Il faisait encore nuit lorsque Sébastien me réveilla, avec froideur et dureté. Ce qui me laissa penser, l'espace d'un instant que j'avais rêvé, ou plutôt cauchemardé les évènements de la veille. Mais je réalisais bien vite qu'il n'en était rien, notamment à cause de la vive douleur que je ressentais dans ma poitrine. Eh bien que je ne comprenne pas le soudain changement de comportement de mon geôlier, je décidais d'en faire abstraction.
- Nous repartons déjà ? Demandais-je d'une voix encore ensommeillée, en étouffant un bâillement.
- En quelques sortes, oui. Nous rentrons à Islynn.
Je me redressais d'un seul coup, parfaitement réveillée, et cette inhabituel curiosité revint aussitôt. Je savais désormais, après la nuit qu'il m'avait fallu pour l'assimiler, que tout ce que Sébastien m'avait dit plus tôt était la stricte vérité. Ou plutôt, j'avais décidé, faute de mieux, de le croire sur parole. Et bientôt j'aurais la preuve concrète que ce qu'il me disait était effectivement vrai.
Et même si cela rendait toutes ces atrocités auxquelles j'avais assisté ou que l'on m'avait raconté, réelles elles aussi, je ne pouvais m'empêcher de ressentir une excitation incontrôlable à cette idée. Je sortis précipitamment de la tente à la suite de Sébastien. Le campement était entièrement agité, et tous s'appliquaient à plier bagage, le plus vite possible. Je regardais la scène, à la fois intriguée et fascinée par cet étrange spectacle.
Mais mon geôlier ne me laissa pas plus de temps pour observer la scène, et me tira par le bras un peu plus loin. Il s'arrêta devant une vieille souche de bois, et me mit face à elle, une expression fière sur le visage. Expression qui s'estompa bien vite quand je demandais :
- Qu'est-ce que c'est ?
Il leva les yeux au ciel, et en fit de même avec ses bras, avant de répondre, sur le ton de l'évidence.
- Ceci est un portail naturel, reliant nos deux mondes. Ils sont plus faciles à trouver dans ce monde que dans le nôtre, car ils sont la seule source de magie qui existe encore ici. Néanmoins, ça n'a pas été une partie de plaisir.
Il semblait vraiment satisfait d'avoir pu en trouver un et de me le présenter de la sorte, mais je ne pus faire autrement que de hausser un sourcil, sceptique. J'avais du mal à croire que ce que je voyais devant moi était autre chose que les restes d'un arbre mort, mais si j'étais prête à accorder ma confiance à cet homme, pourquoi pas là-dessus ? Je restais un moment silencieuse, me demandant à quoi pouvait bien ressembler Islynn, ou ce que je ressentirais lorsque j'y serais enfin.
- Est-ce que tout ceci t'inquiète ? Me demanda brusquement Sébastien, sans que rien ne m'ait préparé à cette question.
Je me retournais vers lui, songeant à quel point il avait raison lorsqu'il me disait que je ne pourrais le cerner. Et cela me perturbait tout autant que son changement d'humeur constant. D'abord il était froid et désintéressé et quelques minutes plus tard, il se montrait aussi attentif qu'attentionné.
- Je l'ignore, répondis-je en toute sincérité. Je ne me suis jamais vraiment senti à ma place ici, alors j'imagine que si j'ai une chance de la trouver là-bas...
Je laissais ma phrase en suspens, mais je savais que je n'avais aucun besoin de la terminer pour me faire comprendre. Il hocha la tête, et baissa les yeux sur la souche, ou le portail. Il ouvrit la bouche, comme pour parler, mais se ravisa et la referma sans que rien n'en soit sorti. Son visage revêtit de nouveau un masque inexpressif et je sus que je ne tirerais plus rien de lui pour le moment.
Nous attendîmes patiemment devant cette souche que le campement soit intégralement démonté, puis lorsque chaque soldat fut prêt, Sébastien prit une profonde inspiration et annonça enfin que le moment était venu de rentrer chez nous. Devant ma mine déconfite, tour à tour, les soldats se placèrent sur la souche et disparurent soudainement. Ma mâchoire s'entrouvrit et mes yeux s'écarquillèrent, tandis que cela paraissait plutôt amusé Sébastien. Il avança un pied sur la souche, puis dans un geste hésitant, me tendit la main. Je la pris avec prudence et reconnaissance, et aussitôt que mes deux pieds furent posés sur le portail, je me sentis aspirée par celui-ci.
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Islynn
FantasyLeslie et Zora sortent tout juste du lycée, fraîchement diplômées, prêtes à affronter leurs études. Mais il semblerait que le destin en ait décidé autrement. Les voici donc toutes deux projetées dans un monde dont elles ne savent rien, excepté qu'e...