Chapitre 14

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Prise de panique, je courus à l'autre bout de la pièce en criant. Je ne pouvais pas croire que Bulgador, cette créature démoniaque et répulsante (bon, j'avoue, j'exagère un peu, adjectivement parlant...) se trouvait encore devant moi! Ses yeux au regard dur et enflammé et sa peau foncée digne d'un elfe noir me firent répulser une envie de vomir.

- Toi...! dis-je en le fusillant du regard.

Bulgador entra par la fenêtre et commença tranquillement à marcher dans ma direction pendant que je tentais de passer pas la porte, qui était barrée. Je ne savais pas qu'il y avait un loquet à cette porte! Ou alors était-ce Bulgador qui faisait en sorte que je ne pouvais pas l'ouvrir?

- Aël! Où es-tu? Viens m'aider! mécriai-je en espérant que celui-ci m'entendrait.

- Il n'est pas en mesure de t'aider, dit mystérieusement l'elfe noir qui était à présent tout près de moi.

Je cessai de courir pour lancer un regard interloqué et effrayé à Bulgador. Qu'avait-il fait à Aël? En y réfléchissant bien, mon ami était posté près de la fenêtre en attendant que j'aie fini de me changer. Par la même fenêtre pas laquelle Bulgador est entré. De plus, Aël n'avait pas crié ni quoi que ce soit, alors se pourrait-il que...?

Bulgador profita de ma perte de concentration pour me saisir. Je me débattis, mais en vain. Il était bien trop fort pour moi. Je continuais d'hurler pour de l'aide, toujours avec autant de décibels. Mais pourquoi est-ce qu'il n'y avait personne qui venait à ma rescousse?

- Ça ne sers à rien d'hurler, personne ne va t'entendre, expliqua Bulgador, qui avait lu mes pensées. J'ai lancé un sortilège pour empêcher le bruit de sortir de cette maison. J'ai aussi barré la porte et la fenêtre, alors tu ne pourras sortir. Je sais, je sais, je suis tellement intelligent, inutile de me faire des éloges! dit-il machavéliquement.

Je ne pu que lui lancer un regard pourvu de dégoût comme répondre. En tout cas, au moins, je sais ce qu'il voulais dire par "Aël n'est plus en mesure de t'aider". Il va bien, c'est juste qu'il ne sait pas ce qui m'arrive et ne peut pas rentrer. Ouf.

Bulgador me reposa au sol, sachant que je n'essaierai plus de sortir. Il me ligota, toutefois, pour être certain que je ne pourrais rien faire ( ou bien, en fait, ça pourrait très bien être pour une autre raison, mais je ne peux me fier qu'à mon intuition, puisque je ne suis toujours pas capable de lire les pensées de Bulgador). Je ne me débattis pas trop, déjà si épuisée. Je le jauguai du regard avant de prononcer ces paroles:

- Que veux-tu? Me tuer? Pour quoi faire? Ce n'est pas comme si je serais en mesure de te tuer, toi, avec cette corde! D'ailleurs, si tu tiens tant à en finir avec moi, pourquoi ne l'as-tu pas fais lorsque tu en avais la chance? Et, désolée, mais ça a été un peu trop facile pour moi de m'évader. Sois je suis super forte et discrète -ce que je doute-, sois tu est stupide et faible. C'est laquelle des deux possibilités qui est arrivée?

Je repris mon souffle après ce long monologue remplis de sentiments refoulés. Là, désormais incapable de s'en empêcher, l'homme à qui j'avais dit tout cela se mît à rire comme un fou.

- Je ne vois pas ce qu'il y a de drôle, dis-je, vexée et en tournant la tête pour que je n'aie pas à le voir rire de moi.

- Ce qui me fait rire, c'est à quel point tu es à côté du bateau! dit Bulgador en se calmant un peu. Non, ce n'est pas parce que tu es forte ou que je suis faible, que tu as pu t'enfuir, c'est parce que je t'ai laissée le faire!

Je me tournai en sa direction, complètement confuse et perplexe.

- Quoi...? Tu m'as laissée partir? Mais c'est complètement idiot! Puis-je savoir pourquoi?

J'ai l'impression de devenir un peu trop familière avec la personne qui m'a kidnappée... disons... une fois et demi. Je ne devrais pas le tutoyer? (Même si j'ai parfaitement raison de le faire, puisqu'il ne semble être que dans la vingtaine... En tout cas... Je bifurque du sujet.)

- Le fait est que, en réalité, je n'ai jamais eu la moindre intention de te tuer, murmura-t-il.

Il eut encore droit à une expression abasourdie de ma part. Ce qui eut comme effet de le faire éclater de rire encore une fois. Soupir.

- Bon, je t'explique tout, Anita. Comme je te l'avais déjà dit, je voulais faire de toi mon alliée, pour que tu m'aide dans mon but de tuer les elfes verts. Toutefois, je n'étais pas encore certain de l'ampleur de ta puissance. J'avais décidé de te faire passer un dernier petit test pour voir ce qu'il adviendrait. Résultat des courses: je t'ai besoin. Tu es très forte.

Il avait prononcé les deux dernières phrases en s'approchant un peu plus de moi. Nos visages n'étaient qu'à, disons, 15 centimètres l'un de l'autre, et ça, je dois vous dire, ça me dégoûte.

- Et toi, tu as la même réponse de ma part: non, je ne t'aiderai pas. C'est plutôt le contraire. Mais sache que je sais à présent ce qui est arrivé aux tiens, et j'en suis désolée. Pour le fait que les elfes verts qui ont tué les elfes noirs. J'en ai honte, même, mais on ne peut pas changer le passé. Je ne sais pas exactement comment c'est, ressentir le sentiment de haine qui te consume, mais je sais que la vengeance n'aboutit à rien. R. I. E. N.

- Évidemment que tu me dis que ça ne sera à rien la vengeance, tu n'as jamais ressenti le désir de venger les siens! s'emporta Bulgador. J'avais une vie heureuse, avant! Une famille! Des amis! Je n'aurais jamais dû partir à la chasse ce jour-là! J'aurais dû être là pour protéger mes enfants de ces elfes verts qui les ont tués sans pitié! Ce n'aurais pas dû être moi, le survivant! Depuis, je ne sais même plus si je suis encore sain d'esprit, je ne pense qu'à tuer ceux qui ont éliminé les miens!

Je fus choquée par les révélations de cet homme aux yeux rouges. Et je me pris à ressentir de la pitié. Il était jadis un homme comme tout autre, mais il a tout perdu... Et c'est cette perte qui l'a mené à la folie, à ce désir de tuer tous des ennemis... Je ne peux pas dire que j'approuve ce que Bulgador fait, loin de là, mais je ressens de la compassion. J'aimerais l'aider.

- Je comprends que tu sois attristé par la mort des tiens... mais... tuer mon clan ne changera rien, tu sais. Ça ne ramènera pas ta famille à la vie.

- Ça, c'est ce que tu crois... dit Bulgador en esquissant un sourire victorieux. Je te montrerai! Je te montrerai de quoi je suis capable! En effet, je...

Au moment même où Bulgador allait dire ce que, je le sentais, était crucial, Aël cria à travers la porte en cognant:

- Anita! dit-il, inquiet. Tu vas bien? Qu'est-ce qui t'arrive? Pourquoi ne réponds-tu pas? Ouvre!

Bulgador jeta un regard neutre vers moi et en disant:

- On se reverra...

Puis il disparut en me laissant là, toute seule, avec mes pensées qui tourbillonnaient dans ma tête.

Il faut que je fasse quelque chose...

De nature elfiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant