Ostru: Fragments d'un Monde Déchu

Chapitre 39

« Comme si le destin lui-même ne voulait pas nous séparer... à tel point qu'il nous a envoyés tous les deux dans la même mission, » déclara le jeune Nim, sa voix douce, pleine d'espoir et de tendresse. Elle résonnait différemment de la voix dure et cynique qu'il avait développée avec le temps. À cette époque, elle était imprégnée d'un amour profond, un amour qu'il croyait indestructible.

À ses côtés, la jeune femme à qui il avait promis de l'épouser se tenait droite, belle et sereine. Elle n'avait pas besoin de répondre à ses paroles. Son sourire, simple et lumineux, suffisait à dire tout ce qu'il fallait. C'était leur premier pas dans le monde dangereux des missions. Ils n'avaient que vingt ans, si jeunes, et pourtant déjà plongés dans la réalité des combats pour la survie des autres.

Pour Nim, c'était le début d'une carrière qu'il rêvait glorieuse. Il s'imaginait déjà devenir un Counter, l'un des défenseurs les plus puissants de ce monde. Sa magie, sa force, tout cela serait utilisé pour protéger les innocents, pour être ce héros dont il rêvait depuis son enfance. Il était déterminé à faire de son rêve une réalité. Et dans son cœur, cet objectif n'avait qu'une seule motivation : elle.

Elle avait toujours cru en lui. Elle l'encourageait à poursuivre cette quête de pouvoir et de grandeur. Ensemble, ils deviendraient invincibles, se disait-il. Ils seraient unis par leur force, leur amour serait inébranlable. S'ils devenaient assez puissants, pensait-il, rien ne pourrait jamais menacer ce qu'ils avaient construit. Ils seraient au-dessus de tout danger, de toute menace. Personne ne pourrait briser leur lien.

Chaque décision qu'il prenait, chaque rêve qu'il nourrissait, était animé par cet amour profond. Il vivait pour elle, chaque instant dédié à la rendre fière, à construire ce futur qu'ils s'étaient promis. Son cœur battait pour elle, son âme lui appartenait, et tout ce qu'il voulait, c'était que leur amour soit éternel, à l'abri de la cruauté du monde.

Cependant, Nim n'avait pas réussi à trouver un abri à temps, ni pour elle, ni pour eux. Ce qui avait été un paysage magnifique, baigné par la lumière dorée d'un soleil couchant, une mer douce caressant la côte, avait changé en un instant. Ce qui lui semblait être un rêve, rempli de rires et de promesses, s'était rapidement mué en cauchemar. Elle n'était plus là, à sourire et à partager ces moments. À présent, elle gisait devant lui, son corps brisé, défiguré par la violence qui avait frappé si soudainement.

Le monde autour de Nim s'était effondré. Le ciel, autrefois bleu et paisible, était maintenant couvert de ténèbres. L'air salé et frais de la mer semblait alourdi par la douleur. Il s'agenouilla auprès d'elle, incapable de croire à ce qu'il voyait, ses mains tremblantes soulevant son corps inerte avec une délicatesse désespérée. Chaque fibre de son être espérait, priait pour qu'elle ouvre les yeux, pour qu'elle respire à nouveau. Il murmurait des prières, de petites suppliques presque inaudibles, comme si son amour et ses mots pouvaient la ramener à la vie.

Comment tout cela avait-il pu si vite virer au cauchemar ? Ils ne devaient qu'emprisonner un Rodeur libre. C'était censé être une mission simple, un exercice ordinaire. Comment un homme qu'il considérait comme l'un des leurs, un frère d'armes, avait-il pu trahir ainsi ? Comment ce Rodeur avait-il pu abattre froidement la femme qu'il aimait ? Ces questions tournaient dans l'esprit de Nim, mais rien n'avait plus de sens. La tristesse le consumait, mais bientôt, une autre émotion, bien plus forte, bien plus insidieuse, commença à prendre le dessus : la haine.

La douleur de la perte se transformait en rage, brûlant dans ses veines comme un poison. Nim savait alors ce qu'il devait faire. Pour elle, il deviendrait un Counter. Pour elle, il atteindrait le sommet, et il se vengerait de tous ceux qui avaient fait partie de ce chaos. Sa promesse était silencieuse, mais elle résonnait dans son cœur brisé, tandis qu'il serrait son corps sans vie contre lui, la pluie se mêlant à ses larmes qu'il refusait de laisser couler. Son regard, voilé de vengeance, se tourna vers l'homme qui avait tout détruit.