Chapitre 25

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Je passe le jean noir que m'a passé Athanasia et mes doigts lissent les plis imaginaires de la blouse rouge qui appartient toujours à la même personne que le jean.

Habituellement je ne porte que très rarement du rouge, mais depuis ma robe de bal, je trouve que cette couleur me "sied parfaitement au tient " comme me l'a dit Rosie quelques jours plus tôt.

Je sors de la cachette que me faisait le paravent de la chambre princière et tombe sur Athanasia, en plein bécotage avec le blond du bal. Je marche sur la pointe des pieds, les sandales plates qu'elle m'a prêté dans la main droite, pour sortir de la chambre et leur laisser de l'intimité.

Ma discrétion disparaît juste devant la porte, quand mon ventre affamé grogne d'envie d'être empli. Je jure et ouvre la porte à la volée en la claquant derrière moi. La scène repasse dans ma tête, et j'imagine la tête des deux tourtereaux, surpris en pleine démonstration d'amour baveuse.

Je ris toute seule dans les couloirs. En haut de l'escalier principal, j'enfile les chaussures ouvertes, qui me vont parfaitement. La couleur camel du cuir s'accorde à merveille avec mon bronzage naturel, et le vernis blanc que j'ai apposé quelques jours auparavant sur mes orteils. Je ne mets que cette couleur sur mes pieds.

Au milieu des marches, je me fige. Une femme vêtue d'un élégant tailleur rose poudré, tient la main d'un homme habillé d'un costard noir. Ses chaussures parfaitement cirées, sa barbe taillée au millimètre près, me tapent à l'œil. La femme quant à elle, a le visage mangé d'un sourire heureux, identique à celui d'Athanasia. Cependant dans le regard du couple, quelque chose me chiffonne. Comme une sorte de lueur semblable, synonyme d'une souffrance égale, brille au fond de leurs pupilles. Une chose qui reste sur leur cœur depuis des années, et qui paraît ineffaçable. Si comme on le dit, le regard est le reflet de l'âme, chez ces deux là, elle est bien amoché, telle un verre cassé que l'on a tenté de recoller, au final l'objet forme de nouveau une entité, mais des fissures subsistent, restent visibles.

Une femme en robe noire, coiffée d'un chignon tressée bien tiré en arrière, leur fait une référence. Je comprends que le couple en question n'est autre que le couple royal, aux rênes du pays grec. La similarité du sourire de la princesse à celui de la femme s'explique par les lois de la génétique.

Je descends les dernières marches pour saluer d'une référence parfaite, résultat d'années d'entraînement pour allier grâce et tonicité. Je me redresse, pour rencontrer leur regard, insistant. Mes yeux se bloquent dans ceux de la reine, où une flamme s'allume. Je ne saurais l'expliquer mais une certaine chaleur emplit mon être. Je détourne le regard brutalement, perturbée.

- Jordan Diaxin, garde personnelle du Prince d'Espagne. Merci de m'avoir laissée dormir dans votre palais cette nuit.

Le roi fronce les sourcils.

- Chiago est ici ? Je n'en savais rien. Heureux que mon toit est pu être le votre le temps d'une soirée.

Une voix s'élève non loin, tournant court à la conversation.

- Simenon ! Agaïsta !

L'attention du couple se détourne de moi pour se reposer sur le Prince, qui arrive d'un pas décontracté, les mains dans les poches de son pantalon chino beige. Je souris au moment où mes yeux se posent sur son tee-shirt, vermeille. Nous sommes assortis.

La reine, Agaïsta, sers dans ses bras mon protégé. Simenon, le roi, se contente d'une pression sur son épaule et d'un sourire bienveillant. Des pas résonnent dans l'escalier, sur les marches en marbre froides.

Athanasia apparaît, suivit de près par le blond dont j'ignore le prénom.

- Alors, on ne m'attend pas pour le rassemblement de famille ?

Chiago sourit tendrement, chose dont je ne le pensais pas capable. Il lui pose un bisou sur la joue, et jette un regard noir au blondinet, sans lui accorder quelconque politesse.

Les orbes bleus du copain de la princesse grecque, se pose sur moi, me détaillent rapidement, puis s'arrêtent sur mes yeux. Une moue dédaigneuse apparaît sur son visage.

- Tu ne me salue pas dans les règles de l'art, comme une employée doit le faire face à un membre de la famille royale ?

Tous mes muscles se tendent. Cet abruti n'a pas aimé mon talon aiguille hier,  encore moins son rejet. Il se venge aujourd'hui, devant ses futurs beaux-parents, en pensant que de cette manière je ne broncherai pas. Il se trompe, je ne me laisse jamais faire, et il ignore la facilité avec laquelle je manipule les mots.

- Je ne te dois absolument aucune forme de salutations. Tu n'es rien. Seulement le copain de la princesse. Pas son mari, ni son fiancé, juste son copain, lourd, dragueur et irrespectueux. De plus, le contrat que j'ai signé stipule clairement que je ne dois une référence respectueuse qu'aux membres de la famille royale d'Espagne, mes employeurs.

Ses yeux brillent de défi. Un sourire méchant orne ses lèvres. Un duel de regard débute entre nous. Un duel que je ne perdrais pas.

- Alors pourquoi avoir exécuter une référence devant le roi et la reine de Grèce ?

Fier de sa répartie, il se redresse dans une posture de mâle dominant. Mais celle qui domine entre nous deux, c'est moi, et personne d'autre.

- Puisque ma mère m'a inculqué le respect, cette chose que toi, tu n'as pas.

Jordan 1 - Blondinet 0 : Game Over, Abruti.

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