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          Une fois remise de mes émotions, et détachée de Timaël, il m'emmena à la plage. Alors que je pensais que la gêne allait s'emparer de nous à l'idée de s'être tenus aussi proches l'instant d'avant, je fus surprise de constater qu'il n'en était rien.

          Sa compagnie était agréable et me permettait de rester moi-même, au moins quelques instants. Et cela me rassérénait. 

          Le vent soufflait dans mes cheveux. Même attachées, des mèches étaient parvenues à s'échapper et me revenaient dans le visage. Le soleil m'éblouissait à force de rester debout et immobile. Nous nous contentâmes dans un premier temps d'observer les familles.

          Une scène me fit sourire : un peu plus loin, un groupe de jeunes jouait au volley. Le ballon était sorti du terrain et avait rebondit sur le sable. Une fille, qui semblait connaître les joueurs, s'empressa de l'attraper et de le serrer contre elle. Un garçon se détacha du groupe pour le récupérer. Serrant la fille contre lui, elle soulevée dans les airs, il parvint à le lui subtiliser. Au lieu de la relâcher, il la garda contre lui, comme pour s'approprier son rire frais. 

          Un éclat de voix m'arracha à ma contemplation amusée.

  — Eh Cornélius ! Il faut prendre les casques !

          Un peu plus loin vers la droite, un groupe de cinq ou six garçons était sur le départ. 

          Mais je ne m'appesantis pas sur l'échange car une fillette de quatre ou cinq ans venait de hurler. Un petit garçon, son frère peut-être, lui courrait après, la tête découpée d'un poisson à la main.

— C'est un vrai poisson ! criait-il. On a aussi des étoiles de mer !

          Le calme revint lorsque tous les enfants se précipitèrent sur les trouvailles du jeune pêcheur.

          Timaël attrapa soudainement ma main et la serra dans les siennes pour attirer mon attention. Je me tournai vers lui au moment où il me lâcha. J'avais été si surprise par son contact que je ne sus quoi dire pendant plusieurs secondes, la respiration sifflante.

— Tu veux prendre une glace ? répéta-t-il, pas agacé le moins du monde.

          J'acquiesçai avec joie, en pensant que j'étais justement en train de fondre, de cramer plutôt, sous les rayons du soleil. Mon débardeur et mon short en jean laissaient ma peau claire exposée à la brulure, et je commençais à regretter de ne pas m'être plus couverte. Mais cela faisait quelques jours qu'aucune marque n'était apparue et les anciennes, grâce à la crème, devenaient petit à petit blanches. Si ça continuait, j'aurais des coups de soleil le lendemain.

— Quel parfum ? me demanda-t-il, une fois devant le stand.

— Vanille !

          Alors que tous mes amis adoraient tester de nouveaux parfums à chaque fois, j'étais celle qui choisissait toujours des valeurs sûres. Vanille, chocolat, fraise... Je ne prenais jamais de risques.

— Une boule vanille et une boule melon, s'il vous plait.

          Nous dégustâmes notre glace en marchant le long de l'eau, tranquillement. 

—J'adore me baigner ici, je n'ai pas l'impression d'être seule avec le monde qu'il y a ! déclarai-je pour briser le silence.

—Je ne me baigne pas, j'ai peur de l'eau, me répondit-il.

          Sa voix neutre m'interpella, aussi je me retournai pour découvrir ses yeux brillant – de larmes ? – et son visage crispé. L'émotion me serra la gorge, comme en réponse à la douleur que je voyais briller dans ses yeux. Je n'osai plus rien ajouter, de peur de toucher une corde sensible. 

Déni de Vie [Réécrit]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant