Le Destin d'Aëdan [Original Story]

Chapitre 78 : Retour sur For'Mor

Le vent soufflait avec une froideur inhabituelle sur For'Mor, chassant dans les ruelles des cendres grises et des détritus oubliés. La ville n'avait plus rien de la fourmilière chaotique et oppressante que j'avais quittée. C'est bien vide, songeai-je inquiet.

Je plissai les yeux en longeant l'artère principale. Autrefois grouillante de marchands et de voleurs à la tire, elle n'était plus qu'une succession de bâtiments calcinés et d'échoppes abandonnées. L'odeur de suie et de chair putréfiée flottait encore dans l'air, vestige de la bataille qui avait eu lieu ici.

L'alliance entre Umbraxis et Aether n'avait pas suffi.

Ils avaient perdu.

Et l'ombre du vainqueur planait encore sur la ville.

Targal.

J'avais entendu parler de sa sauvagerie, vu de mes propres yeux ce dont il était capable. Mais voir les ruines qu'il avait laissées derrière lui me confirmait une chose : il n'avait pas seulement gagné. Il avait écrasé toute résistance. For'Mor n'était plus qu'un cadavre encore tiède sous sa botte.

Je marchai dans la rue principale, le regard scrutant les visages effrayés des rares survivants qui osaient encore errer dehors. La plupart évitaient de me regarder, d'autres se recroquevillaient sur leur passage, murmurant entre eux des paroles que je ne parvenais pas à saisir.

« Bordel, cette ville pue la mort, » grogna Daemon, trottinant à mes côtés. On dirait qu'un foutu charognard s'est installé ici et a décidé d'y faire son nid.

— C'est à peu près ça, » soufflai-je.

Un bruissement d'étoffe attira mon regard. Styx avançait légèrement en retrait, observant les ruines avec une neutralité glaciale. Son expression était impassible, mais je connaissais maintenant assez bien la déesse pour savoir qu'elle analysait chaque détail, mémorisait chaque trace du carnage.

« Le chef d'Aether, » murmurais-je. Mort, n'est-ce pas ? »

Daemon hocha lentement la tête.

« Vu l'état de la ville, je suppose que oui. Mais ça ne coute rien d'essayer de retrouver des survivants. Aremya peut-être... »

Je serrai la mâchoire.

« Tu as raison, je vais demander là-bas », déclarai-je en désignant une échoppe un peu plus loin.

Un silence pesant s'installa. Je m'arrêtai devant un marchand installé sous un auvent en lambeaux. Il empilait nerveusement quelques sacs de grains, jetant des regards furtifs autour de lui comme s'il craignait que la moindre ombre l'égorge.

« Aremya, est ce que... » commençai-je simplement.

Le marchand se figea.

Puis, sans un mot, il ramassa ses affaires et disparut dans une ruelle adjacente.

Je soupirai.

« J'imagine que ça veut dire non, » commenta Daemon avec un sourire moqueur.

Je me tournai vers un autre passant, un homme maigre aux vêtements en loques.

« Aremya, » répétai-je.

Il blêmit, fit aussitôt demi-tour et détala comme un lapin.

Je jurai intérieurement. Le simple nom d'Aremya suffisait à glacer d'effroi les habitants de cette ville. Ce n'était pas bon signe.

Styx croisa les bras.

« Tu n'avanceras pas comme ça. Ils sont trop terrifiés. »

— Et on fait quoi alors ? » s'impatienta Daemon.