5.

961 82 6
                                    

Samedi 23 Septembre 1978.

Londres rentre dans sa torpeur matinale. Une douce brise souffle. La couette sur la tête, je ronchonne. Mon réveil sonne bruyamment depuis cinq minutes. Je m'enfonce un peu plus dans mes draps ne voulant pas en sortir. Je n'ai pas envie de gâcher une de mes journées de repos à me disputer avec mon petit-ami. Je sors le bras de la chaleur confortable de mon lit pour le fracasser sur mon réveil qui s'éteint aussitôt. Je souffle de soulagement en essayant de me rendormir.

Je suis sur le point de retomber dans les bras de Morphée quand ma meilleure amie ouvre brusquement ma porte, me faisant sursauter, tout en criant de me lever. Comme réponse, je lui fais un doigt à travers mes couettes. Je prends la peine d'ouvrir les yeux quand je sens le froid sur mes jambes. Je me tourne vers Lily qui a un grand sourire sur les lèvres tout en agitant sa baguette dans sa main. Je grogne en me levant de mauvaise grâce pour m'enfermer dans la salle de bain.

L'eau tiède fini de m'achever. Quand je ressors de la pièce, mes cheveux tressés et vêtu d'un jean et d'un pull en laine, je me sers un grand café pour me remettre les idées en place. Des crêpes, envoyées par ma mère hier, reposent sur la table de la cuisine. J'en tartine une de Nutella avant de l'enfourner dans ma bouche. Lily m'attend en tapant du pied devant la porte pour que j'aille plus vite. Mais je n'ai aucune envie de le voir et encore moins de passer une journée en sa présence. Devant le regard insistant de ma meilleure amie, je me résigne à enfiler mes converses rouges.

Nous descendons les escaliers en tergiversant sur un sujet banal sachant que je ne voudrais pas parler de Sirius. Je pars vers la bouche de métro alors que Lily disparaît dans un crack, voulant arriver le plus vite. Je regarde mon immeuble, me demandant combien de temps je pourrais rester cachée à l'intérieur avant que la rousse vienne me chercher. Elle ne mettra même pas une heure. Je souffle en perdant le bâtiment de vu pour me retrouver sur le quai.

Le métro ne se fait pas désirer. Je rentre dedans et me trouve une place près de la fenêtre. J'allume mon Walkman pour faire passer le temps et me plonge dans un livre. Sept stations plus loin, je descends pour changer de ligne. Je refais encore cinq stations avant d'arriver. Je sors à l'air libre. La brise matinale me fouette le visage qui rougit sous cet assaut. Je marche en reculant jusqu'à leur immeuble. Que sera notre dispute du jour ?

Je secoue la tête en sonnant à l'interphone. Une voix roque me répond. C'est lui. Il m'ouvre et je monte les marches. La porte étant déjà ouverte, je rentre dans leur appartement. Lily, sans surprise, est dans les bras de James, Sirius sirote son café assis sur un tabouret au bar accompagné de Remus. Peter et les filles ne sont pas encore arrivés. Je pars m'asseoir sur le canapé opposé au couple. Sur la table repose un magazine de musique sorcier ainsi qu'un de Quidditch. Je prends le premier en commençant à le feuilleter n'accordant aucun regard au brun me fixant.

Il est hors de question que nous nous disputions en présence de nos amis. Remus se contentant de nous regarder avec alternance, se résout à apporter sur la table basse un gâteau au chocolat, sûrement acheté dans la pâtisserie du coin. J'en prends une part en remerciant mon ami tout en continuant ma lecture. Son regard gris me brûle tout le corps. L'interphone résonne dans la pièce et je souffle intérieurement de soulagement.

Mary et Marlène arrivent joyeusement. Elles habitent ensemble. Je les salue avec un sourire forcé n'étant pas d'humeur. Elles ne font aucune remarque dessus et entament une discussion avec Remus et le petit couple. Ce n'est pas nouveau que mon couple avec Sirius va mal. Cela fait un mois que nous ne pouvons nous voir sans nous crier dessus et presque deux qu'il y a de l'eau dans le gaz. Ça devient oppressant. La personne avec qui je suis n'est plus la personne qui me rend heureuse. Et cette vérité fait mal, car malgré tout je l'aime.

Le seul geste qu'il fait pour moi dans l'heure est de me donner un chocolat chaud. Il sait que j'aime ça. Ma colère envers lui baisse un peu. Même s'il passe son temps à m'en vouloir, car je ''me mets en danger'', il essaye de briser un peu la glace.

L'arrivée de Peter, me sort de la torpeur dans laquelle je me suis glissée inconsciemment. Cela m'arrive de plus en plus souvent de m'enfermer dans mon monde sans accorder la moindre importance à celui réel qui m'entoure. Peter brandit fièrement une pièce de Molière dans ma direction. Je lui souris en l'invitant à s'asseoir à côté de moi pour que nous puissions en parler. Je lui ai longtemps parlé de la littérature française quand nous étions à Poudlard, mais il était assez réticent à en lire. Je suis contente d'apprendre que malgré ses a priori, il a aimé ce qu'il a lu.

Sirius ne cesse de me fixer toute la journée. Comme si j'étais un animal sauvage et qu'il essayait de deviner mes prochains gestes. Et cela a le don de m'irriter. S'il veut temps me regarder c'est qu'il doit avoir quelque chose à me dire, alors qu'il prenne son courage de Gryffondor pour venir. Mais au fond de moi, je sais pourquoi il m'observe de loin. Je le sais, car je fais la même chose. On a peur de faire un faux pas qui engendrera une nouvelle dispute qui pourra, cette fois, nous être fatal. Alors, on s'observe de loin en essayant de préserver un lien déjà éreinté. Un lien si faible que nous-même n'arrivons plus à le distinguer.

Je reporte mon regard sur ma montre. Il est l'heure pour Lily et moi de partir. Nous travaillons comme presque tous les soirs. Je l'avertis en me levant. Elle ronchonne tandis que James enroule ses bras autour d'elle. De vrais adolescents.

« - Vous vous voyez ce soir après le service, je soupire.

- J'arrive », elle répond de mauvaise grâce.

Il a bien changé ma meilleure amie celui-là. Je ne peux que lui en être reconnaissant. Je n'aurais jamais pensé il y a deux ans qu'un jour Lily puisse préférer rester avec un garçon plutôt que travailler. Je prends Mary dans mes bras et fais pareil avec Marlène, Remus et Peter. Je salue de loin James qui essaie de retenir sa dulcinée.

Je me fige et Sirius en fait de même. Nous nous fixons sans rien dire. Je le sens ce lien se fissurer quand je tourne les talons. Je suis consciente de ce que je viens de faire même si personne n'a dû le remarquer. Mais il le sait aussi bien que moi. Je dévale les escaliers suivie de Lily.

« - Ça ne va toujours pas avec Sirius ? Elle demande.

- Je ne crois pas qu'on va continuer comme cela longtemps. »

Elle reste perplexe à ma phrase. Je ne l'attends pas et transplane. Je ne suis pas d'humeur à passer trente minutes collée à d'autres personnes. Je ne me retrouve pas très loin de Camden Town et commence donc à marcher. J'ai mal. Mais je suis en colère. En colère contre lui. Contre moi.

Je pousse sans ménagement les portes du Black Heart déjà bien remplit pour une fin d'après-midi. Mais nous sommes un samedi. Je pars dans les vestiaires pour enfiler ma tenue quand Lily débarque. Je lui souris. Elle a sûrement du prendre le métro n'ayant pas envie de marcher de l'air de Transplanage au Black Heart. Je ressors pour me planter derrière le bar en fredonnant We Are The Champions de Queen. Je commence ma soirée avec plusieurs commandes tout en slalomant entre les tables.

Je n'ai qu'une envie c'est de rentrer chez moi pour me fourrer dans mon lit avec un grimoire, que j'ai acheté il n'y a pas longtemps.

Quand j'aperçois Phil et Eli, je pars presque en courant chercher mes affaires. Je n'attends pas Lily sachant qu'elle dort chez James et que par conséquent nous ne prenons pas le même chemin. À cette heure le métro est presque vide, je m'engouffre donc dedans, mon Walkman sur les oreilles.

La vision de mon immeuble me fait esquisser un sourire. Je monte le plus vite possible les marches pour enfin rentrer dans mon appartement. Je jette mes chaussures dans l'entrée et pars directement dans la salle de bain pour ensuite me caler dans mon lit. Ma baguette dans une main et un chocolat chaud dans l'autre, je lis les pages du grimoire posé sur mes jambes. J'essaie quelque sort sur ce qui me tombe sous la main. Quand je suis assez satisfaite du résultat et que mon corps commence à s'effondrer, je range tout pour dormir. 

Stab The LightningOù les histoires vivent. Découvrez maintenant