Chapitre 18

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L'homme était grand, imposant, ses épaules larges prenant presque toute la place dans la petite pièce délabrée. Il bombait le torse, se tenant face à celui qu'il haïssait du plus profond de son être. L'homme qui lui avait tout pris, qui avait détruit des vies par simple caprice, sans autre raison que son propre divertissement. Son cœur battait la chamade dans sa poitrine, mais il ne pouvait se permettre de montrer la moindre faiblesse. Il restait stoïque, droit, résolu. Il devait l'être, pour sa famille, pour lui-même, pour la justice qu'il espérait un jour rendre.

« Où est-il ? Réponds, sale merde. » crache l'homme face à lui, sa voix tranchante comme un coup de fouet. Le ton menaçant fit frissonner l'homme, mais il ne vacilla pas.

Autour d'eux, la maison portait les traces d'une fouille brutale. Tout ce qui avait un semblant de valeur avait été jeté à terre ou déchiré en morceaux. Une fine poussière s'élevait encore dans l'air, témoignant de la violence récente. La lumière filtrant à travers les fenêtres cassées n'était plus qu'un pâle rayon, noyé par la poussière et les éclats de verre. On aurait dit que Kaos avait retourné chaque coin, chaque placard, à la recherche d'un objet ou d'une vérité cachée.

« Va te faire foutre, Kaos. Tu as déjà détruit 70 % de la population, est-ce que ça ne te suffit pas ? Nous aurions dû faire confiance à nos rois, à ceux qui nous ont toujours protégés. Maintenant, tu peux me tuer, mais sache une chose : la génération qui suivra viendra à bout de toi. Ils feront ce que nous avons échoué à accomplir. On te détruira. » L'homme parlait avec une assurance surprenante. Sa voix était ferme, remplie d'une certitude presque sereine, bien qu'il sache qu'il faisait face à celui qu'on nommait désormais « le Grand Maître ».

Kaos haussa légèrement un sourcil, amusé par cette bravade. Un sourire glacial se dessina sur ses lèvres. « Je récupérerai cette lame, avec ou sans ton aide. Mais puisqu'il en est ainsi, je vais prendre mon temps. Ce serait trop facile de t'offrir une mort rapide. » Son ton était froid, sans une once de compassion, et chaque mot vibrait d'une violence contenue. Il attrapa violemment le visage de l'homme entre ses doigts, pressant avec une force dévastatrice sur ses joues, comme s'il allait les briser à mains nues. Ses yeux, sombres et sans pitié, se plongèrent dans ceux de sa victime.

Mais l'homme ne céda pas. Un sourire se dessina sur son visage. Un sourire ironique, presque triomphal. Son regard glissa lentement vers un placard derrière Kaos, un détail imperceptible que le maître fouisseur n'avait peut-être pas remarqué. Le sourire s'élargit. Il savait qu'il ne survivrait pas, mais il voulait que ce sourire soit la dernière image gravée dans l'esprit du Grand Maître.

Dans le placard sombre, à peine éclairé par les faibles lueurs qui filtraient à travers les planches mal ajustées, un petit garçon, aux cheveux noirs comme la nuit et aux yeux orangés perçants, observait la scène. Aster serrait contre lui sa sœur jumelle,  ses bras frêles tentant de la protéger du spectacle terrible qui se déroulait devant eux. Elle tremblait, enfouissant son visage contre sa poitrine, ignorant les murmures d'horreur qui émanaient du cœur même de la maison. Aster, lui, ne pouvait détacher ses yeux des fines ouvertures du placard, forcé de regarder, incapable de se détourner. Son souffle était court, irrégulier, et sa gorge nouée par l'angoisse.

Devant eux, leur père, le visage marqué par la douleur, faisait face à Kaos. Le Grand Maître avait saisi son visage avec une brutalité glaciale, et il s'amusait à le briser lentement. Le rire cruel de Kaos résonnait dans la pièce, chaque éclat de rire vibrant comme une lame dans les oreilles d'Aster. Son père, pourtant, ne criait pas. Il refusait de donner cette satisfaction à son bourreau. Ses traits, déformés par l'agonie, gardaient un masque de dignité, son regard fièrement fixé sur Kaos malgré la souffrance qui le dévorait.

Ostru: Fragments d'un Monde DéchuOù les histoires vivent. Découvrez maintenant