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          Je décidai d'aller voir l'entraînement de l'équipe de base-ball du lycée, cela me distrairait. En passant devant les vestiaires, j'entendis alors la voix criarde d'Erin. Puis je la vis, tripotant sa chevelure blonde. Et en face d'elle... Timaël.

          Refoule.

          Ne pas penser à la douleur, surtout, ne pas y penser. Il ne fallait pas que je pète les plombs. Pas tout de suite, pas ici.

          Mon cœur martelait ma cage thoracique, et je dus me tenir au mur pour ne pas m'écrouler sous la force des sentiments qui tourbillonnaient sous mon crâne. C'est alors que je prêtai l'oreille pour entendre ce qu'ils disaient.

Je peux savoir pourquoi t'as embrassé l'autre cruche ?

           Oh, oh. Cela parlait de moi... Mon sang se glaça dans mes veines. Et si... et s'il disait quelque chose que je ne voulais pas entendre ?

Qui t'a dit ça ?

          Je me sentir pâlir. Allait-il nier ? Alors, j'avais raison ! Il n'avait fait cela que parce qu'il avait eu pitié de moi !

Kelya. Elle voulait aller voir Brandon aux vestiaires et elle vous a vu.

         Merde. Une autre trahison ? D'un autre côté, Erin savait être très persuasive, peut-être que mon amie n'avait pas eu le choix.

Je lui ai demandé où tu étais, elle n'a rien dit. Alors je lui ai promis que je raconterai à son chéri qu'elle avait couché avec Jackson. C'est pas vrai, hein.

          Voilà, c'était sûr. Erin était vraiment trop manipulatrice, et ce même envers ses propres amies. Enfin, dans le cas présent Kelya n'était pas vraiment une de ses amies.

Tu es horrible. Tu me dégoûtes.

          Timaël avait craché ces mots, et je me décalai pour vérifier si c'était bien lui qui avait parlé. Il entra dans mon champ de vision et j'en fus convaincue. Il n'y avait qu'eux dans la pièce. Merde alors, il m'étonnait toujours.

Oh, allez, Timou ! C'est pas la mort ! Mais maintenant je veux savoir pourquoi tu l'as embrassée ! Tu l'aimes ?

          Il y eut un blanc, et je fixai mon regard sur Timaël. J'attendais ce qu'il allait dire. Il se racla la gorge, fusilla sa copine du regard et déclara d'une voix assurée :

Je n'ai aucun compte à te rendre. Tu n'es rien pour moi et je n'ai pas envie de discuter de mes sentiments pour Ama avec toi.

          Mon cœur fit un bond dans ma poitrine « mes sentiments pour Ama »... Etait-ce juste une formulation, ou avait-il réellement des sentiments pour moi ? En même temps que le doute, je sentis toutes les autres émotions que je refoulai affluer. Je me refermai en tentant de maîtriser mon cœur affolé.

          Il fallait que je me calme. Que je respire...

T'as entendu ? On aurait dit que quelqu'un venait d'inspirer !

         Erin avait pris une voix haut perchée et je sentis mon sang se glacer. Merde... Mais si je partais maintenant, ils m'entendraient. Et le couloir était tellement long qu'ils me verraient forcément.

            C'est alors que j'entendis des pas venir dans ma direction. Je me plaquai contre le mur et retins mon souffle. Timaël franchit la porte, se tourna vers moi, s'arrêta... En me reconnaissant, son visage afficha l'étonnement, puis il me fit un clin d'œil et repartit en sens inverse.

Nan, y avait personne.

          Ma respiration se relâcha brutalement. Il m'avait couverte ? J'avais encore du mal à y croire !

Bon. J'y vais, Erin.
Attends, quoi ? Timaël, on est encore ensemble pas vrai ?

         La supplication s'entendait dans sa voix. Si je ne la trouvais pas aussi pathétique, j'en aurais ri ! Cette fille se croyait vraiment la reine du monde ! Elle demandait quelque chose, et si elle ne l'avait pas, elle crisait.

On ne l'a jamais été.

          Oooooooh ! Si j'avais pu, je l'aurais applaudi. Dommage que je ne puisse pas voir la tête que faisait Erin, j'étais certaine que cela devait mériter le détour ! Un sourire fleurit sur mes lèvres et le soulagement m'envahit.

          C'est alors que les joueurs de base-ball entrèrent dans leurs vestiaires, Erin se mit à vociférer, Timaël sortit et je m'effondrai. Merde alors, j'avais baissé ma garde et tous mes sentiments remontaient à la surface.

          Timaël me retint de justesse et s'empressa de me faire sortir d'ici. Mais c'était trop tard. Ils m'avaient vue, et leurs chuchotis envahirent mon esprit, s'entrechoquant contre les parois de mon crâne.

          Un sanglot douloureux m'échappa.

          Une étreinte m'apaisa.

           Plus tard. Refouler ; encore.

          Une inspiration profonde.

          Un pas en avant ; vers la lumière.

          Tout irait bien ; plus tard.

Déni de Vie [Réécrit]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant