Chapitre 73 : Survie

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Un silence pesant régnait, brisé seulement par les bruissements de la jungle et le bourdonnement incessant des insectes. Je pris une inspiration tremblante avant de me mettre en marche, lentement, prudemment, chaque pas s'enfonçant dans une terre meuble et spongieuse. L'humidité collait à ma peau, alourdissant mes vêtements déjà détrempés de sueur. L'air était si saturé de chaleur et d'odeurs végétales que chaque respiration me donnait l'impression d'aspirer la moiteur même de cet endroit.

Sous mes pieds, le sol boueux avalait mes traces, comme si la jungle voulait effacer mon passage. À chaque mouvement, une myriade d'insectes invisibles vrombissait autour de moi, s'approchant juste assez pour effleurer ma peau avant de disparaître dans l'épaisse verdure. Certains piquaient, d'autres semblaient simplement curieux, mais tous formaient une présence constante, un avertissement vivant que cette forêt appartenait à autre chose, à quelqu'un d'autre.

Une goutte de condensation, lourde et glacée, tomba d'une feuille au-dessus de moi et s'écrasa sur mon épaule. Je sursautai, réalisant à quel point j'étais tendu. Je n'avais jamais rien connu de semblable.

Il faut que je trouve de l'eau tout d'abord.

Je me forçai à ignorer l'inconfort et tendis l'oreille, cherchant un indice auditif dans ce chaos organique. Un ruisseau, une cascade, n'importe quoi qui signifierait une source d'eau potable. Mais au lieu de cela, mon ouïe ne captait qu'un mélange de bruissements, de sifflements lointains et de craquements suspects, comme si quelque chose—ou plusieurs choses—bougeaient entre les feuillages sans jamais se montrer.

Je déglutis difficilement et continuai à avancer.

Puis, au bout de ce qui me parut une éternité, un grondement sourd se fit entendre, à peine perceptible au début. Un bruit constant, vibrant, lointain... mais réel.

Une rivière ?

Mon rythme cardiaque accéléra sous la soudaine montée d'adrénaline. C'était un point d'ancrage, une certitude dans cet enfer de verdure inconnue. Sans attendre, j'orientai mes pas dans cette direction.

L'environnement autour de moi sembla se refermer à chaque pas, comme une bête resserrant ses griffes sur une proie insouciante. Les troncs se rapprochaient, leurs écorces rugueuses hérissées d'épines ou recouvertes de mousses épaisses qui libéraient une odeur aigre sous mes doigts. Des lianes épaisses pendaient du haut des arbres, certaines semblant s'animer sous mon passage, comme si elles guettaient le moindre faux pas.

Le sol n'était pas plat. Chaque avancée était un défi. Des racines noueuses surgissaient à des endroits inattendus, m'obligeant à lever haut les jambes pour éviter de trébucher. À plusieurs reprises, mon pied se posa sur une surface traîtresse, s'enfonçant soudainement dans un tapis de végétaux détrempés. Mon équilibre vacilla, et je dus me rattraper de justesse à une branche voisine.

Un froissement. Juste derrière moi.

Je me figeai.

Le souffle court, je tournai lentement la tête.

Rien.

Rien d'autre que l'ombre mouvante des feuillages, animée par la légère brise qui s'infiltrait entre les troncs. Mais je le sentais. Cette présence invisible. Quelque chose d'indéfini, de furtif. Une menace tapie juste au-delà de ma vision.

Ma gorge se serra.

Je ne connais rien ici.

Tout était inconnu. Chaque plante, chaque bruit, chaque odeur pouvait être un danger que j'ignorais. Je ne savais pas quelles feuilles étaient vénéneuses, quels fruits étaient comestibles, quels animaux m'épiaient en ce moment même. Dans une forêt ordinaire, je pouvais au moins me fier à mon instinct, à des repères logiques... mais ici ? Rien. Pas un seul point de référence.

Le Destin d'Aëdan [Original Story]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant