mais lentement, la petite fille disparut elle aussi en cendres.

Le vide laissé par la disparition de Noémie et Ophélie était insupportable, comme si on avait arraché son cœur de sa poitrine. Son esprit criait dans le silence, un cri de désespoir qui résonnait dans son âme. Il était seul, plus seul qu'il ne l'avait jamais été, confronté à un monde où son amour avait été réduit en poussière.

Instantanément, son corps se réveilla en sursaut. Comme chaque matin, John soupira profondément, hanté par un immense regret. Ce n'était pas ainsi que les choses s'étaient passées dans ses souvenirs. Dans ses souvenirs, il n'avait jamais dit à Noémie qu'il la croyait. Ce choix non exprimé, ce silence qu'il regrettait maintenant terriblement, le rongeait chaque jour un peu plus. Il se demandait, encore et encore, s'il aurait pu changer le cours des événements s'il l'avait écoutée jusqu'au bout.

Finalement, comme tous les matins, il se leva en soupirant, se dirigea vers la cuisine pour se préparer un café. Le breuvage chaud entre ses mains, il prit un moment pour se ressaisir avant de se préparer. Il enfila son masque, une pièce qui couvrait entièrement son visage. Le masque, d'une modernité tranchante, contrastait avec sa longue cape usée par le temps et les missions. Il semblait presque hors de place, comme un vestige d'un monde cybernétique, nouveau et immaculé, alors que tout le reste autour de lui portait les marques de l'usure et de la désolation.

John retrouva finalement son équipe à l'heure prévue dans la grande salle où ils s'étaient réunis la veille. Cette pièce imposante était ornée de divers blasons, vestiges d'un ancien monde révolu. Les blasons, aux couleurs fanées et aux motifs complexes, rappelaient les gloires passées et les royaumes disparus, créant un contraste saisissant avec l'austérité du présent. Cet endroit semblait être suspendu entre deux époques, un pont fragile entre l'ancien monde et le nouveau. La pièce, délibérément dépouillée de meubles, paraissait bien plus vaste qu'elle ne l'était réellement. Le vide résonnait avec les échos de conversations passées et présentes, les voix de son équipe réverbérant contre les murs de pierre froide.
John observa Itani, qui semblait en pleine forme, prête à affronter la journée avec l'énergie débordante qui la caractérisait. Comme à son habitude, lorsqu'elle était d'humeur joueuse, Itani ne pouvait s'empêcher de taquiner les autres, un signe d'affection dans son langage bien à elle. Et bien sûr, sa cible privilégiée n'était autre que Dona.

Ostru: Fragments d'un Monde DéchuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant