La cité de ma fenêtre

Partie 37

En rentrant de ma petite après-midi passée avec Élise, je cherchais directement mon frère du regard en passant l'embrasure de la porte.

Il fallait que je lui raconte ce que Afia m'avait dit, peut-être trouverait-il une solution ?

Il était assis dans la cuisine, une tasse de café à la main, le regard vide.

Je prenais place à ses côtés et je me mis à lui conter tout ce que je savais.

Il était d'abord très surpris puis il s'est mit en colère. Je ne savais pas comment aborder les choses, je tentais tout de même de le calmer.

Après quelques mots échangés avec lui, j'avais réussi à l'apaiser.

C'est ce que j'aimais chez Kamyl et que je ne retrouvais pas chez Kassym, la maturité... Malgré le fait qu'il puisse avoir les nerfs à vif quelques fois, il savait faire la part des choses. Il prenait le temps de réfléchir aux situations, de peser le pour et le contre et d'agir en adulte. J'étais fière de lui, c'était un homme à part entière.

[...]

En tentant de m'endormir ce soir là, le sommeil ne vint pas toquer à ma porte... J'avais l'esprit ailleurs.

Je me suis mise à me faire des films, à me demander si il pouvait y avoir un lien entre l'histoire d'Hakim et celle d'Afia... Je me calmais ensuite en me disant que je me faisais des idées et que rien de tout ça n'était susceptible d'être réel, que la coïncidence serait bien trop grotesque.

Les jours passaient et mon frère persévérait en allant chaque jour chez la famille d'Afia. Il rentrait bredouille à chaque fois, mais il ne perdait pas espoir. Je voyais bien qu'il s'accrochait au fait qu'il pouvait retrouver son amour et que tout n'était pas perdu.

J'aimais constater la force mentale et la persévérance que lui influait son amour. Chose qui pour ma part m'avait plus anéantie que renforcée.

[...]

Par ma fenêtre, je cru reconnaître au loin, une silhouette qui m'était familière. Je plissai les yeux dans cette nuit noire en espérant mieux discerner le visage de cette personne... Lorsque je vis qu'il s'agissait de lui, mon rythme cardiaque s'accentua. J'avais besoin d'en avoir le coeur net et prise dans un élan d'adrénaline j'enfilas une veste et je sortis de chez moi sans faire de bruit.

J'allais probablement regretter mon choix mais j'avais besoin de vérifier de mes propres yeux et de plus près. En vérité, je crois que depuis qu'Hakim était sorti de ma vie je n'étais plus moi-même.

En poussant la porte de mon hall, je pris une grande bouffée d'air et poursuivis ma route. Il était aux alentours de minuit et je me retrouvais dans une situation délicate.

En faisant quelques pas encore, je reconnaissais la silhouette lointaine qui s'offrait à moi.

Je tentais de me cacher pour ne pas me faire repérer et une fois assez près pour pouvoir observer son visage je me suis arrêtée.

Il était de profil et ne me voyait pas... Pourtant, je n'attendais que qu'il tourne la tête, pour observer son visage de nouveau... Après tout ce temps et les quelques photos que je m'interdisais de regarder, j'avais l'étrange impression d'avoir oublié tous ses traits et cette perspective m'effrayait.

Le vent sifflait légèrement en cette nuit d'été, j'étais assez près pour que l'odeur du tabac parvienne jusqu'à mes narines.

Il était seul, assis et fumait. Le regard lointain, comme si ses pensées l'avaient emmené dans un autre monde.