Chapitre 18 - Tourne la roue de la fortune

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Vendredi 8 Décembre
A 15h20

     C'est enfin la récréation que l'on attendait tous avec impatience tant il y a du bazar dans la classe. C'est incroyable à quel point c'est insupportable.

     Je sors donc, comme tout le monde et je m'adosse au mur. C'est une surprise pour moi quand c'est le groupe de Laura qui vient me voir pour me demander:

_ Et le vendredi dans deux semaines? Comment ça va se passer? Est-ce que quelqu'un va mourir? Parce que c'est récent de ne pas avoir cours le vendredi avant les vacances.

_ Dans ce cas, la malédiction s'en prend à la personne le jeudi. Et en quel cours sommes-nous à ce moment-là? Demandais-je.

_ En sciences. Me répond Alizée.

     J'entends quelqu'un se rengorgé derrière moi et rien qu'à la présence, je remarque que c'est Jean. Il me demande donc d'une voix calme:

_ Alors la misophonie? Ça va mieux?

_ Plutôt, oui. Je ne pleure plus en entendant les notes qu'il ne faut pas en temps normal. Et c'est grâce à toi.

     Il me sourit et je lui donne droit à une étreinte chaleureuse en remerciement. Mes camarades sont étonnés mais n'y prêtent pas plus attention.

     Il me précise que je suis attendue à la salle habituelle. Je le remercie de m'en avoir informer et entame ma course en direction des escaliers jusqu'au moment où je me fais appeler quand je suis au milieu de la cour. Je me retourne et le temps d'une fraction de secondes, Laura est au sol.

     J'en étais sûre. La seule raison pour laquelle je ne dis rien étant le fait que ma classe ne me parle pas souvent, je ne peux pas les prévenir sinon je l'aurais déjà fais depuis longtemps.

     Je me dépêche de monter en refoulant mes larmes et entre en trombe dans la salle où j'ai été demander. Alice lâche sa tasse au sol, qui se brise, Benoît me regarde avec des yeux ronds et Christian vient de passé la tête dans l'encadrement de la porte de la salle du labo et reste surpris de me voir. Ou est-ce le fracas de la porte quand je l'ai claquer contre le mur en l'ouvrant qui l'a surprit?

     Quoi qu'il en soit, je referme derrière moi et m'adosse à la porte en retenant mes larmes. Ma vue se brouille lentement et Benoît se dirige vers moi.

     Je me laisse glisser au sol et il s'abaisse à ma taille. Je lève des yeux larmoyants vers mes trois amis et Alice me demande ce qu'il se passe. Ce à quoi je réponds:

_ J'en peux plus de ne pas pouvoir agir. Il faut trouver une solution à tout prix. Je ne peux pas supporter tout ça sans rien faire. Aidez-moi, je vous en prie.

     Ils sont surpris et n'osent pas parler. Alice m'aide à me relever, m'aide à m'installer sur le canapé et me donne une tasse de thé. Je la bois aussitôt, m'allonge tranquillement et lâche un bâillement à m'en décrocher la mâchoire.

     J'observe les alentours et remarque avec surprise que Jean entre dans la salle, une liasse de papiers à la main. Il en donne un à chacun des profs présents et je soupire profondément, me servant des jambes de Benoît pour caler mon cou.

     Il me caresse les cheveux en lisant les documents que Jean lui a donner et je le vois sourire. C'est d'un air tranquille qu'il nous dit quelques minutes plus tard:

_ Je vais en Écosse dans deux mois. Et Hana doit venir avec nous en voyage.

_ L'Écosse dans deux mois, Florence dans trois et Rome dans quatre, sachant qu'ils se feront avec moi, on va bien s'amuser. Me sourit Christian.

     Je n'ai pas vraiment le coeur à sourire. Vu tout ce malheur, c'est très loin de m'amuser. Je refuse de continuer à vivre pour que tout le monde parte avant moi. Surtout dans cette classe.

     Le nombre tombe chaque semaine et c'est invivable. Beaucoup de monde ne sait pas ce que c'est de vivre dans une peur constante de la mort. La peur constante d'être le prochain. Et je me rends compte que ma vie n'est pas plus importante que celle d'un de mes camarades. On sait que l'on va tous mourir un jour. Mais si tôt, personne ne pense ça possible.

     Jean claque des doigts sous mes yeux et il me ramène à la réalité. Je me lève, me sert un verre d'eau, le bois d'un trait, le dépose dans l'évier et me tiens au-dessus de ce dernier, les larmes venant à nouveau contre ma volonté.

     Je peine à les retenir, Alice et Christian viennent vers moi, l'un me réconfortant à sa façon et l'autre me caressant le dos. Je hais cette fichue malédiction.

     Je sens que l'on me fait légèrement reculer et que l'on est en train de m'étreindre par derrière mais je ne fais pas attention. Je suis trop prise par mes pensées pour faire attention à la réalité qui se trouve autour de moi.

     Ma vie est si énervante et mauvaise. Dois-je considérer que j'ai de la chance d'être encore en vie à ce stade de l'année? Je refuse de penser ça en sachant que je perds mes camarades un par un depuis le début de l'année. J'aurais préféré être dans les premiers parce qu'à compter d'aujourd'hui, je ne vais plus vivre de la même façon qu'avant tout ça. Ce qui veux dire que beaucoup de choses vont changer sur mon attitude envers certaines personnes. Je sais que beaucoup vont être surpris mais je n'ai pas trop le choix non plus. Alors je fais selon la solution qui se présente.

     C'est la sonnerie qui me coupe dans mes longues réflexions, qui me ramène à la réalité et qui me fait sortir de la salle contre ma volonté, à mon plus grand regret.

The Last (Ou "La Survivante")Où les histoires vivent. Découvrez maintenant