Le Destin d'Aëdan [Original Story]

Chapitre 56 : La force d'une déesse

L'auberge des Sommets, autrefois joyeuse et animée, était méconnaissable. Une chape de plomb semblait peser sur le bâtiment, et l'air vibrait d'une tension palpable. Des gardes en armure noire, le visage dissimulé derrière des heaumes menaçants, montaient la garde devant l'entrée, leurs épées scintillant à la lueur des torches. À l'intérieur, des éclats de voix et des rires gras trahissaient la présence des hommes de Fläme. Styx et moi échangeâmes un regard déterminé. Il était temps de passer à l'action.

D'un mouvement fluide, Styx leva la main, et une vague d'énergie obscure s'abattit sur les portes de l'auberge, les faisant voler en éclats. Le bois se brisa avec un craquement sinistre, et les gardes furent projetés en arrière, surpris par la violence de l'attaque. Des cris d'effroi et des jurons retentirent dans la nuit, tandis que la panique s'emparait des occupants de l'auberge. Profitant de la confusion, nous nous précipitâmes à l'intérieur, semant le chaos sur notre passage.

L'auberge était plongée dans une semi-obscurité, seulement éclairée par quelques bougies qui vacillaient sur les tables. L'air était épais et saturé d'une odeur de sueur, d'alcool et de peur. Des hommes en armes se ruaient vers nous, brandissant leurs épées et leurs haches. Je dégainai mon épée, parant les coups avec une agilité que je ne me connaissais pas. L'acier s'entrechoquait dans un concert de métal et de fureur. Styx, elle, était une véritable furie. Sa faux tournoyait autour d'elle, traçant des arcs de cercle mortels. Les ennemis tombaient les uns après les autres, fauchés comme des blés.

Nous progressions dans l'auberge, frappant à droite et à gauche, cherchant désespérément un indice, un signe qui nous mènerait à Sylthis et Daemon. Chaque noble que nous croisions était soumis à un interrogatoire expéditif. La peur se lisait sur tous les visages. Certains tentaient de fuir, trébuchant sur les corps qui jonchaient le sol. D'autres se terraient dans les coins, les mains levées en signe de soumission, implorant notre pitié. Mais aucun ne semblait savoir où étaient détenus nos amis.

« Par les dieux, où sont-ils ? », rugis-je, exaspéré.

Soudain, mon regard se posa sur un homme corpulent, vêtu d'une riche tunique brodée d'or. Il se tenait près du bar, tremblant comme une feuille, le visage blême et les yeux hagards. Je me précipitai vers lui, le saisissant par le col.

« Toi ! », hurlai-je. « Tu sais où ils sont, n'est-ce pas ? »

L'homme, terrorisé, balbutia quelques mots incompréhensibles. Je resserrai mon étreinte, et il finit par cracher le morceau, la voix étranglée par la peur : « Le manoir... En bordure de la ville... Le manoir de Camilla... »

Sans perdre un instant, nous nous précipitâmes hors de l'auberge, laissant derrière nous un spectacle de carnage. La nuit était noire, sans lune, et le vent soufflait en rafales, portant avec lui l'odeur âcre du sang et de la mort. Nous courûmes à travers les rues désertes, guidés par la rage et l'espoir.

J'avais déjà du sang sur les mains. Chaque combat, chaque affrontement, me rapprochait un peu plus de la bête que je redoutais de devenir. Est-ce le prix à payer pour sauver ceux que j'aime ? Sylthis et Daemon m'attendaient quelque part, seuls, vulnérables. Si je laissais mes doutes m'enchaîner, ils mourraient.

J'inspirai profondément, ancrant mes pensées dans une seule certitude : je ne les abandonnerai pas.

Le manoir de Camilla, une bâtisse imposante et sinistre, se dressait au milieu d'un parc sombre et désert. Des arbres aux branches tordues semblaient se pencher sur le manoir, comme pour l'étreindre dans leurs griffes. Un mur d'enceinte, surmonté de pics acérés, entourait la propriété. Nous escaladâmes le mur avec agilité, nos muscles tendus par l'effort. Des gardes patrouillaient autour du manoir, mais nous parvînmes à les éviter, profitant des ombres et du silence de la nuit.