J'irai jusqu'au bout (Framal)

Chapitre 10 - Une boite

Les jours qui suivent l'élaboration de notre plan se succèdent lentement. 

Nous avions convenu de le mettre à exécution dans deux semaines. Les vacances d'automne débuteront et je serai donc disponible à tout moment pour agir. 

Hakim avait protesté en nous signalant que le temps nous était compté... Mais, les autres ont réussi à le convaincre que c'était plus sûr d'être bien préparé. 

De plus, Idriss devait rencontrer son avocat à plusieurs reprises, nous n'allions pas lui mettre ce poids en plus sur les épaules. 

Cela fait donc cinq jours que je n'ai plus de nouvelles des garçons... Et bizarrement, la vie me semble bien trop calme et monotone depuis... A croire que je suis attirée par l'adrénaline que me procure cette affaire. 

Heureusement, je peux compter sur mon poste d'enseignante pour me changer les idées. 

Beaucoup de personnes, dont les quatre rappeurs, ne savent pas à quel point ce travail peut prendre du temps et de l'énergie. Les enfants sont de plus en plus dans le besoin. 

Je veille, toujours, à ce que tous mes élèves ressortent de la classe avec de nouvelles connaissances après avoir passé une bonne journée. C'est pourquoi, j'ai mis mon temps libre à profit dans l'élaboration de jeux de sociétés éducatifs et autres bricolages. 

Mon appartement n'a jamais autant été envahi de matériel scolaire. Si Idriss voyait ça, je pense qu'il partirait en courant dans la seconde. 

Pourtant, avec le petit Samir, ça ne suffit toujours pas. 

Aujourd'hui, nous sommes jeudi. Les élèves ont le droit de choisir un livre dans la bibliothèque et de le découvrir durant la dernière heure de la journée. C'est ma façon à moi de les remercier pour le travail accompli... Mais, le petit garçon refuse, je vois qu'il ne tient plus sur sa chaise et qu'il a besoin de bouger. 

- Samir.

Le petit garçon de 10 ans lève la tête, ses cheveux noirs et bouclés lui tombent sur le devant du visage, ses yeux noisettes apparaissent à peine. Il ne parle pas. En réalité, je n'ai jamais vraiment connu le son de sa  voix.  

- Viens près de moi, s'il te plait.

Le petit garçon s'exécute sans protester. Toutefois, il traine des pieds. 

Lorsqu'il arrive à mon bureau, j'essaye de placer ma main sur son épaule, il a un geste de recul. 

Il ne supporte même pas que je le touche.

- Dis moi ce qui te ferait plaisir Samir. Tu as si bien travaillé aujourd'hui !

Il hausse les épaules.

-  Tu veux colorier ? Courir dans la cour ? Ecrire quelque chose ? Utiliser l'ordinateur de la classe ?

Aucune réaction. Je continue de lui énumérer différentes possibilités, des privilèges qui auraient fait réagir n'importe quel enfant... Mais pas Samir.

La sonnerie retentit et les élèves ne se font pas prier pour ranger leurs affaires et courir jusqu'à la porte. Je n'ai pas envie de les réprimander aujourd'hui, je n'en ai pas le courage. 

Je déteste rester sur un échec, ça me bouffe. J'ai besoin de me vider l'esprit et de m'amuser ce soir. Cela fait un moment que je ne suis pas sortie. 

J'envoie donc un message à Shannon et Raphael, mon meilleur ami d'enfance, sur notre conversation groupée. 

"Vous n'avez pas envie de sortir ce soir ?"