Broken - Tome 1 ( En réécriture )

T R E N T E - N E U F [Deux notes à la fin]

Lexie

Je rentre chez moi, le pas léger et le cœur serré dans ma poitrine. J'essaie de contenir le feu grandissant dans mon ventre, la vague intense et grisante qui m'empêche de réfléchir correctement. Si j'avais su, depuis tout ce temps, qu'Evan et moi finirions par se retrouver de cette manière, je n'aurais absolument rien changé. D'une certaine façon, j'aime ce que nous sommes. La représentation parfaite du pas entre la haine et l'amour, même si avant lui, je ne savais même pas ce que c'était. Est-ce que je le sais, de toute façon? Est-ce qu'aimer, c'est réellement ce que m'a toujours dis ma mère? Est-ce que c'est vraiment l'action de tout donner à celui qu'on aime? Parce que jusque là, je ne le ressens pas de cette manière. Je ne le ressens même pas comme une action, d'ailleurs. J'ai longtemps cru aimer Dave, mais maintenant, je vois que tout ce que j'ai cru savoir sur l'amour était faux. Je remets sans cesse en question les propos de ma mère, de mon père, de tous mes proches... Je remets en question la définition qu'Internet en fait, représentant le concept comme un vulgaire sentiment d'attachement. Je ne sais pas si c'est ce que je ressens réellement pour Evan, mais qu'il soit plus ou moins fort, je sais que l'amour ne vaut pas cette définition. Quand j'étais encore une enfant naïve et innocente, j'ai accordé le bénéfice du doute à ma mère lorsqu'elle me racontait que l'amour était une chose simple qu'il suffisait d'entretenir pour faire vivre. Je n'en suis plus si sûr, aujourd'hui...

J'observe ma mère quelques secondes, assise dans son fauteuil, la tête renversée vers l'arrière et la bouche ouverte. Le ronflement faible et presque inaudible m'indiquant qu'elle s'est endormie, et sachant qu'Evan est toujours posté sagement devant la maison, j'essaie de ne pas la réveiller en retirant mes chaussures pour m'approcher de l'escalier. Feignant ne pas remarquer la présence des grandes bottes noires de papa, qui devrait normalement travailler de nuit, je pose le pied sur la première marche, qui grince sous mon poids.

— Où crois-tu aller, jeune fille?

Serrant les dents, je me retourne vers ma mère, qui passe doucement une main sur son visage, comme pour effacer les traces de sommeil encore marquées sous ses yeux.

— Dans ma chambre... murmurais-je.

— Bien rapidement à mon goût, souligne-t-elle. Je croyais que tu devais arriver en après-midi.

Je déglutis, espérant qu'elle n'ait pas la vilaine manie de jeter un œil vers la fenêtre. Sans broncher, je me reproche tout à coup de ne pas avoir prévenu Evan de ne pas attendre sur le trottoir devant la maison.

— Le bus a eu un imprévu, mentis-je. Il y a eu un problème de pneu en route.

Les plis sur son front me font retenir le souffle bloqué dans ma gorge, mais rapidement, je reprends des couleurs et essaie de ne pas laisser paraître le mensonge horrible que j'ai dis à ma mère.

— Tu n'as pas appelé du tout, Alexie. Je me suis fais du souci, tu n'as répondu à aucun de mes messages.

Le cœur gros, je pense à toutes les personnes que j'ai oubliées durant cette semaine passée avec Evan. Sans compter les examens importants pour lesquels je n'ai pratiquement pas étudié, et celui pour mon permis de conduire.

— Je suis désolé...

— J'ai faillis appeler ta tante, Alexie, et Dieu sait que je déteste lui parler. Je ne comprends même pas l'envie soudaine qui t'a prit de passer la voir.

— Les liens familiaux, c'est important.

Jetant un coup d'œil rapide vers la fenêtre, je feins un bâillement et essaie de convaincre ma mère de me parler de ses reproches demain. Si je veux affronter ma mère avec de tels mensonges, j'ai besoin d'un long repos... et d'une petite dose d'Evan, pour me rappeler la nécessité de ces mensonges.