Chapitre 29

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"Je suppose que le message n'est pas bien passé, la dernière fois ?"

Patte Givrée scrutait Faucon, les yeux plissés, la queue fouettant l'air. Il avait osé revenir. Elle avait repéré son odeur en allant chasser, et l'avait suivie. Ce solitaire commence à dépasser les limites, se dit-elle. Oser revenir sur le territoire du Clan du Tonnerre après notre dernière rencontre ! Cette fois, c'était la bonne. Patte Givrée s'était promit de le chasser définitivement. Pas de plaisanteries, pas de discussions inutiles. Juste une confrontation, rapide et décisive. Ses griffes s'enfoncèrent dans le sol alors qu'elle resserrait ses muscles, prête à bondir s'il le fallait.

Et pourtant, Faucon ne semblait nullement impressionné. Il était là, allongé nonchalamment sur un rocher, profitant du soleil encore doux du matin. Dès qu'il remarqua la présence de la guerrière, il se redressa, comme s'il était content de la revoir.

"Tiens donc, la chasseuse de renard qui n'a pas besoin d'aide. Tu reviens pour enfin me remercier ?"

Quel toupet, se dit la guerrière, se figeant un instant. S'il n'avait pas une carrure aussi imposante qu'un blaireau, elle lui aurait sauté à la gorge.

"Ne t'emballe pas. Je viens te demander pour la dernière fois de quitter notre territoire.

- Vraiment ? Je te dérange tant que ça ? Pourtant, je suis plutôt doué pour passer inaperçu.

- Peut-être que je devrais te montrer à quel point je suis douée pour te faire disparaître. Va-t-en d'ici.

- Eh bien, j'ai hâte de voir ça, fit-il en ouvrant grand les yeux, faussement impressionnée.

- Non, je ne pense pas, siffla Patte Givrée en s'approchant d'un pas raide. Nous sommes entraînés pour affronter des guerriers, les parasites en ton genre ne sont pas un obstacle.

- Si tu veux mon avis, après ce que j'ai vu l'autre jour, il vaudrait mieux vous entraîner à affronter des renards. C'est ce qui nous différencie, toi et moi."

Sans pouvoir se retenir davantage, Patte Givrée feula, les oreilles couchées en arrière, et bondit sur le rocher de Faucon, qui eut un mouvement de recul instantané.

"Bon d'accord, excuse-moi, miaula le matou sombre en prenant un air inhabituellement sérieux. Tu as raison, j'arrête avec cette histoire de renard. Ça arrive à tout le monde d'être surpris, surtout quand on a la tête ailleurs. Une fois, avec mon fr..." Il s'arrêta, se figeant, comme s'il réalisait ce qu'il était sur le point de dire. "Pardon, je me doute que tu n'as pas très envie d'entendre parler de lui...

- Je n'ai pas envie d'entendre parler de toi non plus. Je t'ai demandé de partir.

- J'ai bien entendu. Mais pourquoi je partirais alors que je ne connais même pas ton nom ?

- Quelle importance ? rugit-elle, montrant les crocs. Tu es sur le territoire du Clan du Tonnerre, n'importe lequel de nos guerriers pourrait te mettre en pièce. Que gagnes-tu à rester là comme si tu étais chez toi ? À toi de choisir : tu peux partir maintenant, digne et indemne, ou rester, et repartir plus tard avec une ou deux oreilles en moins."

Pendant un instant, Patte Givrée pensa l'avoir réellement impressionnée. Faucon ouvrit la bouche, sans répondre, puis agita les oreilles nerveusement. Et pourtant, il ne bougea pas d'un poil. La femelle aurait voulu l'attaquer, mais sa stature imposante l'inquiétait. Si on se bat, il y a peu de chance que je l'emporte, observa-t-elle, mal à l'aise. Et soudain, Faucon baissa la tête en soupirant, comme s'il capitulait.

"Tu veux vraiment savoir ? demanda-t-il en enroulant la queue autour de ses pattes. Je voulais rester dans le coin pour m'assurer que Moustique ne revienne pas. Il est capable de revenir se venger, je le connais. Et je me suis dis... Que tu n'aurais pas envie de le croiser par hasard. Mais je ne comptais pas rester éternellement, rassure toi."

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