Chapitre 37

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Nous étions garés devant chez moi, Alice, Balto et moi. Nous avions emprunté la voiture de Greg, et par la même occasion son chauffeur, Bob. Il était comme d'habitude, habillé dans un costume noir sur une chemise blanche et restait silencieux.

J'étais incroyablement stressée. J'avais peur de ce que j'allais découvrir ou de la manière dont cet entretien allait se dérouler. J'avais peur qu'une dispute éclate et nous déchire. C'était stupide. Après tout, il ne tenait qu'à moi d'apaiser les tensions, de faire en sorte que nous ne nous emportions pas. Mais je savais très bien que ma mère et moi étions pareilles: impulsives.

Je sortis de la voiture, encouragée par les paroles réconfortantes d'Alice et Balto. Il faisait ensoleillé mais frais en ce lundi matin. Il était 8h20, et j'espérais croiser ma mère avant qu'elle ne parte travailler.

Je sortis mes clés de ma poche, enfonçai la bonne dans la serrure et la tournai. Tout était calme dans le hall, et je rentrai en essayant de ne pas perturber cette sérénité. Après quelques secondes, j'entendis du bruit dans la cuisine. Je serrai mon sac contre moi et pris une grande inspiration pour me donner du courage, avant de pénétrer dans la pièce.

- Salut, dis je timidement en voyant ma mère boire d'une traite son café.

Elle me fit signe d'attendre, et continuai à avaler sa boisson toute en regardant sa montre. Elle portait un chemisier en satin violet, accordé d'un tailleur-jupe noir et d'escarpins vernis assortis.

- Tu n'as pas école? demanda-t-elle immédiatement en haussant un sourcil. Je croyais que tu partais de chez Charlie.

- Vacances de Toussaint, répondis je. Moi aussi, j'avais oublié.

Elle hocha la tête avant de mordre dans un Sultana.

- Maman, il faut que je te parle...

Elle mâcha rapidement, et prit une autre bouchée.

- Ce soir, d'accord? Je suis pressée, je dois aller au travail.

Elle m'embrassa sur le front, sans remarquer à quel point j'étais tendue, et se dirigea vers le hall.

- Maman! Pose tes clés! criai je en la suivant.

Elle me regarda tout en prenant son parapluie.

- Chérie, je suis sûre que ça peut attendre... Je rentre tôt ce soir, vers 18h30. On commandera chinois et tu m'expliqueras tout, ok?

Elle n'attendit pas ma réponse, et je compris que si je voulais capter son attention, je devais taper fort.

A peine ma mère avait elle ouvert la porte que je pris la parole.

- Je sais que tu es une sorcière.

Ma mère, qui était dos à moi, se figea. Ses clés glissèrent de ses mains et s'écrasèrent au sol. Lentement, elle se tourna vers moi, la bouche entrouverte et la mine affligée.

- Je t'attends dans le salon. Je pense que ton travail peut attendre.

Et sans rien ajouter, j'allai m'asseoir dans un fauteuil, soufflant un grand coup. C'était fait. Je lui avais dit. Le plus dur était derrière moi.

J'entendis la porte se refermer doucement, et ma mère entra bientôt dans la pièce, le visage pâle, les yeux dans le vague. Elle s'installa à son tour, gardant une certaine distance entre nous. Et tant mieux.

-Comment tu l'as su? demanda-t-elle enfin, mettant fin au supplice du silence.

Nous nous fixions droit dans les yeux. Aucune de nous deux ne semblait prête à détourner le regard quand je baissai enfin la tête, pour sortir de mon sac les lettres de ma mère et de mon père. Je les lui tendis et ma mère les prit du bout des doigts. Elle parcourut les documents rapidement, excepté les lettres venant de mon père, où elle s'attarda plus longtemps, les découvrant au fil de sa lecture. Quand elle releva les yeux vers moi, ils étaient embués.

SortilègesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant