— Excuse-moi Eddy, je ne voulais pas te réveiller. Je m'excuse, pardon. Rendors-toi, je sors juste.
Le publicitaire ne comprit pas tout de suite la situation, il ne savait pas où on l'avait emmené. Peut-être que pendant qu'il humiliait le PDG de la boîte, Georges et Thomas s'étaient faufilés derrière lui, l'avait assommé puis kidnappé ? On l'avait drogué. Son ventre le brûlait affreusement et son crâne menaçait d'exploser. Ses paupières se refermaient à chaque fois qu'il essayait de les ouvrir à cause de la lumière qui était trop forte. Il voulut tout de même communiquer.
— Qui êtes-vous ? prononça-t-il avec la voix d'un ancêtre à cause de sa gorge asséchée.
— Oh, personne de bien important. Je... je suis le facteur, répondit une voix trop peureuse pour être menaçante.
Eddy s'imaginait que dans des gangs, avant de devenir de gros durs, les nouvelles recrues devaient passer par certaines étapes périlleuses. Il espérait être tombé sur l'un de ces amateurs.
— Ah bon ? Y a-t-il de bonnes nouvelles ce matin ? lança naïvement le publicitaire pour gagner du temps. Il en avait besoin pour habituer ses yeux à l'éclat de la lampe et identifier le lieu de sa détention.
La première chose qu'il vit, ce fut un papier-peint marron de très bon goût. Ce n'était pas le genre de marron clair qu'on mettait dans une cave, premier indice positif. A vrai dire, c'était le genre de marron clair qu'il aurait choisi en décoration pour une entrée d'appartement. En fait, Eddy était chez lui. Il reçut l'information de plein fouet, respira en sursaut et se donna des claques pour éradiquer les mirages de beuverie. "Mais alors, c'est qui ce facteur ?" se demanda-t-il en hâte.
— Jean-Yves ! Espèce d'enculé, qu'est-ce que tu fous encore là ! hurla Eddy.
Il se rendit compte qu'il avait dormi, le corps affalé contre la porte d'entrée, et comprit que ce coup derrière la tête qui le réveilla avait été causé par cet idiot qui continuait de tirer sur la poignée. Quand il se releva pour lui tordre le cou, l'intrus réussit à sortir in extremis. Il dévalait déjà les escaliers de l'immeuble, il était déjà hors d'atteinte.
— Je sais où tu habites gros lard, je vais étouffer tes mômes dans leur sommeil ! cria-t- il par-dessus la rambarde.
Plusieurs voisines de paliers, poussées par leur instinct maternelle, sortirent de leur habitation pour émettre des "oh !" d'irritation.— Rentrez chez vous vieilles biques, ou je m'en prends aux vôtres.
Eddy rentra lui-même chez lui, et ne put retenir une cascade de vomi qui souilla le beau papier-peint. Sa femme débarqua en nuisette, baillant la gueule grande ouverte. Elle contempla avec indifférence le résultat.
— C'est ce que tu fais de ma blanquette ?
— C'est ce que tu fais de notre mariage ? s'étrangla l'époux choqué qu'elle parvienne encore à lui faire des reproches.
— Il a dormi sur le canapé, il n'a pas pu partir parce que tu bloquais la porte, expliqua- t-elle en se grattant gracieusement l'entre-jambe.
Eddy imaginait la grosse main velue de J-Y à la place de celle d'Mathilde, avec de petits acariens qui sautillaient vers son sexe de princesse. Il balaya cette image en secouant la tête, puis reprit le débat.
— Ça n'a pas eu l'air de le déranger là. Il m'a dégommé le crâne pour passer !
— Il est midi passé, il n'allait tout de même pas habiter ici ! s'impatienta sa femme. Elle le surplombait, lui qui à terre, expulsait d'ignobles flatulences. Il lui était difficile de le considérer avec respect.
— Quoi ?! Midi passé ? Chiotte, il faut que je file ! dit-il en attrapant son manteau et ses affaires de bureaux.
— Et qui va nettoyer cette merde Eddy ? Eddy ! hurla une Mathilde exaspérée.
— Tu n'as qu'à faire venir un voisin ! lança l'époux déjà loin.count�}JN�6
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Tomber de bas ( Terminė)
AventuraPeter et Théophile ont touché le fond. Le genre de trou ténébreux qu'on ne remonte pas avec une échelle, mais bien en utilisant son cerveau. Un brin de courage peut aider, mais est-ce suffisant ? Il va falloir se salir... Terminé, pas de modifs en v...