Chapitre 37

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Pour calmer la douleur qui ne le quittait pas depuis deux mois, Roderik respira l'odeur de peinture fraiche en tournant sur lui-même. Combien, combien, encore de jour devrait-il tenir dans la crainte de la perdre ?

— La couleur était celle que vous attendiez monsieur Graïyos ?

Roderik observa les murs de la chambre sans trouver la force de goûter au plaisir d'avoir eu ce qu'il désirait.

— C'est la teinte préférée de ma femme bien sûr qu'elle correspond à mes attentes.

Il se reprit et marcha lentement vers les murs nacrés alors que les travaux continuaient autour de lui de provoquer des sons brutaux et bruyants.

Roderik posa sa main sur le mur et ferma les yeux aussi forts qu'il le pouvait.

Flash-back -

— Laisse-moi prendre ton sac, viens, il faut t'asseoir.

Son cœur battait si brutalement que ses tempes devenaient douloureuses. Il avait l'impression que du sang rugissait de ses oreilles.

Il la contempla une fois assise, inerte, l'ombre d'elle-même.

— Grace, tu as entendu le médecin ? Réussit-il à dire en s'agenouillant en face d'elle. Il faut que l'on en parle.

— Il n'y a rien à dire Roderik, j'ai choisi la première option pas la deuxième. Répondit-elle les yeux rivés sur le canapé. Le médecin va me suivre de très près, tu l'as entendu ?

— Je ne veux pas...Attend, j'ai mon mot à dire Grace, je ne veux pas te perdre ! Il y a des risques.

— Et on va les surmonter ! Contesta-t-elle en relevant les yeux affaiblis par ses pleurs, mais déterminés.

— On a tout surmonté jusque-là, c'est juste une épreuve de plus ! Dit-elle d'une voix qui inspirait à l'espoir.

Roderik se leva en se passant les mains sur son visage.

— Je refuse de te perdre ! C'est hors de question.

Elle se leva le regard rivé dans le sien. Elle était terrifiée et il pouvait le lire sur chacun de ses traits.

— Tu ne vas pas me perdre, je vais rester au lit et moindre nouveau saignement, je vais....

— Tais-toi ! Assez !

Elle se recula, sa tête tremblait, ses prunelles luisaient par les larmes. Elle le dévisageait immobile.

Roderik s'avança sans pouvoir dissimuler son désespoir et posa sa paume sur sa joue.

— Grace, on peut en faire un autre... On pourra recommencer.

— Quoi ? Souffla-t-elle brutalement.

Son corps eut un violent soubresaut en le dévisageant incrédule.

— Qu'est-ce que tu dis ? Répéta-t-elle en posant sa main sur son ventre.

Il tenta de se rapprocher. La gifle brutale tomba contre sa joue comme un cri de désespoir.

Roderik serra la mâchoire, alors qu'elle gémissait le souffle coupé.

— Va au diable ! Je te déteste pour avoir suggéré une telle chose ! Hurla-t-elle en s'en allant vers les escaliers en pleure.

Roderik rouvrit les yeux en décollant sa main du mur.

— Monsieur Graïyos ? Vous m'entendez ?

Il avala difficilement sa salive.

— Oui, je vous entends.

L'architecte parut mal à l'aise et porta son poing devant sa bouche pour se racler la gorge.

— Vous désirez voir la chambre du bébé ?

— Bien évidemment !

L'architecte alla jusqu'aux portes coulissantes et les ouvrit.

Roderik pénétra à l'intérieur et posa son regard sur les murs fraîchement peints.

— Bien évidemment ce n'est pas encore tout à fait fini. S'enquit de dire l'homme avec les plans de la maison sous le bras.

Roderik lui adressa un regard assassin.

— En effet, où sont les tortues de mer ? Je ne les vois pas au mur ?

— C'est-à-dire que les sculpter a pris un peu plus de temps que prévu. Expliqua-t-il en remontant ses lunettes.

Roderik s'approcha de lui d'un pas nonchalant, le menton levé.

— Savez-vous pourquoi je vous ai choisi monsieur Riveros ?

Il se planta devant lui et reprit devant son silence.

— Parce qu'on m'a dit beaucoup des choses positives sur votre travail, ai-je eu tort d'écouter ces personnes ?

— Non, monsieur Graïyos, je vais faire en sorte que cette maison soit terminée en temps et en heure.

— Je l'espère bien monsieur, l'accouchement est prévu dans quelques semaines maintenant. Il est absolument hors de question que cela se passe autrement.

Sa voix se fut menaçante.

L'architecture acquiesça faiblement de la tête et s'empressa de dérouler le plan de la maison pour le poser sur le tréteau planté au milieu de la chambre.

— La façade de la maison a été entièrement faite de pierres identiques à celles de la Grèce aux reliefs pittoresques comme vous l'avez demandé.

Roderik jeta un coup d'œil sur le plan.

— C'est parfait monsieur Riveros. Répondit-il avec plus de douceur dans la voix.

— Pour le jardin j'avais pensé à l'entourer d'un mur identique à la façade, avec une hauteur d'environ quatre mètres tout en le travaillant avec une forme antique, avec des piliers par exemple.

— C'est une idée brillante, bien plus brillante que la mienne. Avoua Roderik en détaillant le plan.

— Cela empêchera les paparazzis de venir fouiner, ils ne pourront pas entrer dans votre propriété, ni devant, ni derrière. Ajouta l'architecte.

Roderik eut un goût amer dans la gorge à l'énonciation des paparazzis. Maintenant qu'ils connaissaient la vérité à son propos et l'existence de Grace, ils avaient pris pitié de lui. De play-boy sans cœur, à bagarreur, maintenant, il était la proie prioritaire des gros titres émouvants.

— C'est une excellente idée monsieur Riveros, vous avez carte blanche, je vous fais confiance. Déclara-t-il en lui donnant une poignée de main.

— Veuillez me pardonner pour mon ton un peu trop sec, je suis sur les nerfs.

L'architecte lui sourit avec courtoisie et hocha de la tête.

— Je comprends monsieur Graïyos, n'ayez aucune crainte la chambre du bébé reste l'une de mes priorités. Votre fiancée sera émerveillée, je vous en fais la promesse.

L'enthousiasme et détermination de l'homme, rassura Roderik. Mais il ne put dire quoi que ce soit, sa gorge était trop serrée, d'angoisse, d'inquiétude. Il voulait que la chambre du bébé soit exceptionnelle, qu'elle soit comme Grace l'avait imaginé. Cette nouvelle demeure était le début d'une vie heureuse, une surprise pour elle. Il avait mis un mois entier à l'imaginer dans les moindres détails.

— Je vous laisse travailler, je dois retourner chez moi maintenant. Annonça-t-il en quittant la chambre du bébé.

Il s'enfonça dans le couloir tête baissée, la mine grave. Il redescendit les dédales d'escaliers et jeta un coup d'œil sur les lieux qui prenaient peu à peu forme. Une fois le seuil de la maison passée, Roderik s'arrêta en haut des marches et prit une immense bouffée d'air. Il ne restait plus que quelques semaines, mais cela lui paraissait une éternité, dans laquelle il se battait chaque jour, il luttait contre cette peur violente et étouffante qui ne le quittait plus.

Il serra ses mâchoires, serra les poings dans ses poches.

— Ce n'est pas le moment de craquer Roderik. Se murmura-t-il à lui-même.


Un Troublant Milliardaire Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant