5 - réécrit

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Sincèrement, je ne sais pas quel miracle a opéré mais j'ai réussi à faire entrer ma clef dans la serrure. J'en laisserai presque échapper un soupir de soulagement. Après quelques tours, ma porte est déverrouillée.

C'est maintenant que je commence à me poser des questions à la con, du genre : est-ce que c'est un minimum rangé chez moi ? Ou encore : merde, c'est quand la dernière fois que j'ai passé l'aspirateur ?

Pas que je sois une accro du ménage, maniaco-dépressive et psychorigide, hein. Bien au contraire j'ai la fâcheuse tendance à être un peu bordélique et j'ai pas spécialement envie de me casser la gueule lorsque je vais devoir tituber jusqu'à mon lit.

Je pousse la porte, au pire on s'en fout. Dans tous les cas, le canapé est pas loin donc j'aurai toujours moyen de me jeter dessus. Même si on doit le faire à deux.

J'ai même pas le temps d'allumer l'interrupteur et de fermer correctement la porte que Joli-cœur se dirige vers mon cou. Un à un, il dépose lentement une série de baisers, ses lèvres entraînant à chaque fois un bruit de sucions. La chaleur de son corps dans mon dos et la tiédeur de sa langue jouant avec ma peau fait louper à mon cœur un battement.

Je ferme les yeux. Putain, c'est tellement bon.

Je me retourne et approche mon nez du sien. Quand nos souffles se mélangent enfin, j'entrouvre les lèvres.

L'inconnu écrase ses lippes contre les miennes et il n'attends pas plus longtemps pour titiller ma langue. Je lui rend son baiser, ouvrant encore plus ma bouche, puis je m'abandonne entièrement. Rien à foutre des autres, de ma vie. Je veux juste oublier le temps et savourer.

Mes mains plongent dans ses cheveux longs et tirent doucement dessus, pendant que l'inconnu caresse ma taille. Je pourrais rester comme ça une éternité...

Mais tous les deux à bout de souffle, on est contraint à se détacher l'un de l'autre. Putain, c'était beaucoup trop court.

-Tu pues l'alcool, je souris.

-J'peux savoir combien de whisky-coca tu t'es enfilée rien qu'en t'embrassant, il réplique.

Joli-cœur rit et entreprend de me suçoter encore le cou, sauf que contrairement à tout à l'heure, il explore chaque parcelle que je lui offre. Cette fois on est face à face et sa bouche descend toujours de plus en plus bas. C'est trop, je laisse échapper un gémissement et il s'arrête pour me prendre le visage en coupe.

Merde, qu'est-ce qu'on fout à être toujours habillés ?

-T'es très belle, même avec ton regard vitreux.

Je le foudroie des yeux, j'espère qu'à cet instant il est capable de voir tout l'alcool qui coule dans mes veines. Le pire c'est que ça le fait rire et ça m'énerve. Faut que ce type redescende d'un étage, j'suis près d'avoir deux grammes de whisky dans chaque bras et j'ai ramené chez moi un mec que je connais à peine. Si il croit qu'il a encore besoin de me draguer pour qu'on couche ensemble, il se fourre les deux doigts dans l'cul !

- Arrête avec tes disquettes Joli-cœur, je raille la bouche pâteuse.

Ça y est je suis fâchée, j'ai envie d'être seule. Le regard perdu dans le vide c'est maintenant que je remarque son skate qu'il a déposé à l'entrée, contre le canapé. Enfin, je sais pas si c'est réellement le sien vu qu'il l'a piqué dans la rue, n'empêche que ce mec est clairement un habitué des boards. Ça crevait les yeux, quand il enchaînait les tricks devant l'immeuble. Ce mec sait quoi faire quand il a une planche entre les mains.

Au plutôt, entre les pieds.

Putain. Je m'étais dis plus jamais. Plus jamais côtoyer des putains de skateurs à la con. Je peux pas faire ça. C'est au dessus de mes forces, j'ai trop donné. Rongée par la culpabilité, une larme invisible s'échappe et je l'essuie furtivement. C'est la colère qui prend place, mais mon camarade ne s'en aperçoit pas.

- Joli-cœur ? il se moque, attends de me voir à poil et tu vas m'appeler Joli-cul.

Il me fixe avec tellement d'intensité. J'aime plus du tout sa façon de me défier, cette lueur qui scintille au fond des ses yeux quand il est sûr de remporter la partie.

- Ça va les chevilles, je raille.

Ma détermination ne va pas flancher, c'est dommage pour toi mec.

Ma colère est plus forte que son putain de numéro de charme. Alors je le repousse. Mais vu mon état, je titube et m'écroule au sol. Foutu alcool, fait chier.

-Barre toi.

Ma plainte et presque silencieuse. D'ailleurs elle ressemble plus à un grognement qu'à un ordre. Je dois vraiment avoir l'air pathétique parce que Joli-cœur s'accroupit et tente de me redresser.

-Eh, viens là.

Il me porte et après avoir ouvert un placard et la salle de bain, il trouve enfin ma chambre et me dépose sur le lit. Finalement j'aurai pas à dormir sur ce bon vieux canap' tout pourri.

-Mais bordel de merde barre toi !

Ce con ne cille pas. Il entreprend même de me déchausser.

-Je vais enlever ta robe, je t'ai prévenu hein, alors me frappe pas.

Je répond un espèce de "Mmm", je commence à être sérieusement dans les vapes. Je prête même plus attention à ce qu'il fait, j'entends juste des bruits : le zip, les froissements. Je m'aperçois qu'il est parti seulement quand la porte claque.

Je sens un renvoie pointer le bout de son nez. Oh non. La tête qui tourne, je rend tripes et boyaux sur le sol. Putain. Je reste immobile pendant ce qui me semble être une éternité puis je sombre dans un sommeil agité.

Sacrée soirée de merde. Abi va me tuer.

Bécane - LomepalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant