Chapitre 30

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Des mains au contact de mes paupières me donnent des frissons le long du cou. En levant mes mains, je tâtonne à l'aveugle de courts doigts fins avant de me rendre compte que je ne connais personne d'autre ayant de si gracieux membres.
« Ambre.
— Non », dit-elle en essayant d'imiter une voix faussement grave.
Je tends ma main vers sa tête afin d'y identifier les traits d'Ambre, ne voulant toujours pas lâcher prise. Mes doigts se baladent sur un visage lisse et passent sur un nez petit et fin pour finir sur des joues rebondies que je m'empresse de palper. La lumière me vient enfin. Face à moi, Clara me filme, rictus au visage. Je me lève et lui enlève son téléphone des mains.
« Très marrant.
— Toujours », réplique Clara, reprenant son téléphone.
Je me retourne vers Ambre qui affiche un grand sourire malicieux, les joues rosées par mon geste.
« Peau sensible ?
— Un peu, rien de grave. »
Je m'inquiète un peu, mais voyant que son visage est rouge jusqu'aux oreilles, je suppose qu'elle a juste chaud. Après tout, c'est la saison pour.
Sur le chemin, le soleil tape fort sur ma peau. La chaleur se fait fort en ce fin de mois, et pourtant nous avions décidé de sortir voir un film chez Clara. Le brevet ne nous préoccupe pas autant que ça. Du moins, pour nous trois. Nick était le plus anxieux, comme à son habitude.

Chaque pas fait grince dans tout l'immeuble. L'odeur du vieux bois me procure un sentiment de plaisance. Je n'ai pas ça dans mon appartement ; c'était un bâtiment récent, l'ascenseur accueillant au maximum 8 personnes le prouvant. Devant la porte, Clara peine à trouver ses clés. Quand enfin le son des métaux s'entrechoquant apparaît, un aboiement se fait entendre derrière la porte. À mes côtés, les yeux d'Ambre s'écarquillent, un sourire se formant.
« Plus contente de voir son chien ?
— J'aime Alice tout autant, t'inquiète pas. »
Je souris. L'entendre prononcer le nom d'Alice me donne chaud au cœur. J'ai l'impression qu'elle revit à travers ses paroles. La porte s'ouvre et à peine avons-nous pus avancer d'un pas qu'une grosse figure sort de l'ouverture de la porte et saute sur Ambre.
« Oh, salut toi !
— Tu t'es trompé de maître, Collie ! » s'exclame Clara, avant que son chien ne comprenne enfin qu'il s'était trompé.
Nous entrons dans l'appartement et une odeur agréable se fait sentir. J'inspire un grand coup afin d'annihiler cette chaleur de son chez-soi. En traversant le long couloir orné de photos d'enfance, nous arrivons au salon, ouvert sur une grande terrasse. Clara prend nos affaires et les met à côté des canapés.
« À boire ? Quelque chose à manger ?
— Non, c'est bon, rétorqué-je.
— Je veux bien de l'eau », dit Ambre.
Après être allée chercher de l'eau, Clara s'assied enfin et nous demande quel film voudrions-nous regarder. Je n'avais pas l'habitude de regarder de films. Je passais la plupart de mon temps à jouer de la guitare ou dessiner, plutôt. Il est vrai qu'un film de temps à autre pouvait me détendre. Et puis, un film avec Ambre, je ne refuse pas. Nous choisissons au final une comédie romantique. Au fur et à mesure, je remarque que c'est un film assez niais, d'un humour forcé mais faisant effet. Clara rit aux éclats à côté de moi tout en me tapant la jambe. Je ne sais pas trop si être au milieu est une bonne idée. D'un autre côté, Ambre se fait plus réservée mais je peux voir une lueur d'amusement dans ses yeux. Peut-être que ça vaut le coup finalement. Elle détourne son regard sur moi quand enfin elle remarque que je la fixe plus que le film lui-même.
« Je suis plus intéressante ? dit-elle avec un ton joueur.
— Tu rêves », dis-je en m'efforçant de me regarder le film. Pile à ce moment, c'est une scène de baiser au ralenti qui se montre en gros plan, accompagnée d'une musique de fond romantique. Ces scènes m'ont toujours gênée. Que ce soit en cours, avec ma mère ou au cinéma, je détourne toujours le regard. Je regarde alors aux alentours pour voir si tout le monde fait de même, mais Clara serre son coussin tellement fort que j'ai l'impression qu'elle s'y prend au jeu. Quand alors je regarde à ma droite, le regard d'Ambre croise encore le mien, comme si nous étions connectées, en quelque sorte. Un regard court et bref, rempli de gêne pour ma part mais pour elle, encore ce ton amusé, à ma surprise. Je crois qu'elle a compris que j'étais gênée. Dire qu'elle est de nature aussi taquine, je n'aurais pas cru.
À ma surprise, Clara ne pleure pas à la scène d'adieux.
« C'est cliché, dit-elle.
— Tu penses ?
— Moi, je trouve ça romantique, dit Ambre en affichant un sourire satisfait.
— Vous êtes très légèrement en train de vous moquer de moi là, non ?
— Très », rétorqué-je.
Suite à cela, Clara me lance son coussin que je reçois en plein visage. Sans autre coussin aux alentours, une bataille de d'oreillers ne put avoir lieu. Mais Ambre a tout de même pris l'oreiller de ma main afin de me le relancer, pour je ne sais quelle raison. Au final, je lance le coussin sur un autre canapé, à le deception des autres participants.
Vient enfin le baiser des retrouvailles, où mon regard vient à divaguer sur le chien, dormant paisiblement dehors, sous le soleil. Je l'envie. Cette envie est résolue quand je me lève pour le rejoindre, le générique de fin du film commençant. En me voyant venir, il se redresse et me feinte pour aller derrière moi. Le cœur froid, je me retourne pour le voir aux genoux d'Ambre, me regardant, moqueuse.
« J'attire plus les chats, et j'en suis fière, dis-je avant qu'elle n'ait le temps de me faire une remarque.
« C'est pas grave, dit-elle en allongeant son dernier mot, au moins y'a moi. »
Cette dernière remarque me fait l'effet d'une explosion dans ma poitrine. Comment peut-elle dire ces choses si facilement, je me le demande. Je reste confuse un moment, toujours en surprise, tandis qu'elle est occupée à le choyer. C'est Clara qui continue la conversation : « Tu insinues que tu es une chienne ? » Ambre rigole. « Non, j'attire les chiens. »
Et là, mon cœur reste en suspens. Je ne sais pas trop à quoi je m'attendais. Ça me semblait tellement irréel ce qu'elle m'a dit. Je continue de me demander dans quel sens elle l'insinuait. Retroussant mes manches, je me dirige vers la terrasse et m'installe sur la chaise pliante. Le soleil tape toujours fort et la chaleur emporte avec mes pensées négatives. Qu'il est bon de se détendre en cette semaine, le brevet à nos trousses.




Plus le temps avance, moins je suis régulière. L'histoire a plus d'un an, j'avais pas capté. Merci à ceux qui la suivent encore, et bonnes vacances. :)

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