Le Reflet | Terminé |

Une épaule pour pleurer

Mon déjeuner terminé, je débarrassais tranquillement ma table. J'entendis par la même occasion le démon qui sortait de la salle de bain. Parfait, j'allais pouvoir y aller !

Je le croisais dans le couloir qui reliait ma chambre à la salle d'eau.
Je pris mes affaires et m'enfermais dans la pièce. J'ôtais mon ensemble de nuit et glissais sous l'eau chaude. Je fermais les yeux et me mis à divaguer... Je faisais le point dans ma tête.

Mon père s'est donné la mort a mes quinze ans. Lorsque j'ai quitté la maison à mes dix-sept ans, cela faisait tout juste deux ans qu'il n'était plus de ce monde.

Et cela faisait également dix ans qu'il avait commencé à devenir violent envers ma mère.
Tant de coïncidences pour une seule personne...

Je quittais la douche, m'habillais d'un jean délavé et d'un pull gris ouvert sur les épaules et sortis de la salle de bain.

Plus j'y réfléchissais et plus je me rendais compte que mon enfance avait été gâchée.

A sept ans, mon père se mit a boire et à frapper ma mère. Adonis fit également son apparition.
De plus, ma mère pactisa avec le même démon qui vit à présent chez moi.
A mes quinze ans, mon géniteur se suicidait d'une balle dans le crâne.
A mes dix-sept ans, ma mère me tirait une balle dans l'omoplate et je me vis obligée de quitter mon "chez-moi".

Tout en résumant cela, j'avais continué d'avancer jusqu'à ma chambre. Une fois dans la pièce, je me laissais tomber sur mon lit défait.

// Flashback //

« Qui es-tu ? Tu vis dans le miroir ?
- Oui ma princesse. Depuis trop longtemps. Mais, dans très peu de temps, tu me libéreras trésor...
- Comment je ferais ?
- Le moment venu, tu sauras, toi qui abrite en ton âme ton reflet. »

Dans le miroir de la chambre de mes parents, un beau jeune homme au visage d'ange me fait face. Apparement, il est prisonnier du miroir.
Il semble me connaître mais moi, j'ignore tout de lui. Il veut que je le libère mais, comment le pourrais-je, moi, une fillette même pas âgée d'une dizaine d'années ?

« Toi seule peux me libérer. Alice n'a pas réussi. Son âme était trop faible. Mais la tienne est... brûlante de vie et de ressource.
- Maman a voulu te faire sortir et n'a pas réussi ? Pourtant, ma maman est la plus forte du monde ! Si elle n'y arrive pas, je n'y arriverais pas non plus.
- Tu te trompes trésor. Tu es encore plus forte que ta mère. Et au moment venu, tu t'en rendras compte.
- Pourquoi tu demandes pas à papa ?
- Ton père est... il ne peut pas me sauver de ce miroir. Seuls des êtres spéciaux le peuvent. Dont toi mon chaton.
- Je suis pas spéciale moi...
- Oh que si mon trésor. Je sais que tu surpasseras ta mère et à cet instant, tu me libéreras. Mais pour le moment, tu dois encore t'épanouir. J'ai confiance Madison.
- D'accord. Mais pourquoi tu me demandes à moi ? Il n'y a pas d'autre gens comme moi ?
- Si. Mais c'est toi que je veux... »

// Fin du flashback //

Une goutte tomba sur les draps de mon lit. Très vite suivie d'une autre. Et encore d'une autre.

Des larmes ?

Je pleurais sans vraiment savoir pourquoi. Pourtant, les visages de mes géniteurs ainsi que les paroles de Lucifer tournaient en boucle dans mon esprit. Faites que ça s'arrête.

// Flashback //

« Ma chérie, pourquoi tu pleures ?
- Je... je sais pas...
- Voyons mon ange. On ne peut pas pleurer pour rien. Inconsciemment, nous pleurons quand notre cœur nous fait mal. Parles moi Madi.
- C'e-est juste que... »

Mes mains cachant mes yeux clos ruisselants de larmes, le souffle haché par mes pleurs, je n'arrivais pas à prononcer les mots qui me torturaient :

« Tu... tu cr-ois que je suis un... monstre ?
- Ma chérie, pourquoi cette question ?
- C'est Marie qui a dis ça. Les yeux refle-tent l'âme. Alors... mon âme doit être bien laide...
- Écoute moi bien Madison Alice Morgana. »

Elle releva ma tête essuyant délicatement les larmes qui dévalaient mes joues.

« Si Marie ne sait pas apprécier la beauté telle qu'elle est, alors son regard est trouble. C'est qu'elle ne sait pas ce qu'est la vraie beauté.
Et tu veux que je te dise ce qu'est la "vraie" beauté. »

J'hochais la tête de haut en bas.

« C'est celle qui réside dans ton cœur. Celle qui fait de toi une personne honnête et loyale.
Celle qui te définit. Celle qui fait de toi celle que tu es. Ma fille. Mon ange. Mon porteur de lumière. Mon trésor. Tu comprends ma chérie ? »

J'hochais de nouveau la tête.
Ma mère passa sa main dans mes cheveux, et murmura d'une voix douce :

« Allons, sèches moi donc ces vilaines larmes.
Si tu dois pleurer, fais le pour une cause heureuse. Si tu dois sourire, fais le pour une cause où d'autres auront besoin d'un rayon de soleil. Ne gaspilles pas tes larmes pour de la souffrance infondée. »

// Fin du flashback //

Un main caressait délicatement mes cheveux. Mon corps était enveloppé dans un cocon de chaleur et de bien être.
Mon visage inondé de larmes reposait contre un support dur et brûlant.
Deux bras me maintiennent contre ce support.

« Ne pleures pas chaton. Tes larmes sont trop précieuses pour être gâchées ainsi... »

J'ouvrais mes yeux embués de gouttes d'eau salée. Mon regard s'accrocha tout d'abord à un torse puis se dirigea vers un visage d'ange. Celui de Lucifer. Celui d'un démon.
Autour de moi, ses deux grandes ailes sombres étaient déployées.
Elles formaient un cocon protecteur, doux et chaud. Il se pencha doucement vers moi, aspirant les quelques larmes qui coulaient encore. Je frissonnais.

« Je ne veux pas te voir pleurer mon ange.
Tu es à moi. Ton âme est brûlante de vie. Ne laisse pas tes peines éteindre la flamme. D'accord ? »

J'hochais faiblement la tête de haut en bas.
Il me sourit et, après avoir attrapé entre ses doigts mon menton, plaqua ses lèvres contre les miennes.

D'abord confuse, je me laissais aller, glissant mes bras autour de son cou. Les siens s'enroulèrent autour de ma taille, me collant le plus possible à lui. Mes mains vinrent jouer avec ses cheveux, pendant que les siennes glissèrent sous mon pull, rencontrant ma peau brûlante. Nos lèvres se mouvaient parfaitement l'une avec l'autre, comme si elles se connaissaient par cœur. Sa langue rencontra la mienne et le baiser devient plus pressant, plus passionné.

Voici comment j'avais finis ma matinée dans les bras d'un démon. L'un et l'autre, nous embrassant, sans vraiment réfléchir ou se poser des questions inutiles. Qui eut cru qu'une créature démoniaque puisse être à ce point emphatique ? Certainement pas moi...